Florence Parly tient son arme laser tueur de drones

Dans la lutte anti-drones, le laser pourrait être tendance. La pépite française CILAS développe une arme laser anti-drones qui pourrait être prête pour les JO de Paris en 2024. Que la force soit avec la ministre des Armées.
Michel Cabirol
(Crédits : CILAS)

A quelques mois de la tenue d'événements sportifs majeurs en France (Coupe du monde de rugby en 2023, puis Jeux Olympiques en 2024), la France accélère son dispositif en matière de lutte anti-drones. Des drones qui prolifèrent en France, dont le nombre est passé de 400.000 en 2017 à 2,5 millions aujourd'hui, dont plus de 40.000 drones de plus de 800 grammes, selon le rapport sénatorial sur les drones dans les armées françaises. La lutte anti-drones est d'ailleurs devenue en 2020 l'une des priorités du ministère des Armées.

"C'est un véritable enjeu technologique, car il s'agit de faire face à une menace qui ne peut pas toujours être prise en compte par notre défense aérienne classique : elle est trop petite, trop lente, trop basse et avec une signature radar trop faible", a rappelé mercredi la ministre des Armées, Florence Parly.

L'actualité montre d'ailleurs l'emploi grandissant de drones vendus dans le commerce et modifiés pour devenir des armes dangereuses. Mardi, deux drones piégés ont été lancés contre l'aéroport international d'Erbil au Kurdistan irakien, et lundi, les Américains ont abattu un drone piégé au-dessus de leur ambassade à Bagdad. Par ailleurs, les Houthis multiplient depuis des mois les attaques de drones contre l'Arabie Saoudite.

HELMA-P, un laser tueur de drones

Cette menace omniprésente et évolutive autant sur les théâtres d'opérations où sont présentes les armées françaises que sur le territoire national place sous les projecteurs le savoir-faire rare et prometteur de la pépite française CILAS, filiale d'ArianeGroup, qui développe en partie sur fonds propres un laser tueurs de drones baptisé HELMA-P. Florence Parly a d'ailleurs assisté mercredi à un nouvel essai, qui a permis la destruction en vol d'un mini-drone par le système développé par CILAS sur le site Essais de missiles de la Direction générale de l'armement (DGA).

"A moyen terme, pour renforcer notre défense anti-drones, nous travaillons sur le développement de lasers de puissance, et c'est ce que vous nous avez montré aujourd'hui", a noté la ministre présente à Biscarrosse. Un système en cours de développement que le ministère des Armées espère voir opérationnel dès 2024 pour les JO de Paris. Les ministères des Armées et de l'Intérieur travaillent également sur une doctrine d'emploi de cette arme lors des grands événements publics, a expliqué le cabinet de la ministre.

Le laser, une arme très précise et endurante

Le savoir-faire de CILAS place la France dans le peloton de tête des nations leaders dans le monde dans le domaine des armes laser de moyenne puissance, mais loin derrière les Etats-Unis (High Energy Laser de Raytheon et Compact Laser Weapon System de Boeing) et probablement Israël (Drone Dome de Rafael). En Europe, MBDA Deutschland avait déjà réussi la démonstration d'une destruction d'un drone en vol en 2015. "Nous développons pour le moment en France des lasers de 2 à 5 kW. Les Américains en sont à 200 kW et mon homologue m'a dit qu'il visait 500 kW d'ici à quatre ans", a récemment expliqué dans une interview accordée à La Tribune le chef d'état-major de la marine, l'amiral Pierre Vandier. Il y a également des développements sur ce segment de marché en Russie, en Chine et en Australie.

L'arme laser développée par CILAS, avec le soutien financier de l'Agence de l'innovation de défense (AID), a effectivement une puissance de 2 kW et peut neutraliser un drone jusqu'à une distance d'un kilomètre. "Le laser présente de nombreux intérêts : très précis, il ne nécessite aucune munition, il est efficace de jour, comme de nuit et se distingue par son endurance", a assuré Florence Parly. Le succès du démonstrateur est très prometteur. Cette arme "semble à même de traiter plusieurs cibles rapprochées grâce à une action rapide, ce qui pourrait constituer une piste pour répondre aux attaques en essaim", expliquent les sénateurs Cédric Perrin, Gilbert Roger, Bruno Sido et François Bonneau dans leur rapport. Des essais qui ont montré l'efficacité et la précision de l'arme laser, capable de détruire plusieurs drones successivement (7 secondes par neutralisation).

Dans ce cadre, CILAS a pour feuille de route de perfectionner cette technologie tant en terme de puissance que de portée (miniaturisation) et de mobilité : plus les systèmes seront petits, plus ils seront facilement déployables. Florence Parly a d'ailleurs demandé l'expérimentation de ces armes lasers sur les bâtiments de la Marine nationale dès le premier semestre 2022. Des blindés pourraient être également équipés, voire des aéronefs.

Une lutte anti-drones qui monte en puissance

La lutte anti-drones est montée en puissance très tardivement en France. Ce n'est qu'en 2017 qu'un appel d'offres portant sur un système de lutte anti-drones (détection et neutralisation) est lancée par la DGA dans le cadre du marché MILAD (Moyens Mobiles de Lutte Anti-Drones). Un marché remporté par CS Group avec le système Boreades, multi-senseurs et multi-effecteurs, agissant par brouillage et leurrage. Les trois armées l'ont acheté en 18 exemplaires, qui "commence seulement à être déployé", regrettent les sénateurs. Ce marché a également permis l'acquisition de fusils brouilleurs Nerod de la société MC2 Technologies destiné à l'Armée de terre. Une dizaine ont été livrés à ce jour, 25 autres devant l'être au cours de l'année 2021.

Par ailleurs, des initiatives particulières ont été lancées au sein des armées, comme la mise au point de la solution BASSALT par l'Armée de l'air, en partenariat avec la société Hologarde, filiale d'Aéroports de Paris et avec le soutien de l'AID. Cette solution, qui combine détection et neutralisation, a fonctionné dès 2019, notamment pour protéger le sommet du G7 de Biarritz. La section technique de l'armée de terre (STAT) a doté en 2020 un VAB d'une capacité de lutte anti-drones à partir d'éléments dérivés de MILAD, associés au tourelleau télé-opéré du VAB pour assurer l'identification.

Enfin, un appel d'offres d'un montant estimé à 350 millions d'euros vient d'être lancé pour l'acquisition d'un système baptisé PARADE (protection déployable modulaire anti-drones). Il s'agit d'un marché à bons de commande qui prévoit fin 2022 l'acquisition de six systèmes, d'autres commandes étant possibles sur toute la durée du marché (11 ans). « Ces systèmes s'appuieront sur les trois piliers de la lutte anti-drones : la capacité de détection, donc des senseurs, un "command and control" (C2) et des effecteurs », a précisé le porte-parole du ministère des Armées, Hervé Grandjean lors du Paris Air Forum organisé par La Tribune. Thales a répondu à cet appel d'offres lancé par le ministère aux côtés de CS Group.

Michel Cabirol

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Commentaires 10
à écrit le 08/07/2021 à 23:07
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Même un lance-pierre ferait mouche sur des jouets Parrot par temps clair... En revanche par temps couvert c'est une toute autre histoire!

le 09/07/2021 à 14:21
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à plus de 10 mètres de hauteur???

le 09/07/2021 à 15:48
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@gilburt A 10 mètre d'altitude une carabine de forain devrait suffir. ;-)

à écrit le 08/07/2021 à 18:50
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En parlant d'armes : Depuis l'avènement des avions, des hélicoptères et la multiplication des lance-roquettes légers, les tanks ne sont plus aussi invulnérables qu’avant. Un problème pour l’armée russe qui possède des milliers de chars dont une bo...

à écrit le 08/07/2021 à 17:55
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J'ai lu il y a environ six mois, ou peut-être un peu plus, qu'Ariane Group voulait vendre Cilas, et bien sûr, à l'époque, les candidats français au rachat étaient aux abonnés absents. Encore une pépite pour un fonds américain ou chinois ?

à écrit le 08/07/2021 à 17:07
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C'est cool on monte d'une marche vers le concret .De licorne et quantique nous voilà arrivé à : pépite et laser ...

le 12/07/2021 à 16:07
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Si un laser devrait suffire a condition de le raccorder à une centrale nucléaire pour lui tout seul et tournant à plein régime pour qu'il est la puissance suffisante...

à écrit le 08/07/2021 à 9:44
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il faut quand meme raison garder. les attaques de drone en irak n ont pas fait de degats. Avec un drone qui a une charge utile de quelques centaines de grammes, difficile de faire beaucoup de degats (un avion emporte des centaines de kg de bombes pou...

à écrit le 08/07/2021 à 8:36
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Les américains eux en sont à des mini drones de la taille d'insectes qui agissent en interdépendance les uns par rapport aux autres, autant vous dire la terrible efficacité d'un tel concept, nos drones "lasers" n'auraient que peu de chances contre ce...

à écrit le 08/07/2021 à 7:37
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L'idée est très bonne sur le papier et avec une cible pilotée par le concepteur, mais avant d'investir des millions d'euros, testons le produit avec deux drones cibles pilotés par des intervenants autres et "neutres" des contrats à venir.

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