Et si l'architecture « open rotor » venait à s'imposer sur la prochaine génération d'appareils moyen-courriers ? CFM International, la coentreprise de GE Aerospace et de Safran, y croit en tout cas et fait tout pour convaincre. A deux jours de l'ouverture du salon du Bourget, le motoriste franco-américain a fait le point sur le développement de son programme de développement technologique RISE (Revolutionary innovation for sustainable engines), lancé il y a deux ans.
Le moteur tourne au banc
CFM International revendique plus de 100 essais réalisés, qui ont permis selon lui de valider la nouvelle architecture de soufflante ouverte. Dans celle-ci, les aubes de soufflante sont à l'air libre autour d'une turbine à gaz, et non pas carénées comme dans les conceptions actuelles. Cela permet de doubler la taille de ces aubes et donc d'améliorer la poussée. La suppression du carénage et d'une partie de la nacelle permet aussi de réduire la masse du moteur. L'objectif de RISE est ainsi d'améliorer de plus de 20% le rendement énergétique et de réduire de 20 % les émissions de CO2 par rapport aux moteurs de la génération LEAP entrés en service lors de la dernière décennie.
D'autres briques technologiques sont testées comme la combustion avancée, la gestion thermique et les systèmes électriques hybrides, ainsi que la compatibilité avec 100 % de carburants d'aviation durable (SAF). « Notre équipe internationale d'ingénieurs a accompli des choses extraordinaires et je suis plus que jamais convaincu que notre programme RISE fournira les technologies de propulsion qui établiront des normes encore plus élevées pour notre industrie », s'est félicité Gaël Méheust, PDG de CFM International.
Airbus à l'affût
Et ces promesses intéressent fortement Airbus. L'an dernier, le constructeur et le motoriste ont annoncé un partenariat qui doit déboucher sur le montage d'un démonstrateur RISE sous la voilure d'un Airbus A380 dans les prochaines années. Après des essais aux sols, une campagne en vol est prévue dans la seconde moitié de la décennie. Outre les apports en termes de rendement et d'incorporation des carburants d'aviation durables (SAF), il faudra tester les modèles acoustiques (le bruit généré en l'absence de carter étant l'un des points faibles de ce type d'architecture) et les éventuels risques (il n'y a plus de carénage pour contenir une aube qui viendrait à se détacher). Cette nouvelle architecture pourrait aussi amener à adapter la maintenance en fonction du placement du moteur sur l'avion (possiblement à l'arrière du fuselage et non plus sous l'aile).
Ce programme de tests permettra à Airbus de prendre une décision en vue de son futur programme d'avion moyen-courrier qui doit succéder à la famille A320 - dans un segment de marché probablement repensé - à l'horizon 2035. Lors du Paris Air Forum organisé par La Tribune vendredi dernier, Guillaume Faury, le président exécutif d'Airbus, a rappelé son intérêt pour le concept : « Nous travaillons sur des choses assez sophistiquées et excitantes sur la forme des ailes, leur déformation en vol, leur adaptabilité. Mais il y a aussi des travaux dans le domaine de la propulsion avec le RISE de CFM, un programme d'open rotor, lui aussi prévu pour 2035, qui viendra contribuer très largement à la réduction des émissions de carbone. Nous sommes en partenariat avec CFM pour tester ces solutions. »
Besoin urgent de maturité
CFM International devra aussi réussir à passer de la R&D à un programme industriel. Pour être en cohérence avec le calendrier d'Airbus, il faudra basculer à l'horizon 2027-2028. Le danger pourrait alors venir d'un trop plein de développements simultanés : celui de l'avion, celui du moteur et leur compatibilité afin de former un couple efficace et mature. Dans le secteur de l'aviation d'affaires, Dassault Aviation et Safran Aircraft Engines s'en étaient mordus les doigts il y a quelques années avec le Falcon 5X et le Silvercrest. Et il ne faudra pas se tromper : comme le dit Guillaume Faury, ce sera la génération clef pour la décarbonation du trafic aérien.
Sujets les + commentés