Rolls-Royce met fin à un scandale de corruption pour 763 millions d'euros

Le motoriste a accepté d'effectuer une série de versements aux autorités britanniques, américaines, et brésiliennes pour un total de 763 millions d'euros (671 millions de livres). Le groupe a fait travailler des intermédiaires pour obtenir des contrats à l'étranger qui ont eu recours à des méthodes de corruption.
Grégoire Normand
Rolls Royce doit verser 497 millions de livres aux services de répression des fraudes du Royaume-Uni.

La corruption dans l'industrie aéronautique revient au centre des débats outre-Manche. Rolls-Royce vient d'annoncer dans un communiqué avoir conclu des accords avec le service de répression des fraudes britanniques (Serious Fraud Office, SFO) pour suspendre des poursuites concernant des affaires de corruption dans le cadre de marchés internationaux. Les investigations ont permis de mettre au grand jour des pratiques illégales effectuées entre 1989 et 2013.

763 millions d'euros pour mettre fin au scandale

Selon les accords rendus publics, les sommes versées se décomposent en trois parties. Un premier versement de 170 millions de dollars doit être effectué au Département américain de la justice. Un second de 25,58 millions de dollars est prévu pour le ministère de la Justice brésilien. Enfin, la firme doit dépenser 497,25 millions de livres plus les intérêts au SFO du Royaume-Uni.

"Ces ententes portent sur des activités de corruption impliquant des intermédiaires dans un certain nombre de marchés internationaux, activités au sujet desquelles le SFO a ouvert une enquête dès 2012, explique un communiqué de Rolls Royce. Il s'agit d'accords volontaires qui ont pour effet de suspendre une poursuite pour une période définie, pour autant que l'entreprise satisfasse à certaines exigences, par exemple le paiement d'une pénalité financière."

La firme n'a pas apporté beaucoup de précisions sur les affaires dans lesquelles elle était impliquée. L'attention des autorités s'est visiblement concentrée sur le paiement d'intermédiaires par le biais de commissions lors de contrats. Une pratique qui est régulièrement pointée du doigt en raison de l'opacité qui règne sur ce type d'échange. Rolls Royce a cependant annoncé qu'elle apportera plus d'informations sur l'impact de ces règlements au moment de la publication des résultats de l'exercice 2016 le 14 février prochain.

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Rolls Royce fournit des équipements pour l'industrie aéronautique. Crédits : Fabrizio Bensch/Reuters

Des excuses qui sèment le doute

Au delà des conséquences financières du versement de ces sommes, l'image de la marque a pu pâtir de ce type de scandale. C'est pourquoi Rolls Royce a adopté une stratégie de communication basée sur des excuses comme l'a exprimé le directeur général Warren East :

"Les comportements qui ont été mis au jour dans le cadre des enquêtes menées par Serious Fraud Office et d'autres organisations des forces de l'ordre sont complètement inacceptables, et nous nous en excusons sans réserve. Tout cela était indigne des principes sur lesquels se base Rolls-Royce et que notre personnel, nos clients, nos investisseurs et nos partenaires s'attendent à nous voir respecter."

La célèbre marque automobile assure également avoir pris des sanctions, et mis à la porte des personnes concernées par ce scandale. Elle affirme également avoir mis fin aux relations avec certains intermédiaires :

"Nous avons pris des mesures disciplinaires tranchées à l'égard des infractions. En conséquence, certaines personnes quittent l'entreprise et nous ne retiendrons plus les services des intermédiaires impliqués."

Mais ces bonnes intentions ne vont pas forcément mettre un point final au scandale, comme pourrait le laisser entendre la communication de la société. Le journaliste du Guardian Nils Pratley rappelle que de vastes zones d'ombre subsistent dans cette affaire. "Les documents publiés par la justice mardi ne contiennent aucun nom (ndlr : pour des raisons juridiques), mais les remarques du juge sont puissantes. Il fait référence à 'des violations les plus sérieuses du droit pénal qui impliquent du personnel de direction'".  Dans  le communiqué de la SFO, le juge anglais Brian Leveson en charge de l'affaire a d'ailleurs indiqué que "les enquêtes concernant les comportements individuels se poursuivent".

Rolls Royce a d'ailleurs eu recours au juriste Lord Gold qui continue de travailler avec la firme et devra rendre un rapport qui devrait être publié dans les semaines à venir. Enfin, Rolls Royce est également impliquée dans des affaires de corruption en Indonésie, Thaïlande, Chine et Russie comme le rappelle le Financial Times.

Pour mener à bien ses investigations, le SFO a fait travailler 70 personnes sur ce dossier qui aurait coûter plus de 13 millions de livres selon l'administration. "C'est la plus grande enquête jamais menée par le SFO".

Un groupe en voie de redressement

Malgré ces amendes, le constructeur britannique a indiqué que d'après des chiffres préliminaires, les bénéfices et la trésorerie devraient être supérieurs aux prévisions. Par ailleurs, Rolls Royce a affiché la plus forte hausse de l'EuroFirst 300 ce mardi 17 janvier à la suite de l'annonce de l'accord. Sandy Morris, analyste chez Jefferies a indiqué à Reuters que :

"Ce n'est clairement pas un grand moment dans l'histoire de Rolls-Royce mais pour ce qui est le processus de guérison, l'accord avec le SFO (Serious Fraud Office) et l'amélioration (...) notamment du flux de trésorerie, signifie que peut-être, peut-être seulement, Rolls est en voie de redressement".

Grégoire Normand

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