Carrefour : la conséquente rémunération du PDG Alexandre Bompard finalement approuvée largement par les actionnaires

Réunis en Assemblée générale ce vendredi 24 mai, les actionnaires du groupe Carrefour ont largement entériné la rémunération du PDG Alexandre Bompard pour 2023 et 2024. Et ce, même si le discours du dirigeant a été perturbé en ouverture de l'assemblée générale par des chants, slogans, sifflets, et invectives émanant d'une vingtaine de syndicalistes de la CGT.
Emmanuel Bompard a été accueilli par des sifflets lors de l'assemblée générale de Carrefour.
Emmanuel Bompard a été accueilli par des sifflets lors de l'assemblée générale de Carrefour. (Crédits : Reuters)

[Article publié à 14h07 et mis à jour à 14h53] L'année dernière, les actionnaires du groupe Carrefour s'étaient montrés réticents à approuver la rémunération du PDG Alexandre Bompard. Mais il semble que le vent a tourné... Ce vendredi 24 mai, réunis en assemblée générale, ils ont approuvé à une large majorité la rémunération du dirigeant pour 2023 et 2024. Le schéma de rémunération du PDG du groupe pour l'année 2023 a été validé à plus de 70%. Celui pour 2024, à 93,49%.

Pour 2023, Alexandre Bompard  touchera, dans la continuité des années précédentes, au moins 4,5 millions d'euros, à quoi s'ajouteront jusqu'à 5,3 millions d'euros en actions ultérieurement. Concernant 2024, la rémunération du dirigeant pour 2024, prévoit une part fixe inchangée (1,6 million d'euros) et une part variable, sous critères de performance, pouvant aller jusqu'à 190% de cette part fixe (3,04 millions d'euros). Un plan à long terme en actions est également prévu,« à hauteur 55% de la rémunération globale maximum ».

Une validation par les actionnaires qui ne va sans doute pas mettre fin aux débats sur la rémunération du PDG. Car la CGT aime à dépeindre Alexandre Bompard comme le « champion olympique de la casse sociale » et retient qu'il gagne 426 fois plus qu'un employé du groupe. Ce chiffre est issu d'un rapport de l'ONG Oxfam, qui a récemment épinglé le distributeur comme l'un des groupes les plus « inégalitaires ».

Mais Carrefour conteste le calcul de l'association qui rapporte la rémunération d'Alexandre Bompard à celle des 334.000 salariés à travers le monde - dont une majorité au Brésil -, malgré des « écarts de pouvoir d'achat » entre pays. En outre, une part de la rémunération du dirigeant prend la forme d'actions gratuites qui seront délivrées ultérieurement et sous critère de performances.

Chants et sifflets pendants l'assemblée générale

Entre interrogations sur la rémunération du PDG Alexandre Bompard, sur le modèle social du distributeur ou sur l'efficacité de sa lutte contre le réchauffement climatique, l'assemblée générale du seul distributeur du CAC 40, Carrefour, promettait d'être animée ce vendredi à Aubervilliers.

La CGT avait ainsi annoncé début mai son intention de montrer lors de l'assemblée générale de Carrefour son « désaccord total » avec le plan d'Alexandre Bompard, à horizon 2026. Elle a tenu parole d'entrée de jeu.

Sifflets à l'arrivée au pupitre du PDG, « voyou », « augmentez les salaires, pas les actionnaires », « même si Bompard ne veut pas, nous on est là » : une vingtaine de personnes, la plupart vêtus de gilets aux couleurs du syndicat CGT, ont perturbé le discours du patron du distributeur. « Je vous laisse finir », a réagi le dirigeant du groupe depuis 2017, avant de continuer à dérouler son discours pendant une vingtaine de minutes malgré les perturbations.

L'externalisation de 300 magasins inquiète les syndicats

Les syndicats sont traditionnellement présents lors de cette réunion annuelle des actionnaires, et ils ont l'occasion d'y prendre la parole. Mais le discours du PDG n'avait pas été perturbé ainsi lors des précédentes années. Ils reprochent à la direction de Carrefour l'externalisation de plus de 300 magasins et 23.000 salariés - selon un décompte de la CFDT - via la cession à des tiers, franchisés ou locataires-gérants.

Lire aussiLes actionnaires de Carrefour réunis sur fond de polémiques autour de l'importante rémunération du PDG

Passer les magasins en franchise ou en location-gérance permet au distributeur de conserver sa part de marché commerciale tout en se libérant d'un certain nombre de dépenses, à commencer par les salaires. Mais cela n'est pas sans conséquence pour les salariés et la branche services de la CFDT a assigné le distributeur en justice « pour pratique abusive de la location-gérance et de la franchise ». Le distributeur défend cette politique qui permettrait d'éviter les fermetures pour les magasins les moins rentables, de relancer l'activité et de préserver l'emploi.

 « Hasard du calendrier, le même jour, une première audience de pure forme aura lieu au tribunal judiciaire d'Evry » après une assignation de la branche services de la CFDT contre Carrefour « pour pratique abusive de la location-gérance et de la franchise », a exposé le syndicat.

Alexandre Bompard a répondu en mettant en avant le fait que Carrefour n'avait fermé aucun magasin grâce à cette politique, dans un contexte « extraordinairement difficile » pour le secteur de la grande distribution, sous la « pression concurrentielle » de spécialistes du discount, comme Lidl ou Action, et de réseaux de magasins « indépendants », E.Leclerc, Intermarché, Coopérative U, « dont le modèle social n'a rien à voir avec le nôtre ».

Arrivée de Marguerite Bérard au conseil d'administration

Les actionnaires du distributeur ont validé l'ensemble des résolutions sur lesquelles ils devaient se prononcer, la plupart très largement. Ils ont notamment avalisé l'entrée au conseil d'administration de Marguerite Bérard, inspectrice des finances qui était depuis 2019 et jusqu'à la mi-mars à la tête des activités de détail en France de BNP Paribas, à 99,59%.

Ils ont aussi validé l'arrivée comme administrateur d'Eduardo Rossi, en remplacement du milliardaire brésilien Abilio Diniz, décédé mi-février, à 97,01%. Eduardo Rossi est président de Peninsula, le holding de la famille d'Abilio Diniz qui est depuis mars premier actionnaire de Carrefour.

Philippe Houzé et Patricia Moulin Lemoine, représentants le deuxième actionnaire du distributeur qui est la famille propriétaire des Galeries Lafayette, ont notamment vu leurs mandats d'administrateurs renouvelés.

Les engagements climatiques du groupe questionnés

Carrefour devait également être interrogé, par écrit cette fois, sur son déréférencement par la SBTi (Science Based Targets initiative), le principal label pour évaluer les engagements climatiques des entreprises, quant aux objectifs d'atteindre zéro émission nette à horizon 2050.

Quelque 200 entreprises internationales ont ainsi été déréférencées au motif qu'elles n'ont pas étayé leurs engagements avec des objectifs précis » dans le délai imparti, indique l'ONG en pointe sur le sujet, Carbon Market Watch. Carrefour maintient et confirme son engagement auprès du SBTi, mais dit rendre compte ede ses données uniquement sur des temporalités qu'il maîtrise et peut mesurer, avait commenté fin avril le groupe.

Carrefour a par ailleurs annoncé lors de l'assemblée générale qu'il allait ouvrir « dans les prochaines semaines » un magasin sous enseigne Atacadao, originaire du Brésil et dont le groupe est propriétaire, en banlieue parisienne à Aulnay-sous-Bois, en Seine-Saint-Denis.

(Avec AFP)

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaires 2
à écrit le 25/05/2024 à 12:34
Signaler
Difficilement compréhensible au regard des performances boursières médiocres de l'action de Carrefour. Seule explication: capitalisme de copinage, très loin de la notion "le travail et le mérite" tant vantée par les ultra-libéraux.

à écrit le 24/05/2024 à 22:37
Signaler
Scandaleux! A traiter comme son copain de TotalEnergies! Pire: lui, c'est un énarque comme son collègue de Casino, l'expert ès-finances. Il y aurait quelques bons sortis de cette école maudite. Un accident?

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.