Les actionnaires de Carrefour réunis sur fond de polémiques autour de l'importante rémunération du PDG

Carrefour réunit ses actionnaires en assemblée générale vendredi matin espérant endiguer leur grogne croissante concernant la rémunération du PDG Alexandre Bompard, alors que le début d'année 2024 a été marqué par les critiques des syndicats sur le modèle social du distributeur.
Alexandre Bompard est le PDG de Carrefour depuis 2017.
Alexandre Bompard est le PDG de Carrefour depuis 2017. (Crédits : Reuters)

Seuls 56,75% des actionnaires de Carrefour avaient avalisé l'an dernier la rémunération proposée en 2023 pour Alexandre Bompard, le PDG du groupe. Un résultat inhabituellement bas pour des patrons d'entreprises cotées au CAC 40. A titre de comparaison, la hausse de 10% de la rémunération pour 2023 du PDG de TotalEnergies, Patrick Pouyanné, a été adoptée à une écrasante majorité.

PDG de Carrefour depuis 2017, Alexandre Bompard touchera, dans la continuité des années précédentes et si l'assemblée générale donne son feu vert vendredi, au moins 4,5 millions d'euros pour 2023, à quoi s'ajouteront ultérieurement des actions sous critères de performance et valorisées au maximum 5,3 millions d'euros.

La rémunération du dirigeant pour 2024, soumise au vote en mai, prévoit quant à elle une part fixe inchangée (1,6 million d'euros) et une part variable, sous critères de performance, pouvant aller jusqu'à 190% de cette part fixe (3,04 millions d'euros). Un plan long terme en actions est également prévu, à hauteur « 55% de la rémunération globale maximum ».

Carrefour dit avoir pris en compte la grogne montante des actionnaires

Carrefour indique néanmoins dans sa communication financière avoir pris en compte la grogne montante des actionnaires. Leur vote en 2023, note le groupe, a « fait apparaître une attente d'évolution et un besoin supplémentaire d'explication ». A la suite d'échanges, « une structure de rémunération qui réponde aux principales préoccupations des actionnaires » sera proposée à l'AG de mai, indique le groupe.

Selon un bon connaisseur du dossier, le distributeur a notamment amendé plusieurs points déterminant le montant variable versé à son dirigeant. « Alors qu'une surperformance d'un critère pouvait compenser une sous-performance d'un autre critère, cet effet de compensation sera supprimé » à compter de 2024, observe cette source sous couvert d'anonymat. Pour certaines associations, comme Oxfam, cela ne changera pas grand-chose.

« Alexandre Bompard gagne en seulement 9 heures l'équivalent du salaire moyen annuel des salariés de Carrefour », résumait fin avril Léa Guérin, chargée de plaidoyer sur les questions de régulation des multinationales.

Carrefour avait répondu à l'ONG que les calculs d'Oxfam ne correspondent « pas à une quelconque réalité », puisqu'ils rapportent la rémunération de d'Alexandre Bompard à celle des 334.000 salariés à travers le monde - dont une majorité au Brésil - malgré des « écarts de pouvoir d'achat » entre pays.

Lire aussiLa CFDT accuse Carrefour de « délocalisations locales » et l'attaque en justice

Fin février, Carrefour estimait s'être bien sorti d'un « environnement difficile » de forte inflation en 2023 et a annoncé un nouveau programme de rachat d'actions ainsi qu'une augmentation des dividendes pour preuve de sa « confiance » dans son modèle. Les ventes du groupe ont progressé de 3,6% à 94,1 milliards d'euros, mais il a enregistré des volumes « négatifs dans (ses) principaux marchés », dans un « contexte d'inflation particulièrement élevée en Europe et en Argentine ». Son bénéfice net ressort en forte hausse en 2023, de plus de 23% à 1,66 milliard d'euros, grâce à la cession de ses dernières activités sur le continent asiatique, à Taïwan. Sans cette cession, la rentabilité des activités du distributeur ressort en baisse, comme en témoigne un résultat opérationnel en recul.

Le modèle de la franchise inquiète les syndicats

Les organisations syndicales du distributeur sont vent debout contre cette rémunération du patron, en regard surtout de la politique sociale, entre réduction d'effectifs, politique d'économies de coûts et passage de nombreux magasins en location-gérance. Une telle « externalisation », dixit la CFDT, lui permet de préserver sa part de marché commerciale tout en se libérant d'un certain nombre de dépenses, à commencer par les salaires, laissés à la charge du franchisé ou du locataire-gérant. La branche services de la CFDT l'a assigné début mars devant le tribunal d'Evry.

Le distributeur est aussi assigné devant le tribunal de Rennes par une « association des franchisés de Carrefour » qui se plaint d'un « déséquilibre significatif » dans la relation franchisé/franchiseur. Carrefour insiste de son côté sur « l'attractivité » de sa franchise et le faible nombre de cas de désaccords. Il entend poursuivre en 2024 « la transformation de son modèle ».

Interpellée le 13 février par le député (Liot) du Nord Benjamin Saint-Huile au sujet de cette politique, la ministre déléguée à la Consommation Olivia Grégoire avait indiqué que « la situation des franchisés Carrefour est bien identifiée et suivie de près par le gouvernement », et que « les services de l'Inspection du travail ont été mobilisés pour vérifier que le droit du travail est strictement respecté ».

 Au-delà du seul géant du CAC 40, la CFDT s'inquiète de voir l'ensemble de la grande distribution « se diriger vers un modèle qui est une forme de 'délocalisation locale', où on externalise les enjeux sociaux ». Auchan a récemment dit vouloir se tourner vers davantage de franchise, modèle également plébiscité par Casino. Ce mouvement s'opère dans un contexte de fort dynamisme des enseignes de magasins indépendants, comme le leader E.Leclerc, Intermarché ou Système U, où chaque patron d'un ou quelques magasins est libre de sa politique sociale.

Des votes pour entériner l'entrée de nouveaux noms au conseil d'administration

Vendredi, les actionnaires de Carrefour seront en outre amenés à se prononcer sur l'entrée au conseil d'administration de Marguerite Bérard, inspectrice des finances et énarque issue de la promotion Senghor comme Emmanuel Macron. Elle était depuis 2019 et jusqu'à la mi-mars à la tête des activités de détail en France de BNP Paribas.

Ils devront aussi entériner l'arrivée comme administrateur d'Eduardo Rossi, en remplacement du milliardaire brésilien Abilio Diniz, décédé mi-février. Eduardo Rossi est président de Peninsula, holding familiale du milliardaire, qui a assuré Carrefour de son « engagement à long terme » et est même devenu depuis son premier actionnaire. La famille Moulin-Houzé, propriétaire des Galeries Lafayette, a en effet cédé fin mars pour 365 millions d'euros d'actions Carrefour, tout en réaffirmant son « soutien à l'entreprise ».

(Avec AFP)

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Commentaires 20
à écrit le 27/05/2024 à 17:41
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40 ans chez carrefour et je gagne 1500€ comment vous dire que le salaire du pdg c'est un peu la honte 😡

à écrit le 25/05/2024 à 11:01
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Qu'ils fasse un an sans pdg et qu'ils voient la différence !

à écrit le 23/05/2024 à 20:04
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un magasin carrefour trop chère alimentation tout seule loyer 50% EDF ET GDF 35 % ainsi que toute les charges d' un ménage .découvert tout les mois

à écrit le 23/05/2024 à 20:04
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un magasin carrefour trop chère alimentation tout seule loyer 50% EDF ET GDF 35 % ainsi que toute les charges d' un ménage .découvert tout les mois

à écrit le 22/05/2024 à 22:40
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Fils de, Science po, ENA, marié a une macroniste, bref

à écrit le 22/05/2024 à 16:29
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je comprends mieux les prix délirants pratiqué par cette enseigne....un exemple tout bête: la boité de tac-tac vendu aux caisses....chez mon L de Dinan c'est autour de 1.72-1.90 la boîte, ce qui est déjà cher...chez le carrouf du coin c'est 3.09!!!! ...

à écrit le 22/05/2024 à 15:20
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Peanuts même le joueur moins bien payé du PSG gagne plus que lui !

à écrit le 22/05/2024 à 15:20
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Peanuts même le joueur moins bien payé du PSG gagne plus que lui !

à écrit le 22/05/2024 à 15:11
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Il y en a qui sont plus payés et qui réussissent moins bien.

à écrit le 22/05/2024 à 13:26
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Bonjour Moi carrefour ma licence au bout de 33ans de bon et loyaux services après avoir les épaules en vrac il me jette comme un vieux mouchoir et quand je vois ce qu'il touche je vais pleure.

à écrit le 22/05/2024 à 13:26
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Bonjour Moi carrefour ma licence au bout de 33ans de bon et loyaux services après avoir les épaules en vrac il me jette comme un vieux mouchoir et quand je vois ce qu'il touche je vais pleure.

à écrit le 22/05/2024 à 11:10
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On est bien injuste envers ce "pauvre" Capitalisme: notre niveau de vie actuel est redevable à l'épargne capitalisée de nos pères depuis la nuit des temps. Quant-à la rémunération de certains patrons, outre qu'elle est l'exécution d'un contrat de tra...

le 22/05/2024 à 13:34
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La rémunération des dirigeants comprend une partie fixe et une autre variable qui correspond à la réalisation d'objectifs ; chiffres d'affaires, marges, et cours de l'action le tout décidé par les administrateurs et les actionnaires importants , pas...

à écrit le 22/05/2024 à 10:21
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Pendant ce temps on ne parle pas de la franchisation à tout va de Carrefour. L'histoire de celui sui regarde le doigt...

à écrit le 22/05/2024 à 9:56
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Les riches ont besoin de toujours plus d'argents ! Nous autres pauvres on peut définitivement pas le comprendre ça forcément... ^^

le 22/05/2024 à 10:19
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L’idéal serait plutôt que les pauvres deviennent riches et il n’y a que le capitalisme qui puisse leur donner une chance…….

le 22/05/2024 à 10:37
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Et comment ? des siècles de capitalisme et toujours aussi peu de gens qui en profitent. Ya la théorie et ya la pratique et tu me fatigues à venir faire le kamikaze, c'est grotesque. Heureusement que ya les gauchistes pour relever le niveau quand même...

le 22/05/2024 à 10:54
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Rengaine. La bourse grimpe quand le chômage augmente. Tant qu'ils avaient réussi à mettre sous le tapis les externalités négatives, qui ont fait leur fortune, les riches on pu laisser croire à un enrichissement général (c'est à dire au niveau planéta...

à écrit le 22/05/2024 à 9:30
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Les syndicats défendent leurs syndiqués et c'est bien normal. Mais Carrefour n'est pas une exception : chez Ahold-Delhaize on franchise aussi à tour de bras, apparemment.

à écrit le 22/05/2024 à 8:59
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Si nous payions nos ministres - je ne parle même pas de nos parlementaires dont je ne comprends toujours pas qu'ils ne soient pas rémunérés comme nos conseillers municipaux, eux qui ne sont ni capables d'élire le Président de la République ni même d'...

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