La révolution ratée de la Nano lancée par le groupe indien Tata

La voiture la moins chère du monde était destinée aux classes moyennes. Mais les Indiens qui pourraient se l'offrir ne veulent pas d'un « véhicule de pauvre ».
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« Elle consomme moins, l'air conditionné fonctionne mieux, elle émet moins de CO2 et elle est disponible dans de nouveaux coloris, plus pimpants. » Tata Motors vient de se fendre d'un nouveau communiqué pour vanter les mérites de sa Nano modèle 2012, la voiture la moins chère du monde (elle est vendue aujourd'hui l'équivalent de 2.900 dollars ou 2.100 euros).

Présentée à l'été 2009, elle devait, assurait le constructeur indien, révolutionner l'automobile mondiale. À ce prix, la « 2CV indienne » ne pouvait que faire un « carton » auprès de la classe moyenne des grands pays en développement, et démocratiser l'accès à l'auto.

Las... En novembre 2010, en pleine période de fêtes en Inde, habituellement propices à la consommation, il s'en est vendu, en tout et pour tout... 509 exemplaires. Depuis, les immatriculations ont pu grimper jusqu'à 9.000 par mois, avant de redescendre à 4.000. Un chiffre évidemment très éloigné des objectifs initiaux (250.000 ventes annuelles minimum). Pour expliquer cette déconvenue, on peut bien sûr mettre en avant le prix, supérieur à celui annoncé initialement : les 2.100 euros actuels sont loin des 1.500 prévus, un écart lié à l'envolée du prix de l'acier, arguait Tata Motors. Mais il y a eu aussi des problèmes techniques rédhibitoires. La Nano était victime « d'autocombustion », autrement dit elle prenait feu toute seule, sans crier gare. Mais Tata Motors a aussi et surtout manifestement commis une lourde erreur de marketing, en surestimant largement la clientèle cible d'une telle voiture. L'idée initiale des dirigeants de Tata était de cibler la classe moyenne montante en Inde.

« Or, avec des revenus compris entre 700 et 3.000 euros par foyer et par an, la fameuse classe moyenne indienne demeure sinon un mythe, du moins un faux ami pour nous, qui serions tentés d'y voir un reflet assez ressemblant de nos classes moyennes », explique la spécialiste de l'économie indienne, Ève Charrin, dans un article publié récemment par la revue « Esprit » (*).

« Degré zéro de la voiture », la Nano est « trop chère pour les pauvres » tandis qu'elle « n'offre pas le prestige dont rêvent les couches montantes qui pourraient bel et bien se l'offrir ». Au-delà, « parce qu'elle évoque la gloire d'un décollage collectif, l'austère Nano répond mal aux aspirations » de la classe moyenne. Celle-ci ne rêve pas d'essor collectif : son logement, l'éducation, la santé, elle les a acquis de haute lutte, individuelle. L'idée d'une voiture du peuple ne colle pas avec la réalité d'un enrichissement individuel, qui tourne le dos à « l'austère idéal gandhien ». 

(*) Août-septembre 2011

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Commentaires 3
à écrit le 23/11/2011 à 15:08
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j ai mieux et encore moins cher, un cercueil sur roues!

à écrit le 23/11/2011 à 10:58
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mince, une voiture qui prends feu.. on a pas ça chez nous!! en revoyan tl'essentiel, un peu de com et d'option, ça va le faire!!

à écrit le 23/11/2011 à 7:34
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La nano est une rolls royce comparée à la voiture de 2500 euros de Carlos Ghost qui sera probablement en carton.

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