Les comptes n'y sont pas. Pour l'association Transport & Environnement (T&E), les objectifs de CO2 imposés aux constructeurs automobiles sont ambitieux mais encore trop permissifs. D'après une étude publiée ce lundi 15 novembre, l'ONG fait un premier bilan des mesures de limitation de CO2. Ainsi, en deux ans, la moyenne des émissions de CO2 par voiture neuve est en baisse de 18% en Europe. Sur la seule année 2021, qui est la première année où l'objectif contraignant de 95 grammes par km par voiture est imposé, les émissions moyennes sont en baisse de 8%.
En finir avec les "flexibilités"
T&E juge que ces effets vertueux sont la conséquence d'une réglementation contraignante, engagée notamment par Bruxelles. Pour autant, l'association observe que les constructeurs bénéficient d'échappatoires qui ont limité l'impact sur les objectifs.
Ainsi, la réglementation a prévu un certain nombre de flexibilités comme l'ajustement à la masse ou les super crédits (un crédit CO2 doublé pour une voiture électrique vendue).
Pour T&E, le vrai problème réside sur l'ajustement à la masse puisque les super crédits seront neutralisés à partir de 2022. La règle de l'ajustement à la masse permet d'adapter l'objectif de 95 grammes en fonction de la nature de chaque constructeur. Un Mercedes qui, par nature, vend plus de grosses voitures qu'un Renault, s'est ainsi vu octroyer un objectif plus élevé.
"Les flexibilités affaiblissent les trajectoires d'objectifs de baisse de CO2", explique Diane Strauss, directrice France de T&E. L'association a ainsi calculé que ces dispositions ont empêché la vente de 840.000 voitures 100% électrique en Europe sur la seule année 2021.
C'est Volvo qui aurait le plus profité de ces flexibilités, d'après l'étude T&E, à hauteur de 20%. Daimler a gagné 15% de ses objectifs grâce à ces dispositifs, et entre 5 et 10% pour Ford et Volkswagen.
"Effet d'aubaine"
D'après T&E, l'hybride rechargeable reste un important paramètre de contournement des objectifs réels de baisse de CO2, alors même que dans les faits, ces motorisations sont d'importantes émettrices de polluants lorsqu'ils ne sont pas rechargés. "Un effet d'aubaine", a qualifé Dian Strauss, notamment pour les flottes d'entreprise.
L'association souhaite que les politiques publiques réorientent les incitations des flottes de société vers les voitures 100% électriques, alors que celles-ci sont encore largement tentées par les hybrides rechargeables. Selon elle, cela permettrait d'alimenter un marché de la voiture d'occasion, et ainsi rendre les voitures électriques accessibles aux ménages.
Enfin, T&E se dit "déçu" par la trajectoire retenue par la Commission européenne à horizon 2030. Selon elle, elle est moins-disante que les scénarios adoptés par les constructeurs automobiles eux-mêmes. "Si on raisonne par l'absurde, les constructeurs auraient la capacité de vendre des voitures thermiques jusqu'à 60% plus polluants", sans franchir la réglementation, illustre Diane Strauss qui recommande qu'a minima, les objectifs européens soient alignés sur ceux des constructeurs.
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