Un ténor des semi-conducteurs pour le futur de Ferrari et la Ferrari du futur

Le recrutement effectué par le légendaire constructeur automobile est un signe des temps - et un signe attendu : en avril, John Elkann (Ferrari, Exor, Stellantis...) avait annoncé que le nouvel administrateur délégué de Ferrari devrait avoir "toutes les qualités requises, y compris les capacités technologiques". Car, pour le descendant de la famille Agnelli, Benedetto Vigna est bien celui qui saura mener la course en tête dans "dans l'ère passionnante qui s'annonce". À savoir la transition vers l'électrification qui s'annonce d'ici 2025, en misant sur un ingrédient clé: la microélectronique, dans un contexte de forte tension dans le domaine des semi-conducteurs.
(Crédits : © Brendan McDermid / Reuters)

Ferrari s'est tourné vers le secteur technologique pour trouver un nouveau patron capable de soutenir sa stratégie d'électrification, avec la nomination mercredi de Benedetto Vigna issu des rangs de STMicroelectronics, multinationale franco-italienne spécialisée dans la conception et la fabrication de semi-conducteurs (puces électroniques).

Le constructeur italien de voitures de luxe a annoncé que l'ancien président de la plus grande division du fabricant de puces deviendrait son nouvel administrateur délégué.

La nomination de Benedetto Vigna, 52 ans, vient combler une vacance de six mois à la tête du constructeur de voitures de luxe, après la démission pour raisons personnelles en décembre de l'ancien administrateur, Louis Camilleri, qui avait occupé ce poste pendant près de deux ans et demi.

Un patron pour renforcer les liens de Ferrari avec la microélectronique ?

Le président John Elkann, descendant de la famille Agnelli qui contrôle le groupe italien par l'intermédiaire de sa société d'investissement Exor, a déclaré que la société était "ravie" d'accueillir Vigna comme nouvel administrateur délégué.

"Sa profonde compréhension des technologies à l'origine de la plupart des changements dans notre industrie, ainsi que ses compétences avérées en matière d'innovation, de création d'entreprise et de leadership, renforceront davantage Ferrari et son histoire unique de passion et de performance, dans l'ère passionnante qui s'annonce", a-t-il déclaré dans un communiqué.

Mais cette nomination n'est probablement pas un hasard dans un contexte de pénurie de puces électroniques, auquel font face les constructeurs mondiaux depuis plusieurs semaines.

| Lire aussi : Automobile: cinq questions pour comprendre la crise des semi-conducteurs

Car le géant franco-italien STMicroelectronics, qui figure dans le Top 5 des producteurs mondiaux de puces électroniques (aux côtés de grands noms comme Infineon, NXP, Renesas et Texas Instruments), représente un acteur clé pour la filière de l'automobile désormais.

On se souvient des nombreuses lignes de productions mises à l'arrêt en début d'année en raison du manque de composants électroniques disponibles sur le marché, mais aussi de l'analyse qui était pointée dans cet épisode : à savoir un manque de prévision mais aussi de collaboration (partenariats commerciaux, mais aussi codéveloppements) entre les acteurs de l'automobile et leurs fournisseurs de la microélectronique.

Comme l'affirmait lui-même le patron du pôle de compétitivité mondial des technologies du numérique en Auvergne-​Rhône-Alpes, Jean-Eric Michallet (ancien cadre d'IBM), "un rééquilibrage de l'offre est en train de se profiler et pourrait probablement durer quelques années, le temps que les constructeurs automobiles se remettent en marche après cette crise mais aussi codéveloppent à nouveau des produits adaptés avec les fabricants."

Devenue un objet technologique à part entière, au même titre que le smartphone de demain, la voiture du futur embarquera en effet, en plus de son système de gestion de l'énergie liée aux nouvelles motorisations électriques, un ensemble de fonctions applicatives faisant que sa valeur ajoutée ne se situera plus seulement dans sa carrosserie ou son moteur, mais aussi dans son électronique.

Ferrari n'est d'ailleurs pas le seul constructeur à le présager puisque d'autres constructeurs comme Tesla ont déjà, depuis un certain nombre d'années, choisi de nouer des relations renforcées avec le monde de la microélectronique. Sans compter que l'État s'en est mêlé, de manière directe, en signant un avenant au contrat de filière de l'électronique destiné à booster les capacités ainsi que la souveraineté de cette filière stratégique française.

À la recherche du bon profil pour lancer la première Ferrari 100% électrique

Ce recrutement est d'autant plus important que Ferrari, qui propose déjà des modèles hybrides, a en effet promis de lancer sa première voiture entièrement électrique en 2025. John Elkann, qui a assuré l'intérim depuis le départ de Camilleri, avait dit en avril que le nouvel administrateur délégué de Ferrari devrait avoir "toutes les qualités requises, y compris, et c'est important, les capacités technologiques".

Et de fait, ce nouvel administrateur délégué n'est autre qu'un expert d'un domaine stratégique de la microélectronique, les MEMS (Microelectromechanical Systems ou microsystèmes électromécaniques), puisqu'il occupait depuis janvier 2016 chez StMicroelectronics le poste de président de la division des "Produits Analogiques, MEMS et Capteurs". Les MEMS, fabriqués à partir de semi-conducteurs, sont utilisés dans de nombreuses fonctions clés des applications courantes du domaine de l'automobile (capteurs de pression des pneumatiques, capteurs d'accélération pour le déclenchement instantané des airbags....)

Côté calendrier, Benedetto Vigna prendra ses fonctions chez Ferrari le 1er septembre, a indiqué la société dans un communiqué. Vigna, qui est également membre du comité exécutif de STMicroelectronics, quittera la société le 31 août, a indiqué le fabricant de puces franco-italien dans un communiqué séparé.

Les Bourses réagissaient avec hésitation en début de matinée: à Milan, l'action Ferrari reculait dans la matinée de 0,22%. À Paris, le titre STMicroelectronics progressait de 0,56% au même moment.

Course à la mobilité durable

Le 27 mai dernier, John Elkann, président d'Exor-Ferrari et directeur exécutif de Stellantis, avait déclaré lors d'un entretien avec ses actionnaires, que la mobilité durable était devenue centrale pour Ferrari alors que le constructeur automobile de luxe, alors à la recherche d'un nouveau directeur général, se préparait à dévoiler son premier modèle entièrement électrique en 2025, une date limite fixée un mois auparavant.

Pour Ferrari, il s'agit de devancer l'un des plus proches concurrents, Lamborghini, lui aussi sur la voie de l'électrification. Mais la marque de supercars propriété de Volkswagen a dit ne pas envisager le lancement d'un modèle 100% électrique avant la seconde moitié de la décennie, soit 2050, ce qui laisse un peu de marge - à condition de croire Volkswagen bien sûr.

(avec Reuters)

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Commentaires 2
à écrit le 09/06/2021 à 19:57
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Une Ferrari, une Lamborghini électrique, un non sens. Il y a déjà trop d'automatismes, trop d'électronique, d'aides à la conduite, même l' ABS est un superflu, voire l'injection. Une Ferrari, c'est un V12, une rampe de carburateurs Weber, propulsion...

à écrit le 09/06/2021 à 11:43
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Toutes les bagnoles de luxe vont en prendre un coup quand même avec cette électrification... et c'est bien dommage, on voit que les américains avec Tesla on encore réussi un coup de maître en associant une nouvelle image avec une nouvelle marque à la...

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