Pénurie de logements : l'ETI Piriou mise sur des résidences d'actifs pour recruter sur ses chantiers

Pour pallier la pénurie de logements et faciliter l’ancrage de ses salariés sur le territoire, le chantier naval Piriou cherche des financements pour finaliser la création d’une résidence d’actifs à Concarneau. L’accès au logement et la mobilité font partie des grands enjeux sur la feuille de route 2024 du Club ETI Bretagne.
Vincent Faujour, le dirigeant du chantier naval Piriou envisage de construire une résidence pour actifs d'une trentaine de logements à loyer modéré. Baptisé, Ti Ar Porzh, l'ensemble immobilier pourrait accueillir ses premiers locataires au second semestre 2026, au moins temporairement.
Vincent Faujour, le dirigeant du chantier naval Piriou envisage de construire une résidence pour actifs d'une trentaine de logements à loyer modéré. Baptisé, Ti Ar Porzh, l'ensemble immobilier pourrait accueillir ses premiers locataires au second semestre 2026, au moins temporairement. (Crédits : Piriou)

Chiffre d'affaires, effectifs, rentabilité, investissements dans les transitions : chez les dirigeants d'entreprise, l'optimisme retrouvé au semestre précédent aura-t-il été de courte durée ? Au moment où la dégradation du chiffre d'affaires se poursuit dans tous les secteurs, impactée par la baisse du pouvoir d'achat des français et l'inflation, les dirigeants des entreprises de taille intermédiaire se déclarent plus vigilants que pessimistes.

En Bretagne, où la situation de quasi plein emploi se maintient, les membres du bureau du Club ETI Bretagne, qui regroupe désormais 55 adhérents, soit un quart des ETI régionales, pour un total de dix milliards d'euros de chiffre d'affaires et plus de 50.000 salariés, ont assuré de la bonne santé de leur entreprise.

Mais dans un contexte où « l'anormal devient la normalité », les patrons de la belle-iloise (conserverie), d'Olmix (solutions à base d'algues), de Kersia (sécurité alimentaire) et de Niji (numérique), réunis le 25 janvier à Rennes, veulent partager les bonnes pratiques pour gagner en agilité, notamment en termes d'emploi et de logement. La panne du secteur immobilier pèse sur leurs recrutements. A Concarneau, la société Piriou, un autre membre du Club ETI Bretagne, s'active pour ouvrir une résidence d'actifs.

Tous secteurs confondus, la même problématique RH

« La pénurie de logements freine le recrutement de talents et l'ancrage de nos collaborateurs. Malgré le développement de l'emploi sur le territoire, la pression sur le marché immobilier à Concarneau est telle que certains salariés ne peuvent rejoindre leur entreprise, même après avoir signé un CDI, faute d'avoir trouvé un logement accessible », constate Vincent Faujour. Le dirigeant du chantier naval envisage donc de construire une résidence d'une trentaine de logements à loyer modéré.

Avec ses partenaires, Action Logement, l'OPAC et l'association Ailes 29, il a adressé une lettre d'intention aux pouvoirs publics, via le Préfet du Finistère, et à des partenaires potentiels afin d'obtenir les subventions nécessaires. Baptisé, Ti Ar Porzh, l'ensemble immobilier pourrait accueillir ses premiers locataires au second semestre 2026, au moins temporairement, « le temps pour eux de trouver un logement pérenne ». L'investissement global s'élève à 2,8 millions d'euros mais il manque encore 490.000 euros.

« L'accès au logement est un enjeu majeur pour l'attractivité de nos entreprises et l'avenir de notre économie, tous secteurs confondus » martelle Vincent Faujour. « En tant que premier employeur de Concarneau, nous devions de prendre le sujet à bras-le-corps et être chef de file d'un tel projet, fédérateur et solidaire » ajoute le chef d'entreprise, qui partage cette difficulté avec d'autres acteurs économiques. Les secteurs d'activité peuvent être différents, mais les problématiques sont souvent identiques, particulièrement en matière de ressources humaines.

La mobilité, un axe prioritaire

« Pour recruter de nouveaux collaborateurs, nous sommes très souvent obligés de les aider à trouver un logement, voire de devenir garant lorsque la nouvelle recrue n'est pas française », confirme Robert Clapham, directeur général du groupe Olmix (180 millions d'euros de chiffre d'affaires, 940 salariés). À Dinard, le groupe Kersia (500 millions de chiffres d'affaires, 2.200 salariés dont 436 en France) met entre 14 et 19 mois pour recruter un contrôleur de gestion.

« S'ajoute à cela la nécessité de trouver un travail pour le ou la conjoint(e) de manière à offrir un emploi stable à la famille » renchérit Sébastien Bossard, son président. « Ensuite il faut la loger à Dinard ou Saint-Malo, dans un bassin peu industriel mais très touristique. La notion de bourse au travail devient un élément clé. »

Pour le Club ETI Bretagne, la question de l'investissement dans la recherche voire dans la construction de logements est largement associée à celle de la mobilité et des trajets domicile-travail. « Mes collaborateurs sont obligés de faire 30 à 40 km pour venir travailler. C'est un vrai problème » ajoute Sébastien Bossard.

Pour rapprocher ses salariés, notamment saisonniers, de leur lieu de travail, faute de transport en commun aux alentours de Quiberon, la belle-iloise s'est résolue à mettre en place des navettes, à ses frais.

Labo d'idées communes et système D

« Ça marche ! » raconte la présidente de la conserverie et présidente du Club ETI Bretagne, Caroline Hilliet-Le Branchu. « C'est l'effet de levier le plus important pour attirer du monde ! En 2022, il me manquait 100 personnes. Nous avons été en rupture de produits faute de personnel. En 2023, tout est rentré dans l'ordre. Mais c'est le règne de la débrouille. Sur toutes ces questions, il faut discuter avec les puissances publiques pour trouver des solutions pérennes. »

Sur l'accès au logement, l'exemple concarnois nourrira sans doute les réflexions des prochaines Assises du logement organisées conjointement par le préfet de la région Bretagne et le président du Conseil régional, le 2 février à Quimper.

De façon générale, le Club ETI Bretagne se pose d'abord comme un laboratoire d'idées et de preuves de concept au service du développement du territoire. D'autres enjeux majeurs tels que la RSE, la décarbonation et l'investissement dans les transitions (énergétique, écologique, sociale, numérique), figurent sur sa feuille de route 2024.  « Individuellement, nos entreprises se portent bien, même celles issues du bâtiment. En revanche, si l'on se tourne vers l'écosystème, on sent plus de fébrilité », analyse Hugues Meili, le président de Niji à Rennes.

Une opinion qui contraste à peine avec celle des chefs d'entreprises interrogés par la CCI Bretagne. Selon une enquête de conjoncture publiée mi-janvier, ces derniers se déclarent dans l'expectative, voire plus pessimistes, notamment pour les secteurs du commerce et de la construction. Leur niveau de confiance, en baisse à 5,4 sur 10, retrouve celui d'il y a un an, au moment du pic d'inflation. Seuls 11,1% envisagent une hausse d'activité sur les six prochains mois.

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