Industrie pharmaceutique : comment Bernie Sanders a poussé Clinton à durcir le ton

Multipliant les attaques contre les hausses des prix des médicaments ces dernières semaines, Bernie Sanders inquiète les laboratoires pharmaceutiques. Et son engagement a poussé Hillary Clinton à mener une campagne plus agressive que prévue contre certaines pratiques des producteurs de médicaments.
Jean-Yves Paillé
Bernie Sanders se plait à évoquer régulièrement la "cupidité" de l'industrie, et clouer au pilori les laboratoires comme GSK, estimant que "le modèle économique des entreprises du médicament est basé la fraude".

Malgré sa défaite face à Hillary Clinton à l'investiture démocrate, Bernie Sanders n'a pas disparu des radars. Ces dernières semaines, il a multiplié les attaques et les demandes d'enquête contre l'industrie pharmaceutique, des actions régulièrement relayées par la presse anglo-saxonne. En fin de semaine dernière, le sénateur du Vermont a addressé une lettre au Département de la justice et la Commission fédérale du commerce des Etats-Unis leur demandant d'ouvrir enquête sur le prix des insulines. Bernie Sanders estime qu'il y a pu y avoir une entente entre Eli Lilly, Novo Nordisk et Sanofi ayant entraîné une hausse des prix, parfois à deux chiffres. D'après le Washington Post, les prix des insulines n'ont quasiment pas cessé d'augmenter sur les 15 dernières années.

Le 20 octobre, le septuagénaire s'est associé au démocrate Elijah Cummings pour envoyer une lettre à Ariad Pharmaceuticals, exigeant du laboratoire une justification sur l'augmentation (la quatrième en 2016) du prix de l'Iclusig, un traitement contre la leucémie myéloïde. Le 14 octobre, le sénateur s'était déjà attaqué au laboratoire dans un tweet évoquant l'ampleur de la hausse de prix du laboratoire. Ce dernier avait plongé de 15% à la clôture, en Bourse et perdu autour de 387 millions de dollars. Le laboratoire a promis de répondre au démocrate.

Par ailleurs, Bernie Sanders soutient activement un vote ouvert aux Californiens, qui se tiendra le 8 novembre, sur la régulation des hausses des prix des médicaments les plus onéreux. Un scrutin qui inquiète particulièrement le principal lobby pharmaceutique américain.

"Cupidité", "prix inconscients"

Sur Twitter, la communication agressive sur les prix "excessifs" des médicaments est la  marotte de Bernie Sanders. Il se plait à évoquer régulièrement la "cupidité" de l'industrie, et clouer au pilori les laboratoires comme GSK, estimant que "le modèle économique des entreprises du médicament est basé sur la fraude". Ou encore, il a exigé de Pfizer "la fin de l'ère des prix inconscients".

Les nombreuses attaques du sénateur ne lui ont toutefois pas empêché de recevoir directement ou indirectement 307.471 de dollars de donations durant sa campagne des industries pharmaceutiques, soit quasiment deux fois plus que Donald Trump. A noter que contrairement à Hillary Clinton ou le candidat républicain, les trois-quarts de ses donations ne dépassent pas les 200 dollars. Par ailleurs, Bernie Sanders avait fait parler de lui en refusant 2.700 dollars de donation offerts par Martin Shkreli, alors patron de Turing Pharmaceuticals. Ce dernier venait de gagner le surnom "d'homme le plus détesté des Etats-Unis" après avoir augmenté de 5.000% le Daraprim, un médicament utilisé par des personnes atteintes de VIH.

A l'origine de la ligne agressive de Clinton sur les labos pharmaceutiques

Outre l'inquiétude qu'il suscite auprès de l'industrie pharmaceutique, le sénateur a influencé les prises de positions agressives de Hillary Clinton sur ces questions-là. C'est ce que révèle un document dévoilé par Wikileaks. Voyant Bernie Sanders occuper le terrain de la dénonciation des prix pratiqués par les laboratoires pharmaceutiques, un conseiller de Hillary Clinton a poussé celle-ci à "élaborer un plan solide et agressif pour s'attaquer à cette industrie". Sinon, ce dernier aurait "pris de l'avance", estime le conseil dans un courriel. Quelques semaines plus tard, la candidate démocrate publiait un tweet annonçant un plan contre les prix excessifs de l'industrie pharmaceutique.

Si cette dernière est élue, pas sûr qu'elle tente d'appliquer son plan pour limiter la hausse des prix des médicaments comme pourrait le faire Bernie Sanders. Hillary Clinton entretient des relations ambivalentes avec l'industrie pharmaceutique. Cela n'empêche pas le sénateur d'accompagner la candidate démocrate lors de ses meetings pour tenter de recueillir les voix des jeunes électeurs, notamment.

Jean-Yves Paillé

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Commentaires 3
à écrit le 08/11/2016 à 12:06
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Adressé, pas addressé...

à écrit le 07/11/2016 à 18:59
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Article iconoclaste par les temps qui cours. Bernie Sanders ne disparaitra peut être de suite après les élections, car H.Clinton sera élue avec un taux d'impopularité record (aux USA pas en France) tout juste dépassé par D.Trump. Il lui faudra donc g...

à écrit le 07/11/2016 à 18:38
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Merci pour cet article. Mais hélas c'est seulement la campagne pour les présidentielles, ce qui est dit, surtout contre des riches, à très peu de chances d'être fait, on sait comment cela fonctionne depuis des dizaines d'années...

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