Après un mois de cachotteries, Novatek a reconnu avoir passé un contrat avec l'allemand EnBW concernant la livraison de deux milliards de m3 de gaz naturel/ an sur toute une décennie, soit 2,5% de la consommation annuelle actuelle de l'Allemagne. Le directeur financier de Novatek Mark Jetway a évoqué le contrat lors d'une conférence téléphonique mardi, et a précisé que les livraisons commencent le premier octobre prochain.

Même s'il s'agit d'un accord sans précédent, ce n'est qu'une brèche dans le monopole de Gazprom. Car le gaz vendu par Novatek ne proviendra pas des 47,5 milliards de m3 de gaz que lGazprom produit chaque année. Novatek, qui affirme ne pas avoir besoin de l'autorisation de Gazprom, n'intervient qu'en tant que négociant. Et s'est refusé à faire davantage de commentaires.

Gazprom a le monopole sur les gazoducs

EnBW avait indiqué la somme du contrat (600 millions d'euros par an) dès le 12 juillet dernier, mais sans révéler l'identité du négociant. Le groupe allemand, qui commercialise environ 5,4 milliards de m3 par an, ne travaille pas en direct avec Gazprom. Selon Alfa Bank, le tarif du contrat se situe 18% au-dessus du prix actuel du marché au comptant [spot]. Une solide marge qui permet en principe à Novatek d'acheter, par exemple, du gaz norvégien. Le gaz vendu via des contrats à long terme par Gazprom à ses clients européens travers son monopole sur les gazoducs, coûte entre 25 et 30% plus cher que le prix du marché comptant.

Novatek, moins cher que Gazprom

En proposant un tarif intermédiaire, Novatek espère se constituer une base de clients en Europe. Le groupe gazier a été créé en 2004. Son actionnaire principal est Leonid Mikhelson avec 24,8%. Viennent ensuite Guennadi Timchenko (23,13%) et le groupe français Total, qui détient 15,2% de Novatek et a reçu l'autorisation de monter jusqu'à 19,4% du capital d'ici deux ans. Gazprom possède une part de 9,99% dans Novatek, qui est coté sur la bourse de Moscou.

Depuis 2006, le monopole de Gazprom est inscrit dans la loi russe. Mais les observateurs et la presse russe rappellent avec insistance que Guennadi Timchenko est un proche ami de Vladimir Poutine. Les deux intéressés s'en défendent, admettant juste s'être déjà rencontrés. L'envergure des affaires de Guennadi Timchenko s'est considérablement accrue au cours des cinq dernières années. Un tiers du pétrole russe exporté hors oléoducs passe à travers Gunvor, son négociant pétrolier, générant des gros profits. L'homme d'affaires avait en juin dernier admis que Novatek comptait pouvoir livrer du gaz à l'étranger dans un proche avenir. Peut-on ainsi défier le géant d'Etat Gazprom sans disposer de solides appuis politiques ?