En rachetant Coved, Paprec équilibre ses activités

Jean-Luc Petithuguenin, fondateur du champion français du recyclage, rachète une filiale de la SAUR plus spécialisée dans la collecte de déchets. Une façon de protéger ses activités de la volatilité des matières premières pour préparer tranquillement son entrée en Bourse d'ici deux à quatre ans.
Dominique Pialot
Paprec est leader du recyclage en France

« Si le baril de pétrole était resté à 100 dollars, nous aurions dépassé le milliard de chiffre d'affaires », regrette Jean-Luc Petithuguenin, fondateur de Paprec.

Qu'à cela ne tienne ! Pour s'affranchir des fluctuations des cours des matières premières dont dépend aujourd'hui plus de la moitié de son chiffre d'affaires, le PDG du numéro trois des déchets en France (derrière Veolia et Suez) vient de s'offrir Coved. Alors que Paprec réalise les trois quarts de son activité avec les industriels (750 millions d'euros sur un chiffre d'affaires total de 950 millions d'euros),  la filiale de la SAUR (320 millions d'euros de chiffre d'affaires et un peu plus de 3.000 salariés) est surtout spécialisée dans la collecte de déchets ménagers auprès des collectivités.

Or, rappelle Jean-Luc Petithuguenin, « les tarifs de collecte des déchets en Vendée dépendent assez peu des variations du baril de pétrole ».

Cette acquisition (qui attend encore le feu vert des autorités de la concurrence), obtenue de haute lutte après quatre mois de négociations face à plusieurs fonds d'investissement et à des industriels, dont le leader allemand du secteur Remondis, pour un prix non dévoilé situé entre 220 et 280 millions d'euros, doit permettre à Paprec de « mettre du plomb dans la quille ».

Aucune fermeture de site envisagée

Au printemps prochain, lorsque l'opération sera définitivement bouclée, le groupe aura vu ses effectifs passer de 4.500 à près de 8.000 salariés, et son chiffre d'affaires de 950 millions près de 1,3 milliard d'euros. Surtout, elle lui permettra de rééquilibrer ses activités entre recyclage et collecte. Le rapprochement ne devrait entraîner ni fermeture de sites ni départs de salariés. Jean-Luc Petithuguenin rappelle à cette occasion que tous les sites récupérés à l'occasion des nombreuses acquisitions des dernières années sont toujours en activité aujourd'hui, y compris dans des cas de doublon géographique, en raison du « rayon d'action de proximité » qui justifie un maillage fin du territoire évitant des coûts de transports onéreux.

Le recyclage dépendant des taxes appliquées à l'enfouissement

Depuis la création du groupe il y a 25 ans, cet ancien de la Générale des Eaux mise sur le recyclage, sur lequel il devance aujourd'hui les géants Veolia et Suez. Les matières premières secondaires qu'il tire du traitement des matériaux récupérés auprès de ses 25.000 clients industriels sont vendues en France, en Europe, mais aussi en Asie, pour un montant total de 500 millions d'euros. Mais la vitesse de transition (pour passer de la mise en décharge et l'incinération au recyclage) est largement définie par les taxes pénalisant l'enfouissement. Certains pays cités en exemple par le fondateur de Paprec (Allemagne, Angleterre, Pays-Bas), l'ont fixée assez haut pour stimuler le recyclage. En France, étonnamment, le gouvernement de gauche, auquel ont même participé des écologistes, n'a pas accéléré le mouvement de transition autant qu'on pouvait s'y attendre.

« Si cela avait été le cas, nous aurions racheté plus d'entreprises de recyclage ces dernières années », affirme Jean-Luc Petithuguenin.

L'entrée en Bourse en ligne de mire

Mais, si le mouvement s'accélérait à nouveau (le programme de François Fillon prévoirait une taxe de 100 par tonne de déchets enfouis), Paprec se fait fort de transformer Coved, entreprise de collecte de déchets avant tout, en entreprise de recyclage. Cela pourrait prendre « de 5 à 15 ans » et coûter « entre 200 et 300 millions d'euros. » Car le recyclage est une industrie extrêmement capitalistique. Paprec investit ainsi 200 000 euros par emploi créé. « On est en train de construire en France une filière créatrice d'emplois qualifiés et qui constitue une brique essentielle de l'économie circulaire », se réjouit Jean-Luc Petithuguenin, qui affiche désormais d'autres ambitions. Si l'entreprise qu'il a fondée il y a 25 ans est restée majoritairement détenue par la famille et si son fils Sébastien devrait prendre la relève tôt ou tard, son PDG est bien décidé à l'introduire en Bourse dans les deux à quatre prochaines années.

Dominique Pialot

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