Dominique Schelcher, le patron de Système U, ne cache pas son inquiétude. Plus encore qu'à l'accoutumée, le dirigeant du 4eme groupe de distribution français passe à la loupe les dépenses des Français dans ses magasins. « Et cela ne laisse rien entrevoir de bon, assure-t-il. Les gens achètent moins de choses... Nous enregistrons dans nos supermarchés 5 % de baisse en volume en septembre et octobre.... et cela va aller en s'aggravant car le coût de la vie augmente... ». Même son de cloche du côté de Michel-Edouard Leclerc, qui évoque « un tsunami » à venir en matière de prix dans l'alimentation.
Des volumes d'achats en baisse
Surtout, les ménages font des arbitrages. Il y a moins de diversité dans les achats. Les clients vont à l'essentiel.
Dans les rayons des supermarchés, des produits s'arrachent quand d'autres ne trouvent plus leur public. Ainsi, les marques distributeurs ou premier prix se vendent particulièrement bien en ce moment. D'ailleurs la plupart des enseignes, Carrefour notamment, accentuent leur développement, et pour leur faire de la place, elles réduisent leurs références dans les rayons.
Dans les hypermarchés, les stands de traiteurs, à la découpe, ou de produits préparés voient leurs files de clients se réduire comme peau de chagrin...Sans attendre, les enseignes ont tendance à les réduire, voire à les stopper.
Autre signe de la difficulté des Français à se nourrir : les articles en promotion partent encore plus vite qu'auparavant. Et Dominique Schelcher, de noter : « Jamais on n'avait vu autant de produits laissés à la caisse, au dernier moment. Les consommateurs se rendent comptent que finalement ils ne peuvent pas les payer ».
Le patron de supermarché remarque aussi que les achats sont de plus en plus fractionnés. « Parce que les gens ajustent au mieux leurs dépenses... ils réduisent les quantités ». Les actifs qui ont des cartes ou des tickets restaurants via leur entreprise paient plus souvent qu'avant leur panier de courses par ce biais.
Des produits considérés désormais comme inabordables
Les fruits et légumes frais font partie des produits délaissés car trop chers. Idem pour la viande. Pour mettre des protéines animales dans leurs assiettes, les Français se tournent vers les conserves de sardines ou encore les œufs. Mais ces derniers ont aussi beaucoup augmenté avec la grippe aviaire qui a conduit à tuer des élevages entiers. « C'est un des articles a le plus augmenté dans nos rayons », explique encore le dirigeant de Système U.
Enfin, tous les achats considérés comme superflus ou « plaisir » sont à la peine. Les ménages réfléchissent à deux fois avant de se laisser tenter, ou bien ils se tournent vers des portions plus petites.
Ainsi, le groupe Bel, qui commercialise les fromages Babybel, Kiri, ou Boursin, va-t-il revoir la taille de ses conditionnements. En effet, les « apéricubes » vendus traditionnellement par 48 sont moins prisés des consommateurs, et l'entreprise va les vendre, dès le début de l'an prochain, par boîte de 24.
Autre exemple : le chocolat, dont le prix s'est envolé ces derniers mois, voit ses ventes reculer de 21 % par rapport à la même période de l'an dernier, selon le cabinet IRI. Idem pour le foie gras en baisse de plus de 23%. De quoi inquiéter les commerçants. « Le poisson est déjà devenu un produit de luxe, dont les ménages les plus modestes se détournent, reconnaît un acteur de la grande distribution. Pour les fêtes, il risque d'y avoir un peu moins de crustacés sur les tables... voir pas du tout. »
Essayer de « sauver » les fêtes de fin d'année
Selon une étude CSA Research pour Cofidis, près de 8 ménages sur 10 se disent inquiets par les prix de l'alimentaire et 7 sur 10 s'attendent à devoir se priver. Pour autant, ils vont chercher coûte que coûte à maintenir la magie de Noël.
Ils s'apprêtent, par exemple, à consacrer un budget plus important - du fait de l'inflation- pour conserver le même nombre de cadeaux, pour les enfants notamment. En revanche, ils limiteront leurs dépenses de vêtements, ou de décoration.
Sujets les + commentés