Ukraine : près de Kiev, les dernières heures de l'entrepôt du groupe français FM Logistic

Le logisticien FM Logistic s'apprête à fermer son entrepôt en banlieue de Kiev. Sur 900 salariés, 25 sont restés présents dans cette plate-forme de distribution de 61.000 mètres carrés. Mais l'activité économique réduite à néant, et surtout les risques de la guerre, rendent sa fermeture certaine dans les prochains jours ou dans les prochaines heures. FM Logistic ne quittera pas la Russie, où il est implanté depuis près de trente ans.
L'entrepôt à Dudarkiv, en banlieue de Kiev, a fait l'objet d'une extension en 2021.
L'entrepôt à Dudarkiv, en banlieue de Kiev, a fait l'objet d'une extension en 2021. (Crédits : DR)

25 salariés de FM Logistic étaient encore présents vendredi 11 mars dans l'entrepôt de Dudarkiv dans la banlieue à l'Est de Kiev, en Ukraine. Quinze jours après de déclenchement de la guerre par la Russie, ce spécialiste français de la logistique et de la distribution s'apprête à fermer cette plate-forme de 61.000 mètres carrés. FM Logistic était implanté en Ukraine depuis 1996. Ce site logistique ultra-moderne, qui a fait l'objet d'une extension capacitaire en 2021, abrite encore 80.000 palettes traitées pour le compte des clients de FM Logistic : des produits d'hygiène et de beauté, des biens de grande consommation. Aux dernières nouvelles, dans la matinée du 11 mars, les chars russes se trouvaient à 30 kilomètres.

Dans les derniers camions chargés avant la fermeture, les salariés ont expédié des produits de première nécessité, d'hygiène, des cathéters, un peu de consommables médicaux dans le pays. FM Logistic assurait localement la distribution d'Yves Rocher et d'une douzaine d'autres clients.

Marché en expansion

"Le marché local était en pleine expansion. Nous nous apprêtions même à construire une nouvelle extension", rapporte Claude Faure, président d'honneur de FM Logistic. En octobre 2021, Sébastien Lardellier, directeur général de la filiale ukrainienne, avait annoncé un projet d'investissement évalué entre 25 millions et 30 millions de dollars à Dudarkiv. Le chantier de 20.000 mètres carrés était en attente de permis de construire. La guerre a tout stoppé.

La quasi-totalité des 900 salariés sont partis dès le début du mois de mars. "Une cellule de crise est établie pour maintenir la communication avec ceux qui ont fui l'Ukraine, via une application de messagerie. Des salariées ont pu gagner la Pologne ou la Roumanie, parfois avec des enfants. Les hommes sont restés dans le pays", résume Cyrille Guibot, chargé de la communication dans l'entreprise. "Les salaires du mois de mars ont été payés en avance à tous nos salariés en Ukraine. Nous nous préparons à fermer l'entrepôt à très brève échéance", annonce Claude Faure. "Le réseau de FM Logistic peut offrir des points d'établissement en Pologne, et des emplois à certains salariés partis de Kiev", prévient Cyrille Guibot. "Face à de tels événements, notre préoccupation, c'est évidemment l'humain. La direction des ressources humaines joue un rôle essentiel, la finance est secondaire. Il y aura malheureusement des morts parmi nos 900 salariés", prévoit Claude Faure.

Le poids de la Russie

FM Logistic dispose en Europe centrale (Pologne, Tchéquie, Slovaquie et Hongrie) de 17 entrepôts et 30 plates-formes de distribution. L'entreprise compte 5 000 employés dans ces quatre pays voisins ou proches de l'Ukraine, où elle exploite une flotte de 2 500 véhicules.

Fondée en 1967 à Phalsbourg (Moselle), cette entreprise familiale a connu une expansion rapide, présentée comme avant-gardiste, dès le début des années 1990 en Europe centrale et en Europe de l'Est. L'implantation en Russie (8.000 salariés) figurait parmi ses points forts, avant la guerre. Avec 890.000 mètres carrés d'entreposage, elle y figure parmi les leaders dans sa spécialité. Dans les années 1990, FM Logistic a pris le pli d'accompagner ses clients français dans leur expansion géographique à l'Est. "L'Europe de l'Est communiste est tombée en 1989. Dans la logistique, tout était à construire", se souvenait Claude Faure lors d'un précédent entretien avec La Tribune, en juillet 2021. "Mon neveu est parti lancer nos activités Russie. Un autre collaborateur s'est occupé de la Pologne. On a même embauché un ancien colonel du KGB pour assurer la sécurité", s'amusait alors Claude Faure. "Cela ne me fait plus rire", reconnaît-il aujourd'hui.

En 2020, la Russie pesait pour 19 % du chiffre d'affaires global (1,38 milliard d'euros) de FM Logistic. L'Ukraine représentait 2 % de son activité. Le groupe (28.000 salariés), dont les capitaux sont restés familiaux, est présent dans 14 pays. "Nous n'allons pas quitter la Russie. L'activité dans ce pays est organisée de façon autonome. Nous avons compris depuis quelque temps que la Russie devrait vivre en autarcie, fonctionner avec du rouble. Nous étions prêts. Quel sera le niveau de l'activité dans ce pays, désormais fermé au commerce international ? Personne ne le sait", reconnaît Claude Faure.

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