Contribuer à l'autonomie énergétique des villes, là où produire de l'électricité est le plus compliqué. Ces dernières années, beaucoup d'entreprises se sont attaquées à ce défi avec plus ou moins de succès. La startup francilienne Wind my Roof fondée en 2018 par deux ingénieurs des Ponts tente sa chance à son tour. Son pari ? Exploiter les vents qui frappent les immeubles et remontent les façades en accélérant au moyen d'un concept singulier né à la faveur de recherches sur la mécanique des fluides. Contrairement aux éoliennes « des champs », les éoliennes « des villes » conçues par Antoine Brichot et Yanis Maacha ne comportent ni mât, ni pales.
Dénommés Windbox, leurs modules hybrides se fixent sur l'arête des toitures plates (l'acrotère dans le jargon). Surmontés de panneaux solaires, ils se présentent sous la forme de caissons cubiques de 6,5 m3 qui renferment des petites turbines mues par le vent. Chaque module pouvant produire 2,1 MWh par an. « En combinant les deux sources, on s'assure d'une production électrique toute l'année », assurent les concepteurs. Après avoir testé plusieurs prototypes à la Défense en partenariat avec Vinci Energies, l'entreprise vient d'installer les premières versions commerciales de ses Windbox sur un bâtiment appartenant à l'office public HLM de la Ville de Rouen.
« La technologie nous a séduit parce qu'elle ne fait pas de bruit, qu'elle est facile à déployer et moins impactante que les éoliennes classiques qui peuvent endommager la structure des bâtiments anciens », explique Sarah Gauchier, porte-parole de Rouen Habitat.
« Bon pour l'environnement et le pouvoir d'achat »
Usinés par Simra (une filiale de Segula Technologies) à Saint-Nazaire, huit caissons -de 350 kilos chacun- ont été hissés avec une grue et arrimés sur des plots en béton au sommet d'un immeuble de dix étages situé dans un quartier populaire. Leur localisation a été choisie au terme d'une analyse approfondie, souligne Juliette Fournand, responsable du développement de Wind my Roof. « Le bâtiment est orienté à l'ouest. Il profite d'un bon gisement de vent et dépasse la hauteur minimale (8 mètres ndlr) en deça de laquelle nous n'allons pas. Ce qui devrait permettre un fonctionnement optimal ».
Hasard météorologique, les modules conçus pour résister à des vents de 180 km/h, ont essuyé leur première grosse tempête, il y a quelques jours. Sans dégât. « Cela nous a rassuré », confie-t-on chez Rouen Habitat.
La startup table sur une production de 14 MWh (mégawatt) par an pendant 20 ans. De quoi alléger les factures des 84 logements d'environ 50 euros annuellement. « La somme peut paraître dérisoire mais elle n'est pas négligeable compte tenu de la typologie de nos locataires », commente Sarah Gauchier. « C'est bon pour l'environnement et le pouvoir d'achat des ménages dans le contexte actuel de flambée des prix de l'énergie », insiste de son côté Nicolas Mayer Rossignol, président de la Métropole et de l'Office public. Rouen Habitat n'exclut d'ailleurs pas d'étendre le dispositif « sur des immeubles locatifs déjà identifiés » si ce premier projet pilote d'autoconsommation se révèle concluant.
En attendant, Wind my Roof qui est adoubée par la fondation Solar Impulse (fondée par Bertrand Piccard) et soutenue par l'Ademe planche déjà sur la conception de modules plus puissants à destination d'immeubles d'habitation mais aussi de bâtiments logistique et tertiaire. « L'objectif que nous nous sommes fixés est de doubler la production mais les recherches ne font que commencer », indique Juliette Fournand. On peut parier que les acteurs de la construction suivront avec intérêt les progrès de cette jeune entreprise qui profite de vents favorables.
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