Zéro artificialisation nette : en Bretagne, il reste 9.000 hectares à répartir d’ici à 2031

Comment la Bretagne compte-t-elle territorialiser l’objectif ZAN pour une plus grande sobriété foncière ? Et pour cause, il lui reste environ 9.000 hectares de terres artificialisables pour implanter des logements et des entreprises. 1.000 hectares seront attribués par grand bassin de vie, métropoles incluses. Les mairies arbitreront sur la destination de ces terrains. Une bataille du foncier dans laquelle la Région cherche à « inventer des solutions ».
Mesure phare de la loi « Climat et résilience » de 2021, la proposition de loi ZAN vise à réduire de 50% d'ici à 2031, puis de 50% de nouveau entre 2031 et 2050 la consommation des terres agricoles et d'espaces naturels.
Mesure phare de la loi « Climat et résilience » de 2021, la proposition de loi ZAN vise à réduire de 50% d'ici à 2031, puis de 50% de nouveau entre 2031 et 2050 la consommation des terres agricoles et d'espaces naturels. (Crédits : Eloi)

Comment conjuguer sobriété foncière, préservation des terres agricoles et des espaces naturels et développement économique ? Comment réindustrialiser sans se heurter à l'objectif Zéro artificialisation nette ? Autant de questions qui se posent à la Bretagne.

Au moment où le projet d'installation d'une usine Bridor, à Liffré près de Rennes, a capoté en raison des multiples recours en justice, donnant au Medef Bretagne l'occasion de réitérer sa demande de sortir l'industrie de l'objectif, « la zizanie du ZAN », comme certains la nomment, s'est invitée les 29 et 30 juin lors de la dernière session du Conseil régional de Bretagne.

Lire aussiLes réserves de foncier aménagé, l'atout des Vosges pour contrer le ZAN

Mesure phare de la loi « Climat et résilience » de 2021, la proposition de loi ZAN vise à réduire de 50% d'ici à 2031, puis de 50% de nouveau entre 2031 et 2050 la consommation des terres agricoles et d'espaces naturels. Votée le 27 juin à l'Assemblée national, elle laisse encore en débat le sort des projets « d'intérêt national » comme les lignes LGV ou les complexes industriels.

La semaine dernière, la répartition entre les 1.200 communes bretonnes des 9.000 hectares (dont 1.138 hectares réservés aux projets d'envergure) à utiliser d'ici à 2031 a été adoptée à une large majorité.

992 hectares pour le Pays de Rennes

Le Conseil régional a décidé collectivement d'attribuer 1.000 hectares par grand bassin de vie, métropoles incluses. Aux mairies d'arbitrer ensuite la destination de ces terrains, selon une répartition juste entre logement et emplois.

Les débats à l'assemblée régionale ont toutefois beaucoup cherché à opposer villes et monde rural. Sur les 7.862 hectares d'enveloppe territorialisée, 992 hectares, soit 12% du total, iront au seul grand Pays de Rennes (qui accueillera 100.000 habitants supplémentaires en 2040) ont ainsi regretté les écologistes.

Ce à quoi Laurence Fortin, vice-présidente en charge des territoires, de l'économie et de l'habitat, a répondu que cela conduisait aussi à mettre « 980 hectares dans le grand Centre Bretagne, pour accueillir moins de 5.000 habitants », défendant au passage un « arbitrage d'équilibre ».

« Cela montre des vrais choix politiques, le ZAN nous oblige à modifier notre manière d'aménager le territoire » a souligné l'élue régionale. En amont de cette session, elle est allée, accompagnée par Loïg Chesnais-Girard, le président de région, à la rencontre des élus locaux bretons pour présenter leur démarche et prendre le temps de la concertation.

Lire aussiComment l'Assemblée entend concilier réindustrialisation et « zéro artificialisation nette » des sols (ZAN)

En faire un levier de développement

Le ZAN élaboré par la Bretagne ne sera pas mis en oeuvre avant 2026 mais il effraie bon nombre de collectivités, d'élus des communes et des intercommunalités, qui demain seront confrontés à une baisse des attributions des permis de construire. « Protection de l'environnement, souveraineté alimentaire, conséquences sur le logement et le modèle de développement, le ZAN porte des enjeux cruciaux pour la Bretagne » admet Loïg Chesnais-Girard. « Pour protéger nos terres agricoles, notre agriculture qui contribue largement à la souveraineté alimentaire française et européenne et concilier attractivité et sobriété foncière, nous souhaitons appliquer notre propre méthode » ajoute-t-il.

La majorité régionale souhaite transformer la loi en un levier du développement et d'emplois. L'objectif a déjà été intégré dans le schéma régional d'aménagement et de développement durable du territoire (SRADDET) et, depuis plusieurs mois, la Région travaille avec les 26 Schémas de cohérence territoriale (Scot) de Bretagne, pour parvenir à un équilibre territorial.

La loi ZAN va s'imposer aussi dès 2027 aux PLU/PLUI et les communes se verront assigner une surface limitée ouverte à l'artificialisation selon différents critères : dynamiques démographiques et économiques attendues, efforts déjà consentis, typologie du territoire...

Plus fort taux national d'artificialisation

Pour tenir les deux bouts de la chaîne, le Conseil régional rappelle les chiffres : avec plus de 1.000 m2 de terres artificialisées par habitant, la Bretagne est la région de France qui consomme le plus de terres agricoles. Entre 2011 et 2021, elle a consommé 18.000 hectares et cette consommation progresse plus rapidement que la croissance démographique sur certains territoires.

Le Conseil régional s'efforce donc d'agir sur une meilleure répartition des hectares entre des territoires en hyper croissance (Rennes, Lorient-Vannes, Brest) et le centre Bretagne (pays de Fougères, Concarneau).

« C'est très compliqué » reconnaît le président de région. « Soit on voit ce le plan comme un horrible objectif commun et on va tous souffrir, soit on le prend avec optimisme et on va inventer des solutions » a déclaré Loïg Chesnais-Girard lors de l'étape rennaise le 23 juin dernier de la tournée Transformons la France, organisée par La Tribune. « Il y a trois millions de poulaillers abandonnés en Bretagne, il y a aussi des friches dans nos industries et dans nos villes. Il y a plein de choses à bâtir » a-t-il ajouté.

Bâtir des logements

Dossier sensible, le ZAN est, entre autres, corrélé à la question du logement, marché très tendu dans certaines zones (métropole, littoral) et gros consommateur de foncier.

À Rennes, ville archipel constituée de 55% de surface agricole utile, 78% du territoire de la métropole est classé en espace agricole ou naturel. Or, le nouveau PLH 2023-2028 métropolitain vise à produire 5.000 logements par an (4.000 dans le PLH précédent). Pour construire sans bétonner, les 43 communes vont devoir s'accorder sur qui pourra bâtir. Nathalie Appéré, la maire de Rennes et présidente de Rennes Métropole table une artificialisation chaque année de 50 hectares pour le logement et 18,5 hectares pour les équipements et les activités.

L'équation ne sera pas qu'économique : reconstruire la ville, c'est en même temps la densifier. Or de Brest à Rennes en passant par Saint-Malo, les habitants réclament plus transparence sur les projets d'aménagement urbain.

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.