Les réserves de foncier aménagé, l’atout des Vosges pour contrer le ZAN

L'objectif de zéro artificialisation nette (ZAN) peut brider le développement économique des territoires urbains. Mais dans les Vosges, département rural et forestier, les collectivités ont anticipé la pénurie foncière et la reprise. Les zones d'activités restées vides pendant quinze ans doivent désormais apporter du souffle à l'industrie et à l'emploi.
Aménagée par le Conseil départemental des Vosges, la zone d'activités de Remomeix est restée vide depuis quinze ans.
Aménagée par le Conseil départemental des Vosges, la zone d'activités de Remomeix est restée vide depuis quinze ans. (Crédits : Google Maps)

Christian Poncelet, ancien président du Sénat et ancien président du Conseil départemental des Vosges, avait-il vu juste ? En aménageant au début des années 2000 quatre grandes zones d'activités économiques dans son département, sans garantie quant à leur future occupation, l'élu local décédé en 2020 a suscité l'espoir et la déception. À Remomeix (Saint-Dié), à Châtenois, à Damblain et à Mirecourt, quatre « méga-zones départementales » de plusieurs dizaines d'hectares ont été acquises et aménagées sur fonds publics sous les mandats de Christian Poncelet. Elles sont restées vides. « J'ai mes structures, elles sont là. La crise ne sera pas éternelle », avait-il pris l'habitude de répondre à ses contempteurs. Les successeurs de Christian Poncelet entendent désormais les valoriser.

Il était temps ! C'est dans le bassin d'emploi de Saint-Dié, commune de 19.000 habitants au pied des forêts des Hautes-Vosges, que la situation économique est apparue la plus dégradée. Depuis quinze ans, la zone de Remomeix (53 hectares), acquise et aménagée pour 11,5 millions d'euros à l'époque de Christian Poncelet, fait grise mine à la sortie de l'agglomération. 2.500 mètres de voiries ont été aménagées, la signalisation routière et des lampadaires installés. Au début des années 2010, des voleurs ont commencé à démonter les câbles électriques. Les réparations ont été effectuées. À l'exception de quelques entreprises artisanales, la zone départementale de Remomeix est restée vide. La situation apparaissait pourtant avantageuse, tout près du tunnel Maurice Lemaire, pour permettre aux flux économiques de franchir rapidement les Vosges en direction de l'Alsace plus prospère. Elle n'a jamais eu l'effet d'attraction escompté.

Renaissances

« En 2013, nous étions l'un des pires bassins d'emploi de la région avec un taux de chômage de 14,8 %. Aujourd'hui, nous sommes retombés en-dessous de 10 %. Cette amélioration est liée à la croissance des entreprises déjà présentes sur le secteur, notamment dans la construction bois », observe David Valence, député (apparenté Renaissance) de la deuxième circonscription des Vosges et ancien maire de Saint-Dié-des-Vosges (2014-2020).

La filière bois, qui emploie 45.000 personnes dans le Grand-Est, s'est fortement développée dans le massif. « Le dynamisme de la filière bois s'illustre par ses 10.000 emplois à pourvoir, un niveau comparable avec les chiffres de la filière automobile », a calculé Mélanie Collin, chargée d'études prospectives régionales à la Maison de l'Emploi du Grand-Nancy. L'entreprise familiale Weisrock, qui compte 110 salariés à Saulcy-sur-Meurthe, et le constructeur Sertelet à Provenchères ont connu une croissance rapide dans la charpente en lamellé-collé et la conception de maisons en bois. À Etival, la papeterie familiale de Clairefontaine (600 salariés) a recruté 40 personnes en 2022 et investit localement pour muscler sa production dans les gammes qualitatives de fournitures scolaires.

« Les Vosges ont subi une forte désindustrialisation dans les années 1970 et 1980. Aujourd'hui, l'industrie recrute de nouveau, non sans susciter la surprise et l'incrédulité de la population », se réjouit David Valence. Le joaillier alsacien Orest, spécialisé dans la fabrication d'alliances et sous-traitant en bijouterie pour LVMH, s'est implanté à Saint-Dié en 2021. « Orest avait besoin d'espace pour se développer. La main-d'œuvre était plus disponible dans les Vosges qu'en Alsace. L'usine a été construite l'année dernière sur un terrain qui appartenait à la collectivité, à Saint-Dié. Ils seront 250 salariés en fin d'année 2023 », résume David Valence.

L'espoir de la logistique à Damblain

« Les zones urbaines sont arrivées à saturation. Avec le ZAN, nos zones en déshérence sont redevenues attractives pour les aménageurs et les entreprises », espère Franck Perry, vice-président (Divers Droite) du Conseil départemental des Vosges en charge de l'économie. « Le tissu économique autour de Saint-Dié serait favorable à l'implantation en circuit court d'un fabricant de charpentes ou d'une entreprise de la seconde transformation du bois », prédit l'élu.

Mais c'est à Damblain, sur l'ancienne base militaire (300 hectares) aménagée en 2004 pour 24 millions d'euros, que les signaux de la réindustrialisation du département devraient rapidement passer au vert.

« Nous sommes engagés avec un aménageur sous contrat de confidentialité », souffle Franck Perry.

La négociation, discrète, vise à ne pas reproduire l'erreur commise par les élus en 2010 : le logisticien Deret prévoyait d'investir 300 millions d'euros et de créer jusqu'à 1.500 emplois. Il a jeté l'éponge et laissé le département dans l'attente. « Un fiasco mémorable », avait alors jugé la presse régionale.

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