BP se cherche un avenir après l'échec de son projet de partenariat en Russie

L'opposition de TNK-BP, la coentreprise du groupe sur place, a fait capoter le partenariat stratégique envisagé entre BP et le russe Rosneft. Un nouveau coup dur après la marée noire dans le Golfe du Mexique en 2010.
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La Russie ne réussit décidément pas à Bob Dudley, le directeur général de BP. Expulsé du pays en 2008 lors de la féroce lutte de pouvoir pour le contrôle de TNK-BP, la coentreprise du groupe sur place, le premier américain à diriger la major britannique subit un sérieux revers. Son projet stratégique en Russie, censé remettre le groupe sur les rails après les déboires de la marée noire dans le Golfe du Mexique l'an dernier, est torpillé. Conclu en janvier avec le numéro un du pétrole russe, Rosneft, il combinait un vaste accord d'exploration en Arctique et un échange de participation de 16 milliards de dollars entre les deux compagnies. Mais le projet s'est heurté à l'opposition des quatre oligarques actionnaires de TNK-BP, regroupés au sein du consortium AAR. Ils n'ont cessé de rappeler que, conformément à leur pacte d'actionnaires, tous les projets de BP en Russie devaient se faire via leur coentreprise. Pour sauver leur projet, BP et Rosneft ont bien proposé de racheter les 50 % détenus par les oligarques de TNK-BP pour plus de 30 milliards de dollars, mais les négociations n'ont pas abouti. Restait à officialiser l'échec, chose faite mardi matin, au lendemain de la date butoir de la fin des négociations fixé par la cour d'arbitrage. Les différentes parties se sont officiellement engagées à poursuivre leurs discussions, mais Rosneft chercherait déjà d'autres partenaires.

Pour BP, qui cherche à se réinventer et à vendre une nouvelle histoire aux marchés après la marée noire de l'an dernier, le coup est rude. Certes risqué - qui veut du premier pétrolier russe, public, bâti avec les actifs pillés de Ioukos, comme actionnaire de référence ? - cet accord historique ouvrait un vaste et prometteur territoire à son exploration. Il reflétait aussi le sens de l'audace dont BP a fait une marque de fabrique, pour le meilleur ou pour le pire.

Si l'industrie pétrolière fonctionne traditionnellement en partenariat, partageant risques et investissements, celui imaginé par BP et Rosneft dépassait le cadre habituel de ces rapprochements, normalement réalisés sous forme de coentreprise dédiée à de grands projets. Dans ce cas, l'échange de participation entre les deux groupes devait lier leur destin. Et même, selon ses artisans, préfigurer un nouveau type de partenariat entre des États riches en ressources et des majors occidentales technologiquement plus affûtées mais confrontées à des difficultés d'accès à des domaines miniers prometteurs.

Des oligarques tenaces

L'américain Bob Dudley, qui a remplacé le Britannique Tony Hayward, carbonisé par sa mauvaise gestion de l'accident du Golfe du Mexique, apparaît très fragilisé par cet échec, moins d'un an après sa prise de fonction. Ce revers est d'autant plus frappant que le patron de BP savait mieux que quiconque qu'il avait affaire, avec les oligarques de TNK-BP, à des hommes d'affaires particulièrement coriaces. À sa décharge, la démission récente de la présidence de Rosneft, sur injonction du président Medvedev, d'Igor Setchine, le vice-premier ministre russe, a privé le partenariat d'un de ses principaux artisans politiques.

Lors de l'annonce de l'accord, en janvier, à ceux qui s'inquiétaient de voir la compagnie responsable d'une marée noire gigantesque associée à l'exploration d'une zone écologiquement fragile, Vladimir Poutine avait rétorqué qu' « un homme averti en vaut deux ». Vraiment, Bob Dudley ?

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