Ces derniers jours, l'actualité économico-politique nous rappelle les années 1980. On honorera d'abord la mémoire de Larry Hagman alias JR, le "bad guy" de la série télévisée « Dallas ». Le feuilleton, qui connût un succès planétaire, nous aura - je laisse de côté les oedipiennes disputes et réconciliations familiales du clan Ewing - familiarisé avec le marché pétrolier. JR en effet scrutait quotidiennement les cours internationaux du baril dans son journal local pour évaluer si les pompes de ses derricks au Texas devaient s'activer ou pas. Si les prix de l'or noir avait une influence sur son humeur,  ils n'en avaient en revanche aucune sur les rasades de whisky que JR, entrepreneur assailli de soucis, se servait à tout moment de la journée, Stetson vissé sur la tête, maugréant sans cesse contre les funestes entreprises qui lorgnaient ses puits.

Le rachat d'entreprises, c'est précisément pour cela que le britannico-indien Mittal est désormais entreprise non grata en France. La premier sidérurgiste mondial risque en effet l'expulsion du territoire et voir ses actifs, rachetés à Arcelor, nationalisés. « Nous ne voulons plus de Mittal en France parce qu'ils n'ont pas respecté la France », a tranché lundi le bouillonnant ministre du Redressement productif, Arnaud Montebourg.

On avait jusqu'ici plutôt l'habitude d'entendre ce genre de déclarations au Vénézuela ou en Russie. On passera sur le fait que Mittal pourrait faire appel au droit international pour se défendre, et que Bruxelles pourrait épingler Paris. On rappellera en revanche, que le marché de l'acier est désormais globalisé, que près des deux tiers sont produits en Asie. Que la concurrence y est terrible et que le marché est en surcapacité. Il est loin le temps où la sidérurgie était une fierté nationale. D'ailleurs la Chine, premier producteur mondial, a passé les dix dernières années à fermer, concentrer et moderniser son industrie.

Mittal a une vision mondiale du marché, Montebourg, le chantre de la démondialisation, une vision hexagonale. Mittal pour maintenir les prix internationaux doit fermer des capacités, les installations françaises ne sont plus compétitives. Dès lors, nationaliser reviendrait pour le gouvernement à se colleter avec cette compétition internationale. Le piquant de l'affaire est que les millions d'euros d'argent public investis par plusieurs pays européens dans la modernisation d'Arcelor durant vingt ans par l'Europe - on se souviendra que c'était un certain Laurent Fabius qui avait lancé le processus dans les années 1980 -  n'auront par réussi à empêcher l'OPA de Mittal.

Ce n'est pas une OPA mais un « coup de force » qu'a dénoncé François Fillon, après l'annonce, lundi soir, par la commission des recours de l'UMP de la victoire de Jean-François Copé, avec 952 voix d'écart.  L'UMP et son univers impitoyable auront finalement montré à l'occasion de cette élection de son président, qui se voulait démocratique,  qu'il n'y avait rien de nouveau sous le soleil. Au contraire, que les déchirements de la droite aujourd'hui répétaient en quelque sorte une « scène primitive » freudienne, où le pouvoir ne s'acquiert qu'au terme d'une lutte fratricide. Rappelons-nous des années 1970 : Jacques Chirac lâche Jacques Chaban-Delmas pour Valéry Giscard d'Estaing, avant de trahir ce dernier. Dans les années 1990, Edouard Balladur, « l'ami de trente ans », entraînera un certain Nicolas Sarkozy, pour se présenter contre Jacques Chirac, une traîtrise qui divisera durablement la droite. Il y aura également la rivalité féroce entre Dominique de Villepin et Nicolas Sarkozy, avant que ce dernier s'impose et gagne la présidentielle.

Tout cela finalement a un parfum de nostalgie, dont Saint-Exupéry disait qu'elle était "le désir d'on ne sait quoi..."