Fonds stratégique : l'environnement au service de la compétitivité

Par Maximilien Rouer, président de BeCitizen.

Crise financière oblige, Nicolas Sarkozy crée un fonds stratégique d'investissement, doté de 20 milliards d'euros, qui a pour objectif de "sécuriser le capital d'entreprises stratégiques" et d'"investir dans des projets industriels novateurs et audacieux". En même temps, le Grenelle crée le cadre réglementaire qui va permettre à la France d'atteindre les objectifs qu'elle s'est fixés en matière d'environnement. Lors de la semaine des énergies renouvelables du 17 novembre, Jean-Louis Borloo a annoncé "cinquante mesures pour les énergies renouvelables", avec le lancement d'outils financiers assez anecdotiques par rapport aux chantiers à mener.

Quelques semaines avant, la très conservatrice Agence internationale de l'énergie publiait son World Energy Outlook 2008 et alertait sur le fait qu'il faudra trouver, en production pétrolière, l'équivalent de six Arabie saoudite d'ici à 2030. Enfin, le directeur général du WWF International, James Leape, commentant le rapport Living Planet 2008, précise que "la récession financière n'est rien en comparaison de la menace d'un resserrement du crédit écologique".

Pourtant, restauration de l'environnement et compétitivité industrielle vont de pair. Petite explication...

L'industrie française a un impact environnemental significatif?: 20% des émissions de gaz à effet de serre, 23% de la consommation énergétique, 12% de la consommation des ressources en eau et 30% des déchets nationaux. Cet impact pèse sur les comptes de résultat. Dans certaines industries, "l'environnement" représente jusqu'à 40% des coûts d'exploitation. Réduire cette charge est à la fois une condition de survie, tout en répondant à certaines ambitions environnementales. Sans parler de l'ensemble des externalités, comme les risques sanitaires liés aux rejets toxiques de certaines industries, pour l'instant non intégrés dans les comptes de résultat, qui vont tôt au tard, contraints par une prise de conscience grandissante et la réglementation internationale qui s'ensuivra, venir alourdir les dépenses et affaiblir la valeur des actifs au bilan.

Pour atteindre ces objectifs, nous proposons donc que le fonds souverain incite les entreprises à mettre en ?uvre des démarches vertueuses, visant à s'affranchir de leurs externalités environnementales?: efficacité énergétique, transformation des déchets en ressources, les pistes sont nombreuses.

Mieux encore?: mettre en place ce type de démarche peut être rentable à très court terme, tant pour l'industriel qui la met en ?uvre que pour le fonds qui la soutient. Par exemple, un projet d'usine positive mené récemment par un papetier permet de réaliser 9 millions d'euros d'économies annuelles, pour un investissement de 20 millions d'euros. Le temps de retour sur investissement inférieur à trois ans répond aux exigences industrielles, tandis que le taux de rendement interne de 20% répond, lui, à celles des financiers.

Au-delà de la réduction des coûts, les industriels ont également l'opportunité de créer de nouvelles sources de revenus et de valoriser leurs actifs à travers des activités générant un bilan environnemental net positif. Puisqu'il est désormais acquis que les bâtiments peuvent produire plus d'énergie qu'ils n'en consomment, à quand l'usine à énergie positive??

La mise des enjeux environnementaux au service de la compétitivité industrielle s'amorce à l'étranger. Le Premier ministre anglais Gordon Brown parle de "Green New Deal" et met le secteur privé à contribution, tandis que le futur président américain Barack Obama investira 150 milliards de dollars dans les énergies renouvelables et accordera les aides de l'Etat sur des exigences environnementales, estimant que l'environnement représente l'opportunité de créer cinq millions d'emplois "verts".

Nicolas Sarkozy souhaite faire de la France le pays exemplaire en matière de réponse à la crise financière. En conditionnant les investissements à la performance environnementale des entreprises et des projets, Nicolas Sarkozy profiterait de cet outil historique pour créer une nouvelle économie, une économie positive, qui réponde dans la durée aux besoins stratégiques des entreprises françaises. Cette économie serait positive pour les entreprises, dont la compétitivité internationale serait améliorée, pour l'environnement, qui serait préservé, restauré. Elle permettrait également de créer des emplois qualifiés et d'avenir qui enrayeront la dernière crise dont nous n'avons pas parlé ici?: celle du chômage.


 

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