Pollution automobile : pour réconcilier l'écologie et le pouvoir d'achat

Par Jean-Claude Puerto Salavert, président d'Ucar (loueur de véhicules), et Bernard Jullien, directeur du Gerpisa (Groupe d'études et de recherches permanent sur l'industrie et les salariés de l'automobile).

Alors qu'on comparait autrefois la puissance et la motorisation des automobiles, le niveau d'émission de CO2 au kilomètre est en passe de devenir l'étalon. En France, on atteindra ainsi 138 grammes en moyenne de rejet pour les voitures neuves vendues en 2008. L'Union européenne entend imposer un plafonnement à 120 grammes en 2014 et promouvoir l'automobile sans carbone pour la prochaine décennie. Le dernier Mondial de l'automobile a illustré cette préoccupation croissante des consommateurs pour les performances écologiques des voitures. Le bonus-malus instauré en janvier 2008 sur les voitures neuves et les publicités des constructeurs jouent un rôle certain dans la prise de conscience de l'opinion.

Une même vision du secteur se dessine désormais : les acteurs publics et ceux du marché ont pour ambition commune de réduire l'impact de l'automobile sur l'environnement. Deux pas restent néanmoins à franchir : d'une part, considérer les émissions de gaz à effet de serre produites par l'ensemble du parc automobile, et non simplement par les voitures neuves. D'autre part, rompre avec la référence implicite des politiques publiques à un modèle hautement contraignant qui est celui de la propriété des voitures.

En effet, il ne suffit pas de mettre des voitures propres sur le marché pour renouveler le parc automobile et permettre une diminution de la pollution. Il faut encore donner les moyens à une large part des automobilistes d'accéder à la nouveauté et à l'écologie. C'est le stock de véhicules en circulation qu'il faut traiter. En France, 35 millions d'unités circulent, dont 15 millions ont plus de dix ans. Ces dernières fournissent l'essentiel des rejets de CO2 générés par le transport automobile en France, soit 80 millions de tonnes par an. Le parc roulant émet en moyenne 174 grammes de CO2 au kilomètre et les projections n'indiquent pas de baisse substantielle de ce taux dans les prochaines années. Sur ce parc, 60% des véhicules détenus par les ménages ont été acquis d'occasion contre 40%, il y a quinze ans.

Les Français font l'acquisition de 6 millions de véhicules chaque année, dont seulement deux sont achetés neuves. Les deux tiers de ces transactions portent sur des véhicules de plus de cinq ans. En clair, pour les ménages comme pour les politiques publiques, la question écologique se pose moins en termes moraux que financiers. Changer de voiture pour polluer moins : oui, mais à quel prix ?

Une voiture familiale de quinze à vingt ans génère plus de 180 grammes de CO2 au kilomètre et coûte à son propriétaire près de 180 euros par mois, assurance et entretien compris. Sur le marché d'occasion, elle s'échange au prix moyen de 1500 euros : pas assez pour racheter une voiture de gamme équivalente permettant d'effectuer les trajets quotidiens et de partir en vacances en famille.

Dit autrement, on ne peut gérer la question écologique sans aborder celle du pouvoir d'achat. Tous les moyens sont aujourd'hui réunis pour traiter efficacement ce problème : l'ambition industrielle, la demande des consommateurs et le Grenelle de l'environnement qui ouvre notre conception de l'intérêt général au développement durable.

Mais comment faire dans ce cas pour accélérer le renouvellement du parc automobile et réduire notre empreinte écologique ? Une partie de la réponse se trouve dans l'évolution des modes de consommation automobile. Soulignons par exemple qu'une petite cylindrée peut couvrir l'essentiel de nos besoins de circulation en semaine, tandis qu'un monospace peut utilement la remplacer le week-end ou pendant les vacances. Dès lors, la question de la propriété est posée : ne vaut-il pas mieux troquer l'achat d'une voiture familiale contre la location alternée de ces deux types de véhicules ?

Dès lors, chacun doit prendre sa part de responsabilité pour réduire les coûts et rendre accessibles les voitures moins polluantes. Les loueurs, les constructeurs et les distributeurs peuvent proposer des modèles plus propres et adaptés aux besoins évolutifs des consommateurs tout au long de l'année. Le président de la république a annoncé le 4 décembre l'instauration d'une "éco-prime à la casse" de 1.000 euros pour chaque propriétaire d'une voiture ancienne et polluante qu'il déciderait de remplacer par une voiture plus propre.

Nous proposons d'étendre le dispositif à la souscription d'une offre performante de location. Evaluée à environ 180 euros par mois, une telle offre permet de couvrir l'ensemble des besoins d'une famille pendant l'année. Le dispositif aurait l'avantage de toucher les ménages les moins aisés pour qui une voiture ancienne constitue un actif important de leur patrimoine. Rompre avec le modèle de la propriété permet d'accéder à des voitures plus propres et plus confortables.

Chacun y gagnerait : les consommateurs, assurés de rouler dans un véhicule plus récent, plus sûr et renouvelé régulièrement s'il s'agit d'une location, les constructeurs qui trouveront des débouchés au défi industriel de la voiture propre et pourraient s'engager à développer la location ponctuelle dans leurs réseaux, l'industrie du recyclage et de la valorisation des métaux usagés, et enfin notre environnement !

Nous estimons que 300 à 500.000 véhicules anciens pourront ainsi être remplacés chaque année et qu'une offre de location permet de réduire de moitié les émissions de CO2 d'un véhicule ancien. La question automobile est devenue trop importante pour être gérée aujourd'hui comme si elle se réduisait à un dialogue singulier entre constructeurs et acquéreurs de voitures neuves.

A l'heure où l'urgence environnementale et la crise du secteur automobile se combinent pour appeler à un nouveau compromis industriel, il est temps que les pouvoirs publics rendent compatibles les exigences sociales, environnementales et économiques. Donnons crédit au Grenelle !

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Commentaires 4
à écrit le 09/10/2009 à 13:41
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VW et Renault Nisan vont mettre d'ici 2012 des voitures électriques sur le marché. La voiture électrique va enterrer les voitures à moteur à explosion de manière brutale, rapide et irréversible. La voiture à moteur à explosion va faire figure d'engin...

à écrit le 09/10/2009 à 13:41
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Tu les recharges comment tes voitures électriques? Avec des centrales nucléaires. Pour seulement 2 millions de voiture électrique il faudrait 2 centrale nucléaires. Sachant qu'il y a plus de 30 millions de voitures en France le calcul est vite Fait.

à écrit le 09/10/2009 à 13:41
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Tu rigoles, Cedrat. Réfléchis ! Avec des capteurs solaires sur le toit des maisons et même des immeubles qui génèrent du courant continu, chaque automobiliste pourra recharger ses batteries pas cher. Car les capteurs solaires sont appelés à un double...

à écrit le 09/10/2009 à 13:41
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Le solaire ou autres alternatives va dans le sens contraire d'Areva-EDF-Etat alors le ralenti général est de mise sauf...sauf la main mise de ceux là pour profiter du ral-bole citoyen pour cette politique de l'autrouche depuis toujours!!Je parle de D...

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