Impôts : le nouveau partage des profits

Par Erik Izraelewicz, directeur des rédactions de La Tribune.

Loin de nous tout évangélisme candide : l'exigence par le fisc français d'une documentation sur les systèmes de prix de transfert mis en place par les grandes sociétés pour économiser des impôts est d'abord symbolique. Dans les faits, l'administration leur demande déjà de justifier les prix qu'elles facturent à leurs filiales, et redressent dès que possible les "pros" des prix fictifs. Alors, RAS ? Pas sûr.

Après le durcissement des sanctions pour non-déclaration de comptes dans les paradis fiscaux, l'accélération de la lutte contre la fraude fiscale, cette "violence faite au pacte social" selon les mots d'Eric Woerth, le ministre du Budget, suggère que le vent est bien en train de tourner. Et quand on voit Barack Obama annoncer haut et fort vouloir s'attaquer à l'évasion fiscale des multinationales américaines qui ont délocalisé leurs profits dans les paradis fiscaux, on comprend qu'une certaine révolution est en marche. Et que cette révolution sera, elle aussi, mondiale.

Avec les milliards d'argent public dépensé pour empêcher les économies de verser dans la dépression, le rapport de force entre contribuables et actionnaires a clairement basculé au profit des premiers. Et avec l'explosion des déficits et dettes publics, un peu partout, même dans les pays les plus libéraux, leur seuil de tolérance à l'égard de la fraude, de l'évasion ou même de l'optimisation fiscale, est tombé à zéro. Qui peut encore croire que la complaisance des Etats vis-à-vis des gros contribuables - entreprises et particuliers - pourra durer ? Surtout quand toutes les grandes puissances se montrent enfin décidées à étouffer les paradis fiscaux.

Bien sûr, pour ne pas tuer dans l'?uf une reprise fragile, les gouvernements attendront la fin de la crise pour mettre plus d'ardeur à leur chasse aux fraudeurs. Et la pléthore d'anciens fonctionnaires de la Direction générale des impôts, devenus conseillers fiscalistes des grands cabinets, continuera à négocier avec le fisc des arrangements au profit de leurs clients. Mais le changement de climat finira par modifier l'équation des groupes. Au dire d'un grand fiscaliste de la place, l'optimisation fiscale à outrance ces dernières années leur a permis de faire croître leurs profits nets de? 30% à 40%. Pas moins !

Aussi, le nouveau rapport de forces finira-t-il par affaiblir leur modèle et abaisser sensiblement le niveau de leurs bénéfices. Dans la grande négociation sur le partage du profit, il faudra compter non seulement avec les salariés, mais aussi de plus en plus avec les Etats qui exigeront leur part du gâteau. Les actionnaires ont encore du souci à se faire.

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Commentaire 1
à écrit le 09/10/2009 à 13:41
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Les grands clients trouverons toujours "OU aller" plutôt que "Comment faire" pour échapper à la pression fiscale. Des pays seront prêts à faire des concessions pour accueillir ces clients fortunés qui, une fois partis ne reviendrons jamais... Les dél...

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