Pas de gants pour créer des géants

Par Philippe Mabille, éditorialiste à La Tribune.

Le contraste est saisissant. Il a fallu deux ans et demi de tergiversations pour créer, il y a tout juste un an, GDF Suez, un nouveau géant européen de l'énergie dont la capitalisation boursière talonne celle d'EDF. Cette privatisation, qui n'a pas rapporté un sou à l'État (encore actionnaire à 35,6 % du capital), est l'exemple réussi d'une fusion entre deux groupes complémentaires et d'une création de valeur.
Par comparaison, il a fallu deux mois de négociations pour que la Caisse des dépôts et Veolia Environnement tombent d'accord pour créer, avec Veolia Transport et Transdev, un nouveau géant mondial du transport public urbain. Avec la crise, tout va beaucoup plus vite. Le temps n'est plus à prendre des gants. Le marché mondial du transport collectif de voyageurs, au c?ur du "green business", de la croissance verte qui va surgir de la crise, devrait connaître une croissance fulgurante.
D'ici à 2016, il passerait de 460 milliards d'euros à plus de 750 milliards. Sur ce total, la part ouverte à la compétition atteindrait 30 %, contre la moitié aujourd'hui. Le petit Transdev, trop franco-français, a beaucoup plus de chances de se développer en s'alliant au très international Veolia qu'en restant sous la coiffe rassurante de la CDC.
Avec deux bémols. Le premier est le risque de constituer un quasi-monopole, dans un domaine où les commanditaires qui financent, États ou collectivités locales, n'aiment pas les opérateurs trop dominants et trop gourmands, comme c'est déjà le cas pour l'eau. Le second bémol, qui peut encore faire échouer le rapprochement, est le prix.
L'opération prévoit le maintien d'une stricte égalité actionnariale 50-50 entre la CDC et Veolia Environnement dans la future entité. Une période de "négociations privilégiées" difficile s'ouvre, sous le regard de la commission des participations et des transferts, qui va sortir de son sommeil pour donner une évaluation de Transdev. Alors, Sarkozy privatise ? Le gros mot est lâché et les syndicats de la CDC grondent déjà contre l'intervention supposée du secrétaire général de l'Élysée, Claude Guéant, dans ce dossier.
Une chose est sûre, cette opération s'inscrit dans la droite ligne de la vision qu'a Nicolas Sarkozy de la politique industrielle. Pourquoi se priver de l'opportunité ainsi offerte de donner à la France un nouveau leader mondial de 130.000 collaborateurs ? On voit mal, même dans cette période de remise en cause du libéralisme, la rue se soulever pour défendre le statut public de Transdev. Reste à garantir une opération exemplaire, sur le prix comme sur la rémunération des dirigeants du futur ensemble, qui sera, à terme, coté en Bourse.

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Commentaires 2
à écrit le 09/10/2009 à 13:41
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"Transdev, trop franco-français" dites-vous... Selon les Echos, Veolia Transport "tire 39% de ses revenus de France" et Transdev "a réalisé 40% de son activité en France". Pourriez-vous donc préciser pourquoi Trandev serait "trop franco-français" ?

à écrit le 09/10/2009 à 13:41
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Je pense que l'auteur a voulu dire que la croissance organique d'une fusion d'entreprises permet une certaine puissance financiere lorsqu'il s'agit de tres grosses commandes au niveau mondial (davantage en France, même). Après, Veolia a toujours é...

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