Restaurer la confiance, c'est aussi changer la communication

Par Nicolas Castex et Catherine Gerst, respectivement directeur général et associée chez Citigate Dewe Rogerson.

Les commentaires sur l'environnement de marché en ce début d'année oscillent entre attentisme et opportunisme ou prudence et réserve. Et les professionnels ? banquiers, avocats, auditeurs, commissaires aux comptes ? expriment un optimisme très mesuré sur la capacité des entreprises à s'introduire en Bourse dans le contexte actuel. L'appétit des investisseurs reste en effet très modéré, comme le démontrent la mise en Bourse de CFAO en décembre, la récente double cotation de Rusal à Paris et à Hong Kong et, cette semaine, l'introduction de Medica. Et ce qui frappe plus encore est la prudence des investisseurs institutionnels sur les autres types de levées de fonds, sur les marchés de capitaux ou les opérations privées. Ce n'est pourtant pas les liquidités qui manquent. Non, après dix-huit mois d'arrêt quasi complet des introductions en Bourse et des opérations de placements d'entreprise sur le marché, en Europe, il faut oser dire que la méfiance s'est partout installée et qu'elle touche tous les intervenants, y compris les analystes et les médias. Les régulateurs ne s'y sont pas trompés, d'ailleurs, qui, dès le lendemain de la crise, ont entrepris de mettre sur les rails un certain nombre de chantiers de régulation sous le maître mot de « restaurer la confiance ». Ces initiatives sont nécessaires mais visiblement insuffisantes.

Il est nécessaire de soutenir les changements en cours pour retrouver le chemin de la confiance. Nous le devons pour les entreprises, pour les aider à se financer et repartir de l'avant. Alors comment ? D'abord, en revenant au basique, « l'histoire » de l'entreprise c'est-à-dire raconter son origine, sa vision, ses hommes, ses produits, son business model et son projet de croissance. Un exercice que certaines entreprises ont tendance à ne pas considérer assez comme une priorité, mais qui est la base du contrat de confiance à instaurer : « Dis-moi qui tu es... »

Au-delà, en ces temps de turbulences, les entreprises doivent également entreprendre un exercice trop peu pratiqué : reconnaître leurs difficultés, accepter de parler de leurs points faibles, et expliquer en quoi les opérations qu'elles entreprennent ? levées de fonds, cessions, opérations de périmètre, restructurations ? sont au service d'une stratégie communiquée clairement aux parties prenantes et aux investisseurs. Il ne faut surtout pas retomber dans la facilité de l'absence de communication lorsque les choses vont mal, quant les investisseurs ont au contraire besoin d'informations, besoin qu'on s'adresse à eux.

Enfin, la crise a instillé un doute profond sur la pertinence d'un modèle purement financier, dans lequel la compréhension des risques serait totalement et uniquement capturée par des formules financières. Comme si la communication financière ne devait pas être affectée par l'exceptionnelle crise que nous avons traversée. Le « business as usual » a forcément ses limites. C'est des hommes aussi qu'il faut parler, de leurs engagements, de leurs convictions, de la cohésion des équipes et de leurs capacités à faire face ensemble aux turbulences. Face à la défiance, le « parler vrai » est la solution pour, petit à petit, rebâtir une relation d'échange.

Les investisseurs sont sans doute prêts à revenir (pour peu que les marchés se stabilisent), mais à condition que l'information qui leur est communiquée puisse leur permettre d'évaluer au plus juste le risque à prendre, et, partant, la rémunération qui le compense. Cela va prendre du temps. Mais seules les entreprises qui entreront dans cet engagement fort seront à même de reconstruire des histoires positives avec la Bourse... comme dans tout autre cas de financement alternatif. La transparence, le droit à l'information, et pas seulement financière, ce ne sont pas que des mots, galvaudés à tous les vents : c'est un état d'esprit et une pratique.

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Commentaire 1
à écrit le 11/02/2010 à 14:52
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si je puis me permettre, les exemples ne sont pas extrêmement bien choisis, car l'introduction en Bourse de Rusal a été plusieurs fois (entre 3 et 4 fois) sursouscrite. merci de bien vouloir le noter.

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