Il n'est pas besoin d'attendre une catastrophe de grande échelle, une crise des subprimes ni un accident à Fukushima pour comprendre les bienfaits de la régulation. Elle n'est pas une entrave au libre marché, bien au contraire. Jamais le marché n'a autant eu besoin de gendarmes, jamais les entreprises privées n'ont autant eu besoin de régulateurs publics, jamais le libéralisme économique n'aura autant eu besoin de garde-fous. Microsoft nous en apporte la preuve, à son corps défendant.
Le numéro un mondial des logiciels appelle aujourd'hui au secours Bruxelles contre Google, accusé d'user de sa position dominante dans la recherche sur Internet pour "entraver la concurrence dans plusieurs domaines". Un comble venant du groupe qui a guerroyé pendant dix ans contre l'antitrust européen avant de s'incliner sous une avalanche d'amendes historiques. Microsoft, chantre, par construction, du libéralisme, si ce n'est même l'une de ses emblématiques incarnations, change de casquette et, pour la première fois de son histoire, saisit officiellement un gendarme de la concurrence dans le rôle du plaignant.
Rompu aux procédures européennes, il sait les arguments qui feront mouche. Il invoque notamment une sorte de droit à l'interopérabilité de Youtube, la filiale de vidéo en ligne de Google. Habile alors que justement l'Europe imposait en 2004 au groupe de Bill Gates et Steve Ballmer de rendre interopérable son propre système d'exploitation Windows. Soulignons surtout le fait que les géants américains de la technologie viennent en Europe pour arbitrer leurs duels planétaires. Ils manifestent ainsi une grande confiance dans la "technostructure" bruxelloise que nous sommes pourtant si prompts à décrier par démagogie.
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