L'artificier de l'Elysée

Par Philippe Mabille, directeur adjoint de la rédaction de La Tribune.
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"La communication est à l'action ce que l'aviation est à l'infanterie : elle prépare le terrain", a coutume de dire Nicolas Sarkozy devant ses collaborateurs. Et de fait, en moins d'une semaine, le chef de l'État vient de noyer le candidat socialiste François Hollande sous un tapis de bombes, de la Scop SeaFrance à la TVA sociale en terminant par l'annonce d'une taxe sur les transactions financières, que la France mettra en oeuvre envers et contre tous s'il le faut. Le risque encouru, à jouer les artificiers de campagne, est que certaines bombes vous explosent au visage, comme c'est le cas pour le dossier SeaFrance.

S'agissant de la taxe Tobin "à la française", le risque est au moins aussi grand. Nicolas Sarkozy n'est pas, que l'on sache, un membre actif de l'association Attac. Son projet de taxe sur les marchés financiers n'a d'ailleurs rien à voir ni avec l'esprit, ni avec la lettre des travaux de l'économiste James Tobin. Celle-ci était conçue comme un "grain de sable" dans la masse des échanges financiers, chargé de freiner la spéculation. Le seul objectif affiché de la taxe Sarkozy est de faire payer la finance, sans autre forme de procès, pour rembourser les Etats. Comme si les marchés étaient seuls responsables du surendettement public. A supposer qu'on en admette le principe, Tobin lui-même ne concevait sa taxe qu'à l'échelle mondiale, faute de quoi elle serait à la fois inutile, car inefficace, et contre-productive, car son seul effet serait de déplacer les transactions d'une place à l'autre.

De ce point de vue, le cavalier seul affiché par l'Elysée est plus qu'une erreur, c'est une faute. Une faute contre l'Europe, qui défend un projet communautaire, seul moyen de peser au niveau mondial ; une faute contre la convergence fiscale franco-allemande (à la veille d'un sommet avec Angela Merkel), alors qu'il est plus que jamais nécessaire que les deux pays avancent de concert ; une faute contre la France enfin, qui n'a aucun intérêt à faire partir les rares emplois financiers qui ne se sont pas encore délocalisés à Londres.

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