Cet été, respirez !

ÉDITO. Le ou la Covid-19 ? Ce ne sera pas, espérons-le, le sujet de conversation principal de notre été. Inspirez, expirez, soufflez !
Philippe Mabille
(Crédits : Unsplash)

L'Europe respire, mais le virus circule toujours et la crainte d'une deuxième vague de contamination cet hiver impose de maintenir les précautions sanitaires tant que l'on n'aura ni traitements ni vaccins. Il va nous falloir vivre avec cette nouvelle normalité. C'est LA leçon de la période inouïe, inédite, que nous venons de traverser. Une humanité avertie en vaut deux ! La guerre contre ces nouvelles menaces suppose de nous réarmer : lits de réanimation, masques, réactifs de test, recherche... Cela ne coûtera jamais aussi cher que les centaines de milliards, voire les milliers de milliards de dettes publiques dépensées pour mener l'autre bataille qui nous attend, dès la rentrée : celle de la sauvegarde de nos emplois.

Que retenir de cette crise hors norme ? Chacun profitera de l'été pour en tirer des leçons personnelles mais aussi pour s'interroger sur notre mode de vie. Une épidémie de cette ampleur ramène forcément à l'essentiel. C'est l'occasion de réfléchir à ce qui est important et superflu, à ce dont on a vraiment besoin et ce dont on peut sans peine se passer. Sachons profiter de cette opportunité de penser, pas seulement à soi, mais aussi à nous. Quel vivre-ensemble voulons nous reconstruire ?

Paradoxalement, ce coronavirus qui s'attaque à nos poumons nous invite à reprendre notre souffle. À cet égard, il est symbolique que le déconfinement ait coïncidé avec un mouvement mondial contre le racisme déclenché par l'image de cet homme noir, George Floyd, agonisant en prononçant ces dernières paroles glaçantes : « I can't breathe. » (« Je ne peux plus respirer. »)

Respirer, c'est ce dont a besoin l'économie mondiale pour se relever de la crise cardiaque brutale du printemps 2020, alors que de très nombreux secteurs sont encore en réanimation et risquent de passer de longues années sous perfusion publique. Respirer, c'est un défi aussi pour la politique alors que beaucoup d'électeurs manifestent leur colère par une grève civique. L'abstention aux élections municipales en France montre que le divorce est plus profond que jamais entre gouvernants et gouvernés. Il est donc urgent de redonner de l'air à la démocratie et aux échelons de proximité. La bureaucratie et la verticalité, on l'a vu, sont sans doute responsables d'une bonne partie de la surmortalité de ce virus. Il n'y a qu'à comparer les chiffres des pays décentralisateurs comme l'Allemagne ou la Suisse avec ceux de la France ou du Royaume-Uni.

Inspirez, expirez... L'été ne sera pas de trop pour panser et penser la crise, prendre la mesure de travail de reconstruction qui nous attend. Une tâche immense, mais exaltante : il flotte comme un air d'après-guerre et cela invite à l'optimisme. Comme à la Libération, il y a un mélange d'insouciance heureuse et une sourde inquiétude devant l'ampleur des efforts à venir. Car à la rentrée, il faudra beaucoup travailler pour sauver nos entreprises et rebâtir nos économies.

Le monde d'après devra certes être plus responsable mais prenons garde aux excès de zèle écologistes : n'en déplaise aux plus radicaux, la décroissance peut être aussi mortelle que le coronavirus.

Un monde d'après plus sobre et plus durable ne doit pas être incompatible avec une économie performante et innovante. Sinon, il pourrait bien être celui d'avant en pire, plus inégalitaire et avec moins d'emplois. Prenons garde aussi au monde froid et technologique que nous promet l'effrayante domination des Gafam (Google, Amazon, Facebook, Apple, Microsoft), plus puissants que jamais. Une société sans contact, 100 % digitale, basée sur le télétravail permanent, ce ne peut être qu'une dystopie à laquelle nous devons apprendre à résister.

Ce coronavirus ne fait pas de détails : il frappe sans distinction, surtout les plus âgés et les plus faibles. C'est un avertissement de la nature et une invitation à répondre aux grands défis du siècle : climat et emplois doivent aller de pair, sauf à tout perdre.

La réaction forte de l'Europe pour relancer l'économie par une croissance verte est encourageante. L'Allemagne qui prend pour six mois la présidence de l'Union pourrait bien nous permettre d'avancer à pas de géants vers davantage d'intégration maintenant que l'idée d'une dette fédérale commence à s'imposer.

Mais ne soyons pas naïfs : le monde post-Covid restera un monde de compétition et de concurrence. Il sera plus fragmenté, plus divisé entre les grands empires que sont la Chine et les États-Unis, en état de guerre froide économique. Les enjeux de souveraineté vont prendre le dessus sur la coopération. Ce monde d'après laissera au bord de la route les pays qui feront les mauvais choix économiques. Le « nouveau chemin » que veut tracer Emmanuel Macron devra en tenir compte, parce que les erreurs se paieront cher.

Philippe Mabille

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Commentaires 4
à écrit le 21/07/2020 à 12:45
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Edito surréaliste !! Se réarmer en lits et équipements médicaux, alors que les plans de restructuration, de fermetures et de suppressions de lits reprennent de plus belle grâce à Macron et ses séides, comme a Mulhouse par exemple ? Et puis inciter ...

à écrit le 20/07/2020 à 19:19
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Un vaccin est plus qu'hypothétique, des traitements ont plus de chance d'arriver avant (peut être...). En attendant, la situation actuelle, faite d'incertitudes, d'anxiété, d'injonctions, d'incohérences, de répression va faire "monter la pression" d...

à écrit le 20/07/2020 à 16:28
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sont ils encore crédibles dans cette incohérance avec effet d annonces sans résultat !

à écrit le 20/07/2020 à 14:54
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“Nos devoirs - ce sont les droits que les autres ont sur nous.” Nietzsche

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