Transition écologique  : l'heure du choix pour la France

OPINION. Il y a des symboles troublants. Dans la rétrospective de l'année 2021, poussée sur les réseaux sociaux par les services de l'Elysée, aucune mention n'a été faite à l'action du Président de la République en matière d'environnement, et ce malgré les promesses que nous connaissons. Par Christophe Girardier, PDG de Glimpact, expert des questions environnementales
(Crédits : DR)

Cet « oubli » intervient à un moment très important, passé malheureusement inaperçu : l'annonce, le 16 décembre dernier, par la Commission européenne - par la voix de son Commissaire à l'Environnement, Virginijus Sinkevičius - d'une grande avancée. Il s'agit de l'adoption d'une recommandation officielle appelant les états, les entreprises et les ONG à utiliser une méthode unique de calcul scientifique et objectif de l'empreinte environnementale des produits : la méthode PEF pour Product environnemental footprint.

L'Europe a donc fait un choix : une méthode mise au point après un travail de huit années sur la base d'un large consensus de la communauté scientifique en concertation avec les industriels et les ONG ; une méthode d'une très grande rigueur puisqu'elle prend en compte simultanément les 16 principales catégories d'impact de l'activité humaine sur l'environnement. Le PEF regroupe aussi bien la question des gaz à effet de serre, que les émissions de particules fines, ou encore l'appauvrissement des réserves naturelles, l'eutrophisation et même la toxicité. C'est la seule mesure qui vaille, car c'est la seule mesure globale qui n'occulte pas une partie de la réalité.

Pendant que l'Europe accomplit un pas immense, la France, elle, stagne. Disons même qu'elle fait marche arrière. Un seul exemple, il est édifiant : dans le cadre de la loi Climat et résilience, la France a décidé de lancer une nouvelle phase d'expérimentation pluriannuelle - rien que cela ! - en matière de calcul de l'empreinte environnementale. Encouragés par l'ADEME, dont les atermoiements vont à rebours du consensus scientifique de l'Europe, le gouvernement et sa majorité s'entêtent donc à refaire, en petit, ce qui a déjà été fait en grand à l'échelle de l'Union. Un entêtement qui touche au ridicule voire à l'irresponsabilité. Pour reprendre une formule célèbre : la maison brûle et la France se demande comment réinventer l'eau. Sans se presser.

Un semestre important

Notre pays a une occasion unique de se rattraper : la présidence de l'Union européenne. Ce semestre doit être utile. Ce qui veut dire donner corps à une initiative d'envergure, qui enclenche une vraie transition écologique.

Cette initiative, c'est pousser à l'adoption, dans toute l'Union européenne, du PEF comme règle commune. Le débat sur la méthode étant enfin clos par la Commission, il faut dorénavant appliquer correctement et à grande échelle le PEF ! Car sans cette mesure fiable de notre impact sur l'environnement, comment pourrons-nous prendre les mesures qui s'imposent, adopter les gestes justes, et sauver ce qui peut l'être de notre planète ?

Aujourd'hui, chacun des 27 pays membres cherche à instaurer son propre « éco-score », laissant dire à peu près tout et n'importe quoi, et laissant l'initiative, soit à certains intervenants qui, bien que de bonne volonté, n'ont pas fait l'effort méthodologique nécessaire, soit à d'autres, bien moins intentionnés qui défendent tout bonnement leurs intérêts propres. Au final, mal informés, des centaines de millions d'européens prennent des décisions d'achat contreproductives pour l'environnement. Pour imposer cette diffusion du PEF, la France doit donner l'exemple en affirmant - les décrets d'application de la loi Climat et résilience le permettent - que le PEF est, sur son sol, la méthode unique de calcul de l'empreinte environnementale.

Il est temps d'imposer à l'échelle de l'Union un vrai éco-score. L'Europe sonnerait ainsi le glas du greenwashing planétaire et montrerait la voie aux industriels pour leur transition écologique. D'autant plus que de nombreuses entreprises dans tous les secteurs sont déjà prêtes à adopter le PEF, car elles savent que la multiplication des éco-scores est un non-sens et qu'en matière de transition écologique il faut une règle claire. Vous imaginez : un même produit n'aurait pas le même score en Belgique et en France, en Espagne et au Portugal, un progrès environnemental n'aurait pas le même sens à quelques kilomètres de distance ! C'est à présent une question de volonté politique. Ou la France frappe un grand coup, ou elle passe totalement à côté du moment. Monsieur le président, vous le grand européen, votre responsabilité est immense !

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.