Un G20 éducation... une première pour discuter des tendances internationales et des défis politiques

En marge du sommet en Argentine, la société civile participe à la discussion en présentant études et projets en matière de l'éducation et du développement. Par Esteban Bullrich, sénateur de Buenos Aires et ancien ministre argentin de l'Éducation et Vikas Pota, Président de la Varkey Foundation.
Par Esteban Bullrich, sénateur de Buenos Aires et ancien ministre argentin de l'Éducation et Vikas Pota, Président de la Varkey Foundation
Par Esteban Bullrich, sénateur de Buenos Aires et ancien ministre argentin de l'Éducation et Vikas Pota, Président de la Varkey Foundation (Crédits : DR)

Pour la première fois depuis sa création il y a une vingtaine d'années, le G20 invite les ministres de l'Éducation à se rencontrer pour discuter des tendances internationales et des défis politiques en matière d'éducation.

Si les ministres de l'Éducation sont invités à s'asseoir à la table des négociations pour la première fois alors que l'Argentine préside le G20, ce n'est pas par hasard. Il s'agit de la reconnaissance - enfin - que la croissance économique, le commerce et le développement sont des questions indissociables de l'éducation.

Et pour la toute première fois, un groupe d'organisations de la société civile de premier plan, axées sur l'éducation et venant des quatre coins du monde, se réunira également en marge du G20 et rencontrera des ministres ainsi que Mauricio Macri, Président de l'Argentine, pour discuter des solutions aux problèmes d'éducation dans le monde qui ne cessent de s'aggraver. Ce groupe remettra aux ministres du G20 quatre documents sur les thèmes suivants : comment former du personnel enseignant très motivé et professionnel ; les questions de l'éducation, de l'équité et de l'inclusion ; comment faire correspondre le futur marché du travail aux compétences des jeunes ; et comment l'éducation, les jeunes et les réseaux sociaux interagissent.

Lorsque les ministres de l'Éducation se rendront en Argentine ils seront bien conscients que, malgré une avalanche de communiqués sur le sommet et des promesses ambitieuses, l'éducation connaît une crise profonde à l'échelle mondiale et, se perdant dans les nombreux autres problèmes urgents à régler, est bien trop souvent reléguée au second plan par les gouvernements.

Nombres d'économies en développement manquent d'enseignants et d'infrastructures, et même lorsqu'elles en disposent, les élèves n'acquièrent pas les compétences dont ils auront besoin à l'avenir. Ces statistiques accablantes devraient être gravées dans nos consciences. Il est scandaleux qu'en 2018, plus de 260 millions d'enfants dans le monde soient déscolarisés, et que 250 millions d'enfants sur les 650 millions en âge de fréquenter l'école primaire n'apprennent pas les connaissances de base. Pour réaliser l'objectif de développement durable des Nations Unies consistant à assurer une éducation de qualité pour tous, nous devrons recruter 69 millions d'enseignants d'ici à 2030.

Ce premier pas que font les ministres de l'Éducation en se réunissant pour traiter ces problèmes est crucial. Toutefois, un autre groupe tout aussi important, mais trop souvent absent des négociations économiques mondiales, doit également en discuter : les organisations indépendantes de la société civile qui se consacrent à l'éducation. Il est temps pour les gouvernements d'accepter que, pour résoudre la crise de l'éducation mondiale, ils devront tenir compte des opinions des organisations de la société civile.

Les connaissances institutionnelles des organisations de la société civile, souvent le fruit de dizaines d'années de travaux et d'expérience sur le terrain, leur donnent un point de vue sur la question qui pourrait grandement bénéficier aux ministres.  Si les ministres ne disposent que d'un court cycle électoral pour mener à bien leurs travaux, ayant à peine le temps d'avoir un impact avant d'être affectés à d'autres postes, les groupes de la société civile peuvent se forger une expertise d'année en année, sur plusieurs décennies.

La réunion des organisations de la société civile qui se tiendra en septembre sera une manière plus concrète de mettre en lumière les recommandations et de proposer des solutions pour régler de front les défis mondiaux en matière d'éducation. Le groupe comprend des organisations telles que Plan International Canada, qui forme les enseignants et construit des écoles, des centres de ressources et des bibliothèques pour les enfants en Afrique, dont certains n'ont même jamais ouvert un livre, ou Dubai Cares, qui œuvre à améliorer l'accès des enfants à l'éducation primaire de qualité dans les pays en développement. Parmi les autres organisations, on compte notamment BRAC, Camfed, Club de Madrid, Education International, Forum for African Women Educationalists, Global Campaign for Education, the Harvard School of Education, ICRC, Achievement International, Leeman Foundation, National Institute of Education of Singapore, et UCL Institute of Education, autant d'organisations de la société civile qui sont, depuis plusieurs dizaines d'années, en première ligne du combat pour résoudre les principaux défis mondiaux en matière d'éducation. Ils seront rejoints par Atlantis Group, de la Varkey Foundation, groupe composé d'anciens ministres de l'Éducation et chefs de gouvernement partout dans le monde, qui partageront avec les organisations leur expérience de ce combat alors qu'ils étaient aux coulisses du pouvoir. Leur savoir sera décisif dans le cadre de la rencontre entre les organisations de la société civile et les ministres de l'Éducation du G20, lorsque les premières appelleront les gouvernements à agir en donnant suite à leurs recommandations.

La France fait depuis longtemps participer la société civile aux questions d'éducation, c'est pourquoi nous sommes certains que son gouvernement sera ouvert à l'idée d'intégrer dans le débat cette nouvelle perspective. En effet, la France est désormais le quatrième donateur mondial au bénéfice de l'éducation, ayant versé au total 1,3 milliard de dollars en 2016, la majeure partie de cette somme étant destinée au financement des étudiants venus de pays en développement pour étudier en France. Le Président Macron a fait de l'éducation mondiale l'une des principales priorités de son mandat, et cette année, la France a également offert un soutien financier encore plus important, s'élevant à 200 millions d'euros, au Partenariat mondial pour l'éducation, le Président ayant co-présidé la Conférence du financement du Partenariat à Dakar.

Le ministère français de l'Europe et des Affaires étrangères a créé un conseil stratégique de coopération non gouvernementale, rassemblant des personnalités importantes de différents domaines de la société civile, qui sont chargées de se pencher, entre autres, sur les questions du financement innovant au bénéfice du développement, de l'éducation et des objectifs de développement durable des Nations Unies. Les organisations de la société civile ont donc pu, collectivement, influencer le débat sur la question des destinataires de l'assistance offerte par la France en matière de développement de l'éducation, et ont plaidé en faveur d'une analyse de ses effets sur la pauvreté et l'inégalité. Élargir le débat est bénéfique, car trop souvent, les échanges sur l'éducation restent isolés et n'apportent qu'une vision étriquée de la question, alors qu'en faisant participer les groupes de la société civile, les autres acteurs peuvent apprendre de leur expérience précieuse.

En tant que Présidents du groupe des organisations de la société civile qui se réuniront à Mendoza, nous attendons avec intérêt l'issue de la rencontre entre les ministres de l'Éducation des nations du G20. Cependant, ces ministres ne devraient pas se réunir uniquement une fois tous les dix ans, et cette rencontre devrait constituer un volet annuel des sommets du G20 et du G7. L'année prochaine, le G20 et le G7 seront respectivement présidés par le Japon et la France, et nous encourageons les organisateurs à inclure dans ces sommets ce format de discussion entre ministres de l'Éducation.

Indépendamment de l'issue des discussions, ce sont les idées des groupes de la société civile qui montrent de plus en plus fidèlement la voie à suivre dans le cadre des discussions des gouvernements pour résoudre la crise mondiale en matière d'éducation. Nous vivons dans un monde interconnecté, ce qui signifie que ce n'est pas seulement l'avenir des autres pays qui est en jeu : c'est aussi le nôtre. C'est pourquoi nous ne pouvons plus ignorer leur appel à l'action.

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Esteban Bullrich, sénateur de Buenos Aires et ancien ministre de l'Éducation argentin,  et Vikas Pota (Président de la Varkey Foundation), co-Présidents d'un nouveau groupe d'organisations de la société civile qui se réunira en marge du sommet des ministres de l'éducation du G20 le 5 septembre à Mendoza, Argentine.

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Commentaire 1
à écrit le 05/09/2018 à 9:19
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"c'est pourquoi nous sommes certains que son gouvernement sera ouvert à l'idée d'intégrer dans le débat cette nouvelle perspective" Vous parlez à un gars qui pensait que la Guyane était une ile hein, faudrait redescendre sur terre un peu, merci.

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