"Gilets jaunes" : l'économie ligérienne redoute les ricochets

Menacé par des blocages filtrants à répétitions, le port de Nantes Saint-Nazaire craint pour son activité. Si le commerce souffre des problèmes de circulation et de fréquentation, l'industrie redoute une rupture des flux approvisionnements qui auraient des répercussions sur la production et...  l'emploi.
(Crédits : JEAN-PAUL PELISSIER)

« Ce matin, entre 6 heures et 14h00, aucun véhicule n'a pu entrer ou sortir du terminal roulier. Les blocages ont été levés cet après-midi, mais nous n'avons aucune visibilité. Sur soixante remorques, nous en avons réceptionné dix, les autres sont parties par la route », explique Jean-Christophe Herry, directeur de Somaloir (Société Maritime de Loire-Atlantique), spécialisé dans le transport de véhicules de colis et de conteneurs. Sur le terminal roulier Montoir-de-Bretagne, l'activité fonctionne depuis plusieurs jours au ralenti, ou plutôt pas à coup.

« Nous n'avons pas encore de chiffrage, mais les pertes sont extrêmement importantes. Et pas seulement sur l'activité portuaire. Les industriels fonctionnent en flux tendus. Ils sont toujours en limite, et là, les ruptures de stocks risquent d'impacter les chaines de production, l'emploi, et tout le tissu économique. Quand on sait que 85% des échanges régionaux passe par la mer, le manque de fiabilité risque d'avoir de sévères répercussions », redoute-t-il.

Des craintes sur les flux d'approvisionnement

Dès vendredi, le port de Nantes-Saint-Nazaire tirait la sonnette d'alarme suite aux filtrages et blocages menés par des gilets jaunes depuis le 29 novembre dernier sur les ronds-points desservant les terminaux à conteneurs (TDMC) et roulier.

« Le fonctionnement des services intervenant dans les escales de navires, comme la capitainerie, le pilotage, le remorquage et le lamanage, est perturbé. L'activité des 450 entreprises industrielles et logistiques implantées sur le domaine portuaire de l'aval de l'estuaire de la Loire est également impactée. Plusieurs entreprises des filières aéronautique, automobile et agroalimentaire ont fait part de difficultés importantes dues aux perturbations de la chaîne logistique », dit-on à la direction du port de Nantes-Saint-Nazaire.

« Pour nombre de clients, l'activité est inexistante. Seule l'activité vrac a réussi à passer entre les gouttes. Pour le reste, l'impact est considérable.  Chaque jour, habituellement 600 remorques entrent ou sortent du terminal pour charger ou décharger des conteneurs. Les blocages ont au minium créé des retards dans les approvisionnements. Au pire, les remorques ont  été détournées vers d'autres ports.  On peut craindre qu'avec une semaine de retard les chargeurs réfléchissent à passer par d'autres plateformes », constate Jean-Baptiste Gouin, directeur clientèle de Nantes-Saint-Nazaire Port.

Or, le terminal de Montoir de Bretagne est une plaque tournante pour PSA qui y stationne ses véhicules en transit ou pour Airbus qui a, récemment fait de cette infrastructure portuaire, un hub entre les ports de Hambourg et Toulouse.

« L'industriel redoute les ruptures de charge et les arrêts de chaîne de production. On n'y est pas, mais c'est un risque. Tout comme les véhicules de PSA qui stationnent trois à quatre jours à Montoir avant d'être réexpédiés. Aujourd'hui, les parkings sont pleins. Il y a de vrais enjeux industriels, et des problématiques d'emplois derrière », admet-il, multipliant les contacts et les démarches juridiques pour améliorer le dispositif et sécuriser le passage des véhicules.

« On essaie autant que possible d'être dans l'anticipation. Mais c'est très compliqué, on manque totalement de visibilité », reconnait-il. Pour Patrick Cheppe, Président du Medef 44, « Les premiers touchés sont les commerçants, dont certains évoquent 30%, 50% ou 70 % de pertes. Le commerce est par essence une activité saisonnière au cours de laquelle certains pensaient pouvoir rattraper leur marge. Ce qui ne devrait pas être le cas. Et ce malgré le geste du gouvernement qui a pris un arrêté autorisant les ouvertures du dimanche sans même alerter les syndicats. Pour l'industrie, cela montre qu'il est essentiel d'avoir une stratégie export, avec des unités à l'étranger, pour équilibrer les risques ».

Des représentants non-représentants

« S'il y a un message à faire passer aux gilets jaunes, c'est de les inciter à entrer le plus rapidement possible dans des discussions faute de quoi ils bloqueront leurs propres emplois. Le port gère près de 300 types de marchandises pour les exportations et les importations. On cherche à trouver des solutions, mais le mouvement est non visible, et nous rencontrons les mêmes difficultés que le gouvernement », indique Yann Trichard, président de la CCI de Nantes Saint-Nazaire.

Un accord conclu la semaine dernière avec un représentant des Gilets jaunes la semaine dernière a été dénoncé ce lundi pour bloquer les ronds-points d'accès au terminal de Montoir et à la raffinerie de Donges.

«Or,  derrière l'activité portuaire, c'est toute l'activité commerciale qui est impactée. Demain, ce sera, l'industrie, ensuite les artisans...Les problèmes vont se succéder par ricochet » redoute le président de la CCI de Nantes Saint-Nazaire, pour qui la situation des commerçants est extrêmement critique. « En pleine période de Noël,  les bijoutiers rapportent des baisses de chiffre d'affaires de -68%. Quand on bloque les accès, on a l'impression de s'opposer à de grands groupes, qui ne sont en fait que des franchises ou des concessions qui travaillent avec cinq, six ou dix employés. Je crains pour l'emploi dans certains secteurs, et ce sont les emplois des Gilets jaunes. Il ne faut pas se faire d'illusions, ce sont les GAFAM qui vont en profiter. Ceux qui vont véritablement en pâtir, seront les petites sociétés de transport, local en bout de chaine.»

Déjà, la Chambre de commerce et d'industrie de Nantes-Saint-Nazaire dit s'être rapprocher de la Fédération Française Bancaire pour étudier les manières de pallier le manque à gagner de chiffre d'affaires et éviter la casse sociale.

Partiellement bloquée dans la matinée de lundi, la raffinerie de Donges a pu reprendre ses activités suite à l'intervention des forces de l'ordre.

« Nous avons pu rattraper notre retard. Ce que l'on peut recommander aux gens, c'est de ne pas changer leurs habitudes pour éviter les paniques », prévient-on chez Total.   Au lendemain des échauffourées du week-end, dans le centre-ville de Nantes, à l'aéroport Nantes-Atlantique, les points de crispations dans le département sont tombés d'une quinzaine à six aujourd'hui.

Mais, face à l'imprévisibilité du mouvement, la préfecture qui prévoyait un exercice de sécurité civile avec 800 intervenants simulant un attentat à proximité du centre-ville a préféré reporter l'opération.

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Commentaires 5
à écrit le 04/12/2018 à 18:37
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Il' non plus riant a perdre leS gilets jaunes alors continue la banque vas saute

à écrit le 04/12/2018 à 12:32
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Il faudrait que ce mouvement de débiles qui réclament tout et n'importe quoi cessent de mettre le bordel car d'autres qui étaient patients ne vont plus l'être bien longtemps et on peut passer très vite du jaune au rouge vif.

le 04/12/2018 à 17:10
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C'est le gouvernement qui a joué le pourrissement. Au lieu d'envoyer les CRS aux Champs Elysées, il fallait les envoyer sur les lieux de blocage. Le port à la réunion bloqué depuis des jours a été libéré avec 20 garde mobile: quand on veut, on peut !...

à écrit le 04/12/2018 à 9:05
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Encore une photo voulant faire croire que le mouvement est manipulé, alors qu'un manifestant brandissant le drapeau cela peut être, je l'ai vu, tout simplement un cri de désespoir, a mettre en perspective avec l'article dans lequel on dit que c'est l...

à écrit le 04/12/2018 à 2:17
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Ce gouvernement est inconséquent !!

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