Ukraine : Intel, Apple... les sanctions américaines renforcent l'enjeu de l'approvisionnement technologique de la Russie

La liste des majors américaines annonçant cesser tout ou partie de leurs activités en Russie, face à l'invasion de l'Ukraine, ne cesse de s'allonger. Parmi elles, des fournisseurs stratégiques pour le bon fonctionnement de l'économie russe. Ces sanctions vont-elles encore pousser Moscou à se tourner encore davantage vers la Chine pour pallier aux risques de pénuries ?
Intel condamne l'invasion de l'Ukraine par la Russie et nous avons suspendu toutes livraisons à la Russie et au Belarus.
"Intel condamne l'invasion de l'Ukraine par la Russie et nous avons suspendu toutes livraisons à la Russie et au Belarus." (Crédits : Fabian Bimmer)

L'exclusion de la Russie de tout lien commercial se poursuit de la part des entreprises américaines qui annoncent leur rupture avec le pays en guerre contre l'Ukraine depuis le 24 février. Outre les géants de l'industrie tels ExxonMobil, Boeing, Ford qui a décidé de suspendre sa participation à une co-entreprise, General Motors qui a cessé jusqu'à nouvel ordre ses exportations de voitures, tous les secteurs prennent des mesures de rétorsion. Parmi eux, le secteur clé des nouvelles technologies.

Le groupe de micro-processeurs Intel a ainsi annoncé jeudi soir avoir suspendu ses activités en Russie et au Belarus. "Intel condamne l'invasion de l'Ukraine par la Russie et nous avons suspendu toutes livraisons à la Russie et au Belarus. Nos pensées vont à tous ceux qui sont impactés par cette guerre", explique le groupe dans un communiqué.

Dès lors, la question de l'approvisionnement du pays en composants électroniques va rapidement se poser pour la onzième économie mondiale. L'Américain est en effet l'un des maillons de la fourniture d'Internet au travers de micro-processeurs et puces, destinés par exemple aux data centers. Aussi, comme pour d'autres secteurs, tel l'énergie, ces sanctions vont sans doute accentuer le rapprochement de la Russie avec la Chine. Plus largement, l'Asie du Sud avec Taïwan est le foyer industriel d'usines fournissant ces technologies.

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 Plus de ventes d'iPhones, de Mac Book par Apple

"Je vous prie (...) de cesser de fournir des services et des produits Apple à la Fédération de Russie, y compris en bloquant l'accès à l'Apple Store !", demandait dans une lettre postée sur Twitter vendredi dernier, le ministre ukrainien du numérique, Mykhailo Fedorov.

Le fabricant des téléphones iPhone, des ordinateurs Mac et des tablettes iPad explique dans un message transmis à l'AFP avoir arrêté les exportations vers la Russie dès la semaine dernière. Quelques jours plus tôt, il avait coupé l'accès à son système de paiement Apple Pay, créant des files d'attente dans le métro de Moscou. Aussi, il retiré de son magasin en ligne AppStore les applications des médias d'Etat russes RT et Sputnik.

"Je suis sûr qu'une telle mesure encouragera la population jeune et active de Russie à faire cesser" l'agression militaire, ajoutait Mykhailo Fedorov.

Apple a aussi désactivé la fonction permettant de rapporter en direct des incidents sur Apple Maps en Ukraine "par mesure de sécurité et de précaution pour les citoyens ukrainiens".

Cette décision, qui va entrainer logiquement une chute de son chiffre d'affaires annuel dans le pays, n'a pas fait trembler le cours de l'action. Sur le Nasdaq, le titre n'a visiblement pas été perturbé par ces annonces, en hausse de 1,48% sur 5 jours, à plus de 166 euros l'action.

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La rivalité avec Xiaomi

Alors que le fabricant américain est engagé dans une rude compétition mondiale pour vendre ses produits hardware, notamment face au chinois Xiaomi, que pèse le marché russe pour la firme à la pomme ? En Russie, il viendrait de céder à ce rival asiatique son podium de première marque de smartphones achetée, à 14% de part de marché, contre 26% entre juillet et septembre 2021, selon des données Burga citées par Nasdaq.com.

L'Américain, qui a réussi à amortir la pénurie de composants électroniques contrairement aux autres fabricants, n'aura aucun mal à se concentrer sur ses marchés porteurs, tel le marché chinois. La part d'Apple sur le marché des smartphones en Chine a atteint 23% au quatrième trimestre, un niveau record, et la société américaine s'y est classée en tête des constructeurs pour la première fois depuis six ans, avait rapporté mercredi la société Counterpoint Research.

Alors que peu de concurrents ont lancé de nouveaux produits pendant la saison des fêtes, l'iPhone 13, dont la distribution avait débuté juste avant le début du quatrième trimestre, a dopé les ventes d'Apple.

La pression des amendes en Russie

Dans le même temps, habituée aux sanctions qu'elle commence désormais à anticiper ou à parer avec des alternatives, la Russie continue d'augmenter sa pression sur les GAFA afin de garder le contrôle sur les contenus et les données. Apple sort aussi d'un marché sur lequel il risque des amendes.

Accusées de ne pas effacer des contenus jugés dangereux pour les mineurs ou liés à l'opposition, Google et Facebook ont écopé d'une amende en décembre dernier de 7,2 milliards de roubles (87 millions d'euros au taux actuel) et 1,9 milliard de roubles (23,8 millions d'euros). Microsoft pour les mêmes raisons avait choisi de retirer sa plateforme professionnelle Linkedin.

Outre la pression des amendes, les autorités ont menacé d'arrêter des employés d'Apple et Google en Russie si elles ne coopéraient pas, selon des sources internes à ces groupes.

Dans ce conflit, Facebook, Google ou Twitter ont de leur côté pris des mesures pour limiter l'influence de médias proches du pouvoir russe.

De quoi renforcer la conviction des autorités russes de développer en parallèle un système d'"internet souverain" qui donnera à terme la possibilité d'isoler le net russe en le séparant des grands serveurs mondiaux. Le Kremlin nie vouloir bâtir un réseau national sous contrôle, comme en Chine, mais c'est ce que craignent ONG et opposants.

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Disney, Netflix et WarnerMedia, ont aussi choisi ces derniers jours de se désengager, au moins temporairement de la Russie. Aussi, la plateforme de locations touristiques Airbnb cesse ses activités et propose des hébergements gratuits de court terme pour 100.000 réfugiés ukrainiens.

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