Bpifrance met déjà en musique sa stratégie climat

Distribuer 1,5 milliard d'euros de prêts verts d'ici 2022, porter à plus de 2 milliards par an les financements des renouvelables, accompagner plus de 1.500 greentech en 2021, faire grossir une communauté d'entrepreneurs « en transition »... Depuis quelques mois, la banque publique d'investissement met en oeuvre son plan climat.
Anne Guérin, directrice du financement et du réseau chez Bpifrance.
Anne Guérin, directrice du financement et du réseau chez Bpifrance. (Crédits : Bpifrance)

Pompier de la crise économique, Bpifrance entend également jouer un rôle clé dans la relance verte de l'économie. Il y a cinq mois, elle dévoilait un plan climat, élaboré en commun avec la Banque des Territoires dans le cadre du plan de relance, d'un montant de 40 milliards d'euros. Alors que la filiale de la Caisse des Dépôts se concentre sur la transition des territoires et les infrastructures, la banque publique d'investissements dirige, elle, ses efforts vers les entreprises. Sa partition est d'ores et déjà mise en musique.

L'objectif pour Bpifrance est à la fois de jouer sur l'offre, en accélérant le développement des technologies vertes et des énergies renouvelables, et sur la demande, en accompagnant les entreprises dans leur transition. Objectif : mettre en mouvement les plus petites structures, notamment les PME, dont les dirigeants se sentent très concernés par la question climatique en tant que citoyens, mais désorientés pour mener la transition de leur propre société.

Côté offre, Bpifrance met l'accent sur l'innovation. Elle part du constat qu'à technologies constantes, les objectifs de l'accord de Paris, qui vise à contenir le réchauffement climatique à 1,5°C, ne pourront pas être atteints. Dans cette optique, la banque publique entend s'appuyer sur son plan Deeptech, qui consiste à favoriser les transferts d'innovations des laboratoires de recherche vers l'industrie. Lancé il y a deux ans, ce plan massif est doté de 800 millions d'euros sur cinq ans et vise à démultiplier le soutien aux innovations de rupture.

Cinq thématiques greentech

"Nous allons donner à ce plan un axe greentech très fort et nous allons travailler sur cinq grandes thématiques : les nouvelles énergies, qui englobent notamment les enjeux de stockage et les vecteurs énergétiques comme l'hydrogène. L'environnement, qui couvre l'économie circulaire, la décarbonation, l'écoconception ou encore la récupération de la chaleur fatale. La construction durable, qui comprend à la fois les matériaux bas carbone et l'efficacité énergétique des bâtiments. L'agriculture et l'agroalimentaire, qui couvrent des sujets comme les bioengrais, mais aussi la robotique maraîchère. Et enfin, la chimie verte et les matériaux biosourcés", expose Anne Guérin, directrice exécutive du financement et du réseau de Bpifrance.

A travers ce plan greentech, tout juste élaboré, Bpifrance espère accompagner plus de 1.500 start-up en 2021. "Outre leur développement, ce qui nous importe c'est de faire connaître leurs solutions. C'est de leur donner de la visibilité pour qu'elles soient adoptées le plus rapidement possible", précise Anne Guérin.

Deux milliards par an pour les énergies renouvelables

En parallèle, la banque publique entend accélérer le financement des énergies renouvelables. Un volet plus classique et sur lequel elle accumule une certaine expérience puisqu'elle revendique avoir déjà financé un tiers du parc éolien tricolore existant.

"En 2020, le financement des énergies renouvelables a représenté 1,7 milliard d'euros. Un montant du même niveau que 2019, malgré la crise. Notre ambition est d'augmenter ce volume pour arriver à plus de 2 milliards d'euros de financements par an et ce dès 2021", précise la banquière.

Outre l'éolien et l'énergie solaire, Bpifrance soutient également le biogaz et a ainsi lancé deux nouveaux prêts pour financer les unités de méthanisation. La banque publique explique aussi vouloir encourager l'autoconsommation des entreprises, via des contrats de fourniture d'énergie signés directement auprès des producteurs d'énergies renouvelables (les Corporate PPA en anglais). C'est l'une des briques qui pourrait alimenter leur stratégie bas carbone.

Des outils de financement longs

Car l'autre grand chantier de la banque publique c'est bien d'accompagner les entreprises dans leur transition. Pour les soutenir sur le plan financier, Bpifrance a prévu de distribuer 1,5 milliard d'euros de prêts verts aux entreprises d'ici 2022.

"Ce prêt doit permettre de financer l'immatériel, comme la formation, la mise aux normes environnementales, la connectique ou encore le digital. Il a été conçu sur une durée de dix ans car dans le contexte actuel, il faut des outils de financement très longs pour que la charge de remboursement soit la plus basse possible, les entreprises étant très endettées", explique Anne Guérin.

Les premiers prêts verts ont été réalisés et l'ambition de Bpifrance sur l'année 2021 est d'en réaliser 1 milliard.

Du diagnostic au plan d'action

Outre le soutien financier, la banque a développé une série d'outils. Le "climatomètre" est le plus accessible d'entre eux. Sans donner de statistiques précises, il permet à une entreprise de se rendre compte, en quelques minutes, de son empreinte carbone en fonction de son secteur d'activité et de sa taille par exemple. "Quelque 700 entreprises ont déjà effectué ce parcours complet", indique Anne Guérin. Plus élaboré, le Diag Eco-Flux, développé avec l'Ademe, a été sollicité par 150 entreprises. "Il permet d'analyser tous les flux (consommation d'eau, de matières premières, d'énergies) et de proposer un plan d'action au dirigeant pour qu'il optimise ces flux avec un retour sur investissement rapide", explique-t-elle.

Bpifrance mise également sur le Volontariat territorial en entreprise Vert ou VTE Vert. Officiellement lancé en novembre dernier, il propose à de jeunes diplômés de devenir le bras droit "vert" d'un dirigeant d'entreprise pour mener à bien une mission de transition écologique sur 12 mois.

"Nous avons reçu les premières demandes d'entreprises et nous espérons atteindre 500 contrats sur l'année 2021", précise Anne Guérin.

Une communauté pour créer l'émulation

Dernier levier pour accélérer ce mouvement bas carbone et créer une émulation, le développement de la communauté du coq vert. Lancée l'été dernier avec le ministère de la Transition écologique, l'initiative reprend les grands principes de la communauté French Tech, (symbolisée par un coq rouge) qui réunit depuis 2013 les start-up françaises. Objectif : permettre à ses membres d'échanger des bonnes pratiques sur leur transition énergétique et écologique grâce à un réseau social et à des clubs déclinés en région. Aujourd'hui, la communauté compte 100 membres et une centaine de demandes est en attente. A terme, Bpifrance espère compter au moins 500 membres actifs, voire 1.000.

Tous pourront échanger le 6 avril prochain à l'occasion du Jour E, qui se tiendra au parc floral. Cette journée dédiée au partage d'expérience mettra en avant des chefs d'entreprise qui mènent leur transition écologique et des entreprises qui développent des technologies vertes.

"L'idée est de montrer comment on peut participer à la transition à son échelle et comment il est possible de réconcilier écologie et économie. L'objectif est aussi de montrer comment on peut valoriser cette transition auprès de ses clients et pour sa marque employeur. Nous avons une certitude, c'est que les entreprises qui ne se mettent pas en route dans les cinq prochaines années auront du mal à vendre et du mal à recruter", affirme la directrice du financement et des réseaux.

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Commentaire 1
à écrit le 11/02/2021 à 11:02
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BPI , un fond souverain de fonctionnaires qui ne dit pas son nom avec une transition énergétique qui risque d'avoir un impact majeur sur le niveau de vie des français que cela soit au niveau des taxes induites (normes, subventions) , des emplois fut...

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