Le nucléaire  : une "bonne affaire" économique

Par Francis Sorin
, directeur du Pôle information de la Société française d'énergie nucléaire (vient de publier, aux Editions Grancher, "Le nucléaire et la planète, dix clés pour comprendre").

Analysant ici même (La Tribune du 20 janvier 2010), les questions de fond posées par l'instauration prochaine d'une taxe carbone, Corinne Lepage dénonce, au détour d'un développement sur l'électricité, "le nucléaire qui devient une plaie de l'économie française, sur le plan financier comme sur le plan industriel". La brutalité de la condamnation laisse pantois et l'on se demande sur quelles données factuelles l'ancienne ministre de l'Environnement fonde ce jugement. Il peut être intéressant, en plein débat sur la fiscalité écologique et la nouvelle organisation du marché de l'électricité, de mesurer les principales implications du recours au nucléaire sur l'économie du pays.

Rappelons d'abord le fait essentiel : si la France ne disposait pas d'un programme nucléaire et si elle devait, en conséquence, acheter à l'étranger les combustibles - en l'occurrence le gaz - nécessaires à la production de 80% de son électricité, il lui en coûterait dans les conditions actuelles entre 25 et 30 milliards d'euros chaque année. Par comparaison, le coût de l'uranium importé destiné à faire fonctionner notre parc nucléaire ne dépasse pas quelques centaines de millions d'euros par an.

Le nucléaire, c'est donc avant tout, dans le domaine de nos échanges extérieurs, des sommes considérables économisées. Ce fait majeur, qui semble avoir échappé à Mme Lepage, a bien entendu une influence déterminante sur la balance commerciale du pays : sans le nucléaire, la France ne pourrait éviter une lourde ponction, annuellement récurrente, de sa richesse nationale et verrait gravement amplifié le déficit de ses comptes extérieurs.

Au lieu de cela, le pays est devenu le premier exportateur mondial d'équipements et services nucléaires, pour un chiffre d'affaires de l'ordre de 6 milliards d'euros en moyenne annuelle. Ces exportations sont un des postes bénéficiaires les plus importants de nos échanges et soutiennent, à l'intérieur de nos frontières, plusieurs milliers d'emplois. Ainsi, grâce aux recettes qu'il procure et aux économies qu'il permet, le nucléaire, loin d'être "une plaie" de l'économie nationale, est au contraire un des piliers positifs de la balance commerciale française à laquelle il apporte une contribution déterminante.

Du point de vue du consommateur d'électricité, le nucléaire se révèle également une "bonne affaire". Si la construction d'une centrale nucléaire nécessite un investissement important, le coût de production de son kilowattheure (incluant le démantèlement et le traitement des déchets) se révèle aujourd'hui inférieur de 5% à 25% à celui des kWh charbon et gaz (du fait que peu d'uranium est requis pour fabriquer beaucoup d'électricité...). Cette compétitivité a permis des baisses régulières des prix de l'électricité facturée aux consommateurs français, lesquels bénéficient aujourd'hui de tarifs inférieurs de 30% à ceux de la moyenne européenne.

Notons par exemple que le prix HT de l'électricité à usage domestique était en 2008 de 92,10 euros le mégawattheure en France contre 143,30 euros en Allemagne et 165,80 euros en Italie... Les mêmes écarts se retrouvent pour les usages industriels, facturés TTC à 70,1 euros/MWh en France contre 101,70 euros en moyenne européenne. Ces tarifs français très mesurés concourent à la compétitivité internationale de beaucoup de nos entreprises.

Sous quelque aspect qu'on l'analyse, l'impact du nucléaire sur l'économie du pays se révèle positif et ne correspond en rien au tableau catastrophiste qu'en dessine Mme Lepage. Précisons-lui enfin que contrairement à l'antienne rabâchée par certains groupes militants, et qu'elle semble reprendre à son compte, l'industrie nucléaire française s'auto-finance depuis bientôt trente ans et ne se nourrit d'aucune subvention puisée en catimini dans la poche du contribuable. Au contraire, grâce aux impôts sur les bénéfices et aux taxes locales qu'elle acquitte chaque année (de l'ordre de 1,5 à 2 milliards d'euros), cette industrie est une source de recettes et non pas de dépenses pour la collectivité publique.

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Commentaires 6
à écrit le 18/12/2019 à 9:33
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vroum vroum je suis la voiture

à écrit le 11/03/2010 à 16:40
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Bonjour, Mr Francis Sorin nous présente l'industrie nucléaire uniquement sous l'angle économique. Mais, il oublie de préciser les conséquences inhérentes à ce type d'activité : gestion des déchets, pollution de l'environnement, incidents plus ou moi...

à écrit le 11/02/2010 à 14:31
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à GG53: le chantier de Brennilis est arrêté, je maintiens qu'aucune centrale n'est encore démantelée. EDF avait certes provisionné de l'argent pour le démantellement, mais une grande partie de ces provisions a été utilisée pour des achats à l'étran...

à écrit le 09/02/2010 à 12:49
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Brennilis est la première centrale démantelée (centrale à eau lourde voir wikipedia). Creys Malville est en cours de démantèlement, Bugey1 idem...... EDF provisionne de l'argent pour le démantèlement de ses centrales.

à écrit le 09/02/2010 à 9:45
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J'aimerais savoir comment est calculé le coût du démantèlement, sachant qu'aucune centrale n'a encore été démantelée, et que personne ne sait combien d'années sont nécessaires.

à écrit le 09/02/2010 à 6:27
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Mme Lepage fait comme les autres politiciens "écologistes" il faut faire peur pour gagner des voix. Peur du nucléaire, peur des OGM, peur de l'étranger, peur des religion et comme cela on gagne une place de député, de maire, de député européen. La pe...

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