Uber surfe sur les traces des géants du web américain

La compagnie de VTC aujourd'hui évaluée à plus de 50 milliards étend progressivement ses activités à de multiples secteurs. Une stratégie de diversification qui a la cote dans la Silicon Valley.
Travis Kalanick, le PDG sulfureux de Uber, vient d'investir dans quatre start-up européennes.

"Uber a décidé de faire un petit investissement direct dans chacune de leur sociétés". C'est avec ces quelques mots sur Facebook que Travis Kalanick, PDG de Uber, a tenu lundi à récompenser les quatre start-up vainqueurs du concours UberPITCH. Organisé du 24 mai au 8 juin 2016 dans 21 pays, ce concours avait pour objectif de faire émerger les meilleures start-up européennes. Plus de 4.000 candidats avaient répondu à l'appel et 4 gagnants ont finalement été sélectionnés par Uber: Brigad (France), Hipromine (Pologne), Memrica (Riyaume-Uni) et Otly (Pays-Bas).

Un investissement pas seulement symbolique

Travis Kalanick a tenu à rappeler que cet investissement, une première dans l'histoire de Uber, n'était pas prévu initialement et que son faible montant (qui reste néanmoins confidentiel) lui donnait plus une valeur symbolique. A travers cette action médiatisée, Uber aurait pour objectif de soutenir les valeurs de l'entrepreneuriat qui lui sont chères.

"Il y a quelques années seulement, Uber en était au même stade que ces entrepreneurs, par la taille et la détermination. Ce n'était pas difficile pour nous de se reconnaître en eux", a commenté Pierre-Dimitri Gore-Coty, CEO de Uber, sur LinkedIn.

Si Uber cherche par cette opération à séduire un continent européen qui lui est plutôt réticent, l'investissement engagé dévoile avant tout une stratégie bien rodée et déjà courante dans la Silicon Valley. En entrant au capital de ces jeunes pousses, la compagnie de VTC élargit son périmètre d'action et renforce sa position d'ambassadeur mondial de l'innovation et de la disruption. Chaque événement est médiatisé et contribue à imposer un peu plus le réseau et la marque Uber dans les esprits.

"En participant à UberPITCH, nous ne nous attendions pas à un tel engouement ! Etre élu Coup de Coeur du Jury nous a permis de gagner en notoriété auprès de nombreux médias, du public et d'investisseurs notamment" ont confirmé sur Maddyness Florent Malbranche, Alexandre Rovetto et Jean Lebrument - cofondateurs de Brigad, startup récompensée par le concours.

Peu surprenant donc que Airbnb, autre pépite de la Silicon Valley, soit aussi adepte de ces concours sponsorisés qui lui permettent de surveiller quelques projets intéressants, dans la perspective bien évidente d'une diversification.

 Une stratégie de diversification qui se confirme

Avec ces investissements Uber consolide en fait un peu plus son plan de diversification des ses activités. L'objectif ? S'imposer non plus seulement dans le domaine des transports mais bien sur un ensemble de secteurs industriels clefs. Cette stratégie lui permet de toucher de nouveaux publics, de rendre les utilisateurs plus captifs et de multiplier les supports de diffusion de ses liens commerciaux.

Au début de cette année, l'entreprise avait déjà lancé UberTravel, une application permettant de planifier ses voyages en intégrant le transport de bout-en-bout. Quelques jours plus tard, elle annonçait avoir noué un partenariat avec Airbus pour créer un service de transports à la demande à bord d'hélicoptères. Mais l'opération la plus révélatrice de cette nouvelle ambition de diversification est bien évidemment le lancement de l'application UberEats, qui s'attaque au au marché de la livraison de repas à domicile, pourtant déjà ultra-concurrentiel. S'appuyant sur sa flotte conséquente de VTC, Uber compte livrer des plats de restaurant en un temps record.

Lire aussi : Uber lance son service de livraison de repas à domicile

Des opérations qui lui permettent de consolider son activité sur de nouveaux secteurs alors même qu'Uber subit de plein fouet une concurrence féroce aux Etats-Unis avec Lyft et en Chine avec Didi (qui l'a d'ailleurs quasiment évincé du marché des VTC).

Cette stratégie n'est évidemment pas sans rappeler celle de son alter-ego de la Silicon Valley: Airbnb. Le site de location d'appartements a acquis en septembre 2015 la start-up Vamo, spécialisée dans l'organisation de voyages pour professionnels et vient de lancer son propre programme de construction de logements. De son côté Tesla a racheté le 1er août pour 2,6 milliards de dollars SolarCity, une société américaine qui finance et installe des panneaux solaires photovoltaïques.

Sur les traces des conglomérats de la Silicon Valley

Ces entreprises encore jeunes semblent en fait marcher dans les pas des géants du web américain. Depuis plusieurs années, les GAFA (Google, Apple, Facebook et Amazon) investissent à tour de bras dans le rachat des pépites du numérique. Ces firmes font en fait face à une réalité féroce : pour conserver leur leadership les entreprises du numérique sont obligées de se diversifier le plus rapidement possible. Le principe de destruction créatrice, théorisé par Schumpeter, n'a jamais été aussi vrai qu'aujourd'hui. Dans le domaine du numérique, les innovations se succèdent à un rythme effréné et menacent sans arrêt de fragiliser, pour ne pas dire de faire disparaître, les leaders du secteur.

Pour conserver leur hégémonie, les GAFA se positionnent donc via des offres, des rachats ou des partenariats sur les sept industries clefs de la transformation numérique : la santé, la distribution, les télécoms, les énergies, les média et le divertissement, la finance et enfin le voyage et les loisirs. Google a racheté en 2011 Motorola qui fabrique des téléphones mobiles, Apple a acquis en 2010 le logiciel de commande vocale Siri, Facebook a mis la main sur Instagram et WhatsApp, Amazon s'est associé avec Ford pour connecter numériquement voitures et domiciles fixes.

Pour ces grandes entreprises, l'innovation passe désormais par le rachat de start-up, bien plus simple que le développement en interne de nouveaux services, produits ou technologies. Mais cette réalité ne s'appliquent plus désormais qu'aux géants du web. A l'instar de Uber et Airbnb, les jeunes pousses qui disruptent les marchés se lancent à leur tour dans la diversification de leurs activités. Face à une concurrence sans pitié, bâtir un conglomérat semble bien être devenu la condition de survie pour les pépites de la Silicon Valley.

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Commentaire 1
à écrit le 11/08/2016 à 10:00
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La Silicon Valley porte décidément parfaitement son nom.

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