« Nos têtes d’affiche sont les talents émergents » (Boris Vedel, directeur du Printemps de Bourges)

ENTRETIEN - Tout en misant sur les nouveaux talents, le directeur du festival espère battre un record des fréquentations grâce à une nouvelle stratégie de programmation.
Boris Vedel, directeur du Printemps de Bourges.
Boris Vedel, directeur du Printemps de Bourges. (Crédits : © LTD / PHOTOPQR/BERRY REPUBLICAIN)

LA TRIBUNE DIMANCHE - Comment s'annonce cette nouvelle édition du Printemps ?

BORIS VEDEL - Nous sommes plus sereins que l'année dernière. Il s'agissait de la première édition post-Covid et nous avions eu du mal à trouver notre équilibre financier. En gros, le festival perdait de l'argent au moment d'ouvrir ses portes. Cette année, nous allons sans doute battre un record de fréquentation avec plus de 80 000 festivaliers payants. Nous avons adopté une nouvelle stratégie de programmation et elle marche.

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En quoi consiste-t-elle ?

On a fait un pari économique en réinjectant 400 000 euros dans le budget de la programmation artistique. Le but était de saturer les soirées au W, la plus grande salle du festival, avec des têtes d'affiche, des artistes attractifs pour le grand public comme Shaka Ponk, Mika ou Martin Solveig. Avec ses 10 000 places, le W est la seule salle économiquement viable pour le Printemps. Elle doit être rentable, sinon le festival ne le sera pas. Les autres lieux, plus petits, sont structurellement déficitaires, mais Bourges existe également pour cela. Offrir des créations, mettre en avant les jeunes talents émergents, c'est dans son ADN depuis ses débuts, quand le Printemps mettait en lumière une génération d'artistes ignorés des grands médias comme Renaud, Higelin, Brigitte Fontaine ou Bernard Lavilliers.

Un festival sans grosses têtes d'affiche anglo-saxonnes est donc possible...

De toute façon, le festival ne peut s'offrir de tels artistes avec l'inflation galopante des cachets depuis quinze ans. En gros, ils sont passés de 200 000 euros à 2 millions d'euros pour les artistes les plus importants. À Bourges, nos têtes d'affiche sont les talents émergents. Le Printemps existe depuis bientôt cinquante ans [en 2027] et il a toujours été sauvé par cette idée originelle. À titre d'exemple, 70 % des artistes présents au festival ont sorti un seul album. Loin d'être franco-française, notre programmation accueille également 30 % d'artistes anglo-saxons et européens peu connus du grand public mais talentueux.

Connaît-on l'impact économique du festival sur Bourges et sa région ?

Selon une étude commandée par le département en 2019, il serait de 13 millions d'euros sur tout le territoire. Pour un budget de 7 millions d'euros, c'est pas mal... C'est le meilleur argument pour expliquer aux pouvoirs publics que la culture n'est pas un centre de dépenses mais un centre de profit.

Bourges vient d'être élu capitale européenne de la culture 2028. Cela représente de nouvelles perspectives pour le Printemps ?

On peut parler d'un relais de développement et de notoriété pour le festival. L'équipe du Printemps va d'ailleurs organiser la cérémonie d'ouverture en 2028. Nous allons également européaniser l'émergence à travers des programmes d'échanges entre artistes français et étrangers. L'ambition est également d'exporter nos créations à l'étranger. C'est l'un des axes importants du festival, qui présente chaque année des spectacles originaux produits par le Printemps. En 2024, nous aurons notamment un hommage à Françoise Hardy avec des invités comme Clara Luciani, Thomas Dutronc, Clara Ysé...

Rock en Seine à Paris, Main Square à Arras... Ces festivals organisés par des multinationales américaines comme Live Nation ou AEG représentent-ils une menace pour l'écosystème des festivals français ?

Bien sûr, dans la mesure où on se retrouve face à des oligopoles, ce n'est pas la meilleure garantie pour avoir des prix au plus bas. Face à ces grands groupes, nous sommes des artisans plus fragiles sur le plan économique. Mais il ne s'agit pas d'opposer les « méchants » d'un côté aux « gentils » de l'autre. Ces festivals répondent aussi à une demande du public de concerts spectaculaires. Il va falloir cohabiter avec sa singularité. Soit tu as Taylor Swift et c'est génial pour toi. Soit tu as la prochaine Taylor Swift et c'est encore mieux. Christine and the Queens, Zaho de Sagazan, Eddy de Pretto : ils ont tous été révélés à Bourges dans le cadre du tremplin les Inouïs. Sans oublier Zebda, Louise Attaque, Juliette, la Mano Negra... De belles histoires naissent à Bourges.

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