Pandémie : le pouvoir d'achat des Français a résisté en 2020

Le pouvoir d'achat des ménages a légèrement accéléré (+ 0,6%) en 2020, selon l'Insee. Dans le même temps, l'épargne a atteint des sommets (21,6%). Cette montagne d'épargne qui devient un enjeu de la reprise a ravivé les débats sur la nécessité d'une fiscalité ciblée.
Grégoire Normand
L'économie française a chuté de 8,2% l'an dernier, a indiqué vendredi l'Insee, soit une baisse un tout petit peu moins forte que les -8,3% précédemment estimés, mais qui confirme la récession historique subie par le pays du fait de la pandémie.
L'économie française a chuté de 8,2% l'an dernier, a indiqué vendredi l'Insee, soit une baisse un tout petit peu moins forte que les -8,3% précédemment estimés, mais qui confirme la récession historique subie par le pays du fait de la pandémie. (Crédits : Eric Gaillard)

La pandémie bouscule tous les repères des comptables nationaux. Selon la dernière livraison de l'Insee dévoilée ce vendredi 26 février, le pouvoir d'achat des ménages (revenu disponible brut) en 2020 a accéléré de 0,6% après 2,1% en 2019. Dans le détail, le revenu disponible par unité de consommation (une unité de consommation correspond à un adulte dans une ménage) a stagné. Surtout, cette moyenne masque des disparités en fonction de la composition des ménages et des catégories sociales. Sur ce point, l'Insee ne fournit pas de chiffres précis mais une récente enquête du conseil d'analyse économique montrait que le revenu des jeunes s'était particulièrement dégradé l'an passé (entre -5% et -10%).

Si la plupart des dispositifs mis en oeuvre ont permis de préserver la grande majorité des revenus des Français, beaucoup de ménages ont basculé dans la pauvreté et les minimas sociaux comme en témoignent les longues files d'attente auprès des banques alimentaires et la hausse du nombre d'allocataires du RSA.

> Lire aussi : Pandémie : l'inquiétante hausse du nombre d'allocataires du RSA

Une accélération au second semestre

L'examen plus précis des tableaux de l'institut montre que le revenu des ménages a enregistré une hausse sur la seconde partie de l'année. Entre janvier et juin, le porte-monnaie des Français a fondu au plus fort de la crise. Le revenu disponible par unité de consommation a ainsi reculé de 0,8% au premier trimestre et 0,7% au second trimestre. La mise sous cloche soudaine et brutale de l'économie française avait provoqué la sidération d'une grande partie de la population française. Avec la baisse progressive des contaminations à la fin du printemps et la levée progressive des mesures, le PIB a bondi au troisième trimestre d'environ 18% tandis que le revenu des ménages par unité de consommation a décollé de 2,5%. Avec la flambée de l'épidémie au cours du dernier trimestre et le second confinement, le revenu (UC) a de nouveau ralenti à 1,3%.

Sur l'ensemble de l'année, les dépenses de consommation des ménages sont en fort recul (-7%) alors que la demande domestique est l'un des moteurs de la croissance tricolore. A l'exception du rebond spectaculaire du troisième trimestre (+18,1%), tous les indicateurs trimestriels relatifs aux dépenses de consommation sont dans le rouge.

Une épargne au sommet

Sans surprise, les derniers chiffres de l'Insee indiquent une explosion de l'épargne des Français au cours de l'année 2020. Le taux d'épargne aurait ainsi grimpé de 6,4 points en un an, passant de 14,9% à 21,3%. La paralysie de l'économie et les nombreuses restrictions mises en oeuvre ont en quelque sorte empêché la consommation des Français alors que l'exécutif par le biais notamment de l'activité partielle a préservé une partie du revenu des actifs. Selon les derniers chiffres de la Banque de France, ce surcroît d'épargne est estimé à environ 200 milliards d'euros et cette tendance pourrait bien se poursuivre. En effet, les dernières enquêtes menée par l'institut de statistiques révèlent que les Français ont bien l'intention de continuer d'épargner dans les semaines à venir. La multiplication des variants dans les chaînes de contamination, le nouveau renforcement des mesures de restriction dans certaines zones sous pression (Ile-de-France, Dunkerque, Côte d'Azur) et le fiasco de la campagne de vaccination alimentent les craintes des Français dans cette crise sans fin. En outre, la plupart des économistes et des conjoncturistes anticipent une hausse importante du chômage en en 2021. Ce qui pourrait encore inciter une bonne partie des ménages à mettre de l'argent de côté.

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Cependant, cette montagne d'épargne est loin de concerner toute la population. Plusieurs travaux menés par la conseil d'analyse économique (CAE) rattaché à Matignon et l'Insee ont montré que l'épargne était bien plus marquée chez les ménages les plus aisés. Cette manne a ravivé le débat sur la fiscalité de cette épargne. Cette semaine, l'économiste du Collège de France, Philippe Aghion, qui a contribué au programme économique d'Emmanuel Macron, a plaidé en faveur d'une fiscalité exceptionnelle sur l'antenne de France inter.

"L'épargne qui a été accumulée concerne surtout les ménages aisés. La consommation des revenus modestes et moyens est essentiellement revenue à la normale [...] Les riches ont mis plus de côté [...] Si le chômage augmente, cela va se transformer en épargne de précaution [...] je suis favorable à une contribution exceptionnelle d'une année sur les revenus, c'est à dire sur les revenus élevés, on pourrait imaginer une imposition Covid pour financer des dépenses ciblées et temporaires."

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Baisse de la marge des entreprises au plus bas depuis 1985

La propagation du virus sur l'ensemble du territoire français a provoqué un électrochoc dans de nombreux secteurs. Beaucoup d'entreprises ont vu leur chiffre d'affaires baisser au cours de cette année cataclysmique. D'après les chiffres communiqués par l'organisme de statistiques, le taux de marge s'est effondré de quatre points en un an passant 33,2% à 29,3%.

"Environ un quart de cette chute est lié à la suppression du CICE début 2020 alors qu'en 2019, les SNF bénéficiait à la fois du CICE et des allègements des cotisations sociales qui l'ont remplacé" explique l'Insee.

Malgré les nombreuses aides mises en place (prêts garantis par l'Etat, fonds de solidarité, report ou annulation de cotisation, chômage partiel), la santé financière des entreprises inquiète de nombreux économistes et dirigeants. Près d'un an après l'arrivée de cette maladie sur le continent européen, les espoirs d'une reprise rapide se sont évaporés. Si le plan de relance annoncé depuis septembre est amorcé, le décaissement des sommes et son calibrage sont remis en question par plusieurs économistes. Les effets de la crise vont sans doute aller au delà de 2022 et beaucoup redoutent une hausse des faillites au moment du retrait progressif des aides et soutien exceptionnels.

> Lire aussi : Plan de relance : dans les coulisses du comité de pilotage à Bercy

Grégoire Normand
Commentaires 3
à écrit le 26/02/2021 à 17:40
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En parlant de pouvoir d'achat : Après une hausse de 3,5% au mois de février 2021, l'addition sera particulièrement salée pour ceux qui se chauffent au gaz durant le mois de mars. En effet, les tarifs réglementés du gaz appliqués par Engie vont aug...

à écrit le 26/02/2021 à 12:58
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oui, on distribue de l'argent a tout le monde ' quoi qu'il en coute', et on met l'economie en apesanteur avec la bce forcement, tout va bien par contre quand il va falloir rembourser et que les boites vont quand meme faire faillite, ca sera peut et...

à écrit le 26/02/2021 à 12:51
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Et donc au lieu d'aller chercher le fric des principaux coupables de ce bordel dans leurs paradis fiscaux on va aller voir sous les matelas de ceux qui peuvent encore épargner, Et personne ne voit l'impasse là sans rire ? IL n'y a pas d'alternati...

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