Réorienter l’épargne des Français vers le financement de l’économie, un vœu pieux ?

Le 1er décembre, Michel Sapin, le ministre de l’Economie, a estimé que le Comité Place de Paris 2020 avait « beaucoup avancé » sur le sujet de la mobilisation de l’épargne pour financer les entreprises. Mais c’est compter sans l’aversion au risque profondément enracinée chez les épargnants français.
Christine Lejoux
7% seulement de l'épargne des Français est investie en actions, contre 66% pour l'immobilier, 13% pour l'assurance-vie et 10% pour les livrets réglementés.

"Mobiliser l'épargne des Français au service du financement de l'économie." C'est là l'un des principaux axes de travail du Comité Place de Paris 2020, porté sur les fonts baptismaux en juin par Michel Sapin, et dont la deuxième réunion s'est déroulée lundi 1er décembre, sous la houlette du ministre des Finances. Banquiers, sociétés de gestion, entreprises et personnalités politiques ont notamment planché sur les moyens de répondre aux besoins de financement des entreprises françaises. Besoins qui devraient augmenter de 100 milliards d'euros par an d'ici à 2020, selon Paris Europlace - l'association chargée de promouvoir la place financière de Paris -, au fur et à mesure que la croissance économique reviendra et que le poids grandissant des réglementations diminuera la capacité des banques à accorder des crédits. Or, s'il existe une manne sous-utilisée pour le financement de l'économie française, c'est bien celle de l'épargne des ménages.

 A la fin du premier trimestre, le taux d'épargne des Français s'élevait à 15,9% de leur revenu brut disponible, son plus haut niveau depuis 2009, selon la Banque de France. Un taux qui place les Français parmi les premiers épargnants d'Europe, juste derrière les Allemands. De fait, le taux d'épargne moyen dans la zone euro est de 13% seulement, et il est inférieur à 6% au Royaume-Uni. Mais cet énorme bas de laine de 13.600 milliards d'euros n'est investi qu'à hauteur de 7% en actions, les Français affichant une nette préférence pour l'immobilier, qui représente les deux tiers de leurs placements, l'assurance-vie (13%) et les livrets réglementés (10%), selon une récente enquête de la société de gestion Blackrock.

 Les Français n'aiment pas les placements risqués

 Il faut dire que, quinze ans après l'éclatement de la bulle Internet et six ans après la crise financière de 2008, plus de la moitié (52%) des Français se disent encore prudents par rapport à l'investissement en actions, invoquant notamment la peur du risque et le manque de visibilité, d'après un sondage publié par Opinionway mi-octobre. Surtout, "les Français épargnent avant tout pour protéger leur capital, pas pour le faire fructifier", décrypte Eric Wohleber, directeur général de Blackrock en France, dans une récente interview au JDD, soulignant le "grand pessimisme (des Français) par rapport à l'avenir, (leur) aversion au risque et (leur) manque de culture financière."

 En tout état de cause, mercredi 1er décembre, Michel Sapin a estimé que le Comité Place de Paris 2020 avait "beaucoup avancé sur ce point" de la mobilisation de l'épargne des Français pour le financement de l'économie réelle. Et le ministre des Finances de rappeler que tous les textes réglementaires nécessaires à la commercialisation des produits Eurocroissance et Vie-génération - de nouveaux contrats d'assurance-vie destinés à inciter les assureurs à se porter davantage vers les actifs d'entreprise - avaient été publiés en septembre. Ce sont au moins 50 milliards d'euros qui devraient pouvoir être réalloués des fonds euros vers les fonds Eurocroissance d'ici 5 ans, estime Bercy.

 Le précédent du PEA-PME n'incite pas à l'optimisme

 Michel Sapin a également évoqué la mise en place, il y a un peu plus d'un an, des fonds de prêts à l'économie (FPE), qui permettent à des acteurs non bancaires - au premier rang desquels les assureurs - de financer les PME et les ETI. "Depuis le lancement de la réforme, entre 5 et 10 milliards d'euros ont pu être prêtés aux entreprises, grâce à ce dispositif", se félicite Bercy. Des montants d'autant plus appelés à croître qu'un décret, qui sera publié d'ici à la fin de l'année, élargira les FPE aux mutuelles et aux instituts de prévoyance. C'est également d'ici à la fin 2014 que sera effective la modification des règles d'investissement de l'Erafp, le fonds de retraite de la fonction publique, qui pourra ainsi investir en actions 5 milliards d'euros supplémentaires d'ici à 2020.

 A quoi s'ajoutera une meilleure orientation de l'épargne salariale vers le financement de l'économie, le Copiesas (conseil d'orientation de la participation, de l'intéressement, de l'épargne salariale et de l'actionnariat des salariés) - dans ses recommandations remises au gouvernement le 26 novembre - suggérant notamment d'étendre les dispositifs d'épargne salariale aux PME et aux TPE. Mais cet arsenal de mesures en faveur d'une meilleure allocation de l'épargne des Français vers le financement des entreprises sera-t-il efficace ? Les débuts pour le moins mitigés du PEA-PME, lancé cette année, permettent d'en douter.

Christine Lejoux

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaires 40
à écrit le 13/12/2014 à 10:26
Signaler
Avec une fiscalité confiscatoire, seuls les naïfs croient encore aux placements miracles.

à écrit le 06/12/2014 à 8:29
Signaler
Financer la spéculation internationale ? Non merci ! Moi, c'est les livrets règlementés, l'immobilier, les grands emprunts...

le 07/12/2014 à 15:21
Signaler
En somme les bulles obligataires et les déficits publics des états...

à écrit le 04/12/2014 à 0:15
Signaler
Pourtant, ils prennent de gros risques sur l'obligataire via l'assurance vie, par remontée des taux et défauts de paiements.

à écrit le 03/12/2014 à 18:07
Signaler
Les sociétés ne souhaitent pas investir dans le contexte actuel; les plans de licenciements sont leur projet à court terme. le rachat d'actions pour "placer" leur liquidité; Faire appel aux actionnaires?? D'ailleurs l'arrosage de la BCE ne se dirige ...

à écrit le 03/12/2014 à 17:34
Signaler
Ah bon ? Il y a encore des épargnants en France ? Il y a bien longtemps que mon livret A ne contient plus aucune noisette.

le 04/12/2014 à 8:25
Signaler
"Il y a bien longtemps que mon livret A ne contient plus aucune noisette. " : 6000 milliards sur les assurances vies.

le 05/12/2014 à 12:28
Signaler
il y a noisettes et noisettes! il y a des gens qui n'ont que 10 000 eur comme seuls biens sur les assurances vies, vous allez trouver sûrement très important...! non? !par rapport à ceux qui ont des fortunes! faut relativiser !

à écrit le 03/12/2014 à 16:43
Signaler
Reorienter l'economie ? Pour quoi faire ? Pour que cet argent soit encore detourné par nos grands argentiers et ceux qui les manipulent ? Les entrprises du Cac 40 par Exemple dont le groupe Total fait partie et......ne paient aucun impot en France ! ...

à écrit le 03/12/2014 à 15:03
Signaler
"Mais c’est compter sans l’aversion au risque profondément enracinée chez les épargnants français." D'un autre côté les français sont les premiers à prendre des risques inconsidérés car ils sont les premiers producteurs de chômeurs d'Europe (cf. n...

à écrit le 03/12/2014 à 14:45
Signaler
C'est le libéralisme monétaire incontrôlé de l'Université de chicago et du groupe de pression Suisse du "Mont pellerin" : l'épargne sert à spéculer et non à faire tourner l'économie. (et merci les impôts en cas de perte)

à écrit le 03/12/2014 à 14:00
Signaler
du autre cote, on peut pas se plaindre que les francais refusent d investir dans les entreprises francaises et tout faire pour les inciter a investir dans le parpaing (genre scellier, APL/PTZ pour solvabiliser artificiellement la demande) ...

à écrit le 03/12/2014 à 13:55
Signaler
les resultats prouvent q'il ne faut surtout pas ecouter nos politiques sur les placements regardont dejà leurs conseils placer des fonds sur des entreprises dont 50% coulent dans les trois premieres années §§§§!!!!

à écrit le 03/12/2014 à 12:30
Signaler
L'equation est simple: Si vous investissez dans une PME et que vous perdez tout, il ne vous reste rien. Si vous gagnez un max, l'état vous en prend 75%. Vous comprenez pourquoi le ministre veut que vous preniez des risques? cqfd

le 03/12/2014 à 13:03
Signaler
OUI !!!!! CQFD + UN

le 03/12/2014 à 16:12
Signaler
Et comment font nos voisins européens? Vous pouvez aussi acheter des actions européennes non soumises à la TTF et défiscalisables au sein d'un PEA ou soumises à crédit d'impôt selon la convention fiscale en vigueur au sein d'un compte titre. Je déplo...

le 03/12/2014 à 18:19
Signaler
il a raison Michel..mais, ca , ça oriente notre épargne vers des entreprises étrangères. Parce-que oui, finalement , c'est peut être plus simple que d’investir ici...

à écrit le 03/12/2014 à 12:13
Signaler
Et voilà le résultat d'une profonde culture chrétienne en France... La peur paranoïaque de perdre....

le 03/12/2014 à 12:33
Signaler
votre générosité semble sans limite...

le 03/12/2014 à 13:04
Signaler
si vous avez trop de fric, allez y, ne vous genez surtout PAS !!!

le 03/12/2014 à 13:16
Signaler
Permettez-moi de perdre vos économies svp

le 03/12/2014 à 13:34
Signaler
votre argent doit sûrement dormir aux Iles Caïmen! faites donc preuve de compréhension et générosité.....une BA, c'est gratifiant !

à écrit le 03/12/2014 à 11:37
Signaler
Il eu fallu de ne pas les dégoûter d'y investir par une fiscalité confiscatoire. Comme si le risque n'existait pas et que 100% des actions étaient gagnantes. Déjà revenir à la fiscalité des années 90 sur les actifs risqués, permettrait de les rendre ...

à écrit le 03/12/2014 à 11:35
Signaler
Que ce monsieur Michel Sapin commence en réorientant son épargne vers les entreprises! Pas un ministre ou même Président ne le fait: ils ne sont pas fous!

à écrit le 03/12/2014 à 11:27
Signaler
Pas un de ces socialistes fonctionnaires rentiers de l'état ne met un sou dans l'économie comme l'indiquent leurs déclarations de patrimoine. De plus ils méprisent et punissent les actionnaires. Ces gens sont écœurants pour ne pas dire révoltants. On...

le 03/12/2014 à 13:05
Signaler
SUREMENT PAS! !!!!!!ils sont à VOMIR!

à écrit le 03/12/2014 à 11:17
Signaler
UNE HONTE! que ce gouvernement !!!! il y a de quoi avoir de la haine, carrément qui monte.....un scandale que ces déductions là, ils n'ont qu'à mettre leur patrimoine (sénateurs et députés qui ne veulent aussi <RIEN lâcher !! ), investir eux, qui son...

à écrit le 03/12/2014 à 11:16
Signaler
Les Français ont peut-être une aversion aux risques, ils ont surtout une aversion au matraquage fiscal de l'épargne, donc des investissement dans l'économie. Après 30 ans de lavage de cerveau en disant c'est mal d'avoir des actions,donc d'investir, d...

à écrit le 03/12/2014 à 11:13
Signaler
L'état frileux lui même demande aux Français qui SE PRIVENT, de prendre des risques?! aqvec ce qu'il nous ponctionne, planque et se "sert", il n'a qu à montrer l'exemple, PLUS RICHE que NOUS!!! il n'a qu'à se demmerder !

à écrit le 03/12/2014 à 10:07
Signaler
Puisque l'état fait tant confiance aux entreprises, pourquoi ne créé-t-il pas une banque d'affaire qui leur prête de l'argent ? L'état demande aux citoyens de prendre des risques qu'il ne sait pas prendre lui-même.

à écrit le 03/12/2014 à 10:04
Signaler
Rien ne garanti que notre épargne sera investi en France. Beaucoup d'entreprises Françaises ont préféré investir dans les pays émergeant pour profiter d'avantages fiscaux, d'évasion fiscale et de retour sur investissement énormes. Pourquoi ne pas réo...

le 03/12/2014 à 18:23
Signaler
beaucoup d'entreprises ont investi vers les pays émergents , parce que c’est la que sont les clients...et c’est normal. on est en France à 100% de taux d’équipement sur pas mal de biens..donc , on en achète plus..donc il se vendent ailleurs. et on l...

à écrit le 03/12/2014 à 9:03
Signaler
Vous mettez votre épargne sur des investissements pour quel rendement si ça reussit c'est l état qui vous pompe le bénéfice de l'opération en impôts monsieur le ministre

le 05/12/2014 à 16:02
Signaler
Vous avez tout compris Carlier : Etat = pompe à fric ( surtout socialiste)

à écrit le 03/12/2014 à 8:09
Signaler
IL n'y a pas que les actions, il y a aussi les obligations d'entreprises. Et c'est bien dommage qu'il n'y ait plus de bourse pour çà. Mais ce serait retirer aux banques une activité juteuse, alors c'est pas possible. Surtout pour les politiciens qu'o...

à écrit le 03/12/2014 à 8:03
Signaler
Ou comment délocaliser l'épargne des français! Tant que la confiance, en la France, n'est pas revenue, les citoyens ne mordrons pas à l'hameçon!

à écrit le 03/12/2014 à 8:03
Signaler
Pour se faire plumer comme avec les actions de Lets gowex et les coupables de la fraude vivent toujours en liberté sans aucun problème avec la justice Espagnole non merci j'ai déjà donné....

à écrit le 03/12/2014 à 7:46
Signaler
Quand on voit le nombre de faillites d'entreprises par suite de réglementations délirantes et de fiscalite confiscatoire, on ne peut qu'être prudent sur l'achat d'actions...

le 03/12/2014 à 13:05
Signaler
Investir dans sa société ses primes et plus encore car on croit à son entreprise, c'est bien, malheureusement la déception est grande lorsque vous perdez pratiquement tout votre capital. Vous avez donné, normal qu'on devienne frileux pour investir ...

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.