BNP Paribas voit grand dans les paiements en Europe

Le groupe bancaire revendique son statut d’acteur clé des paiements en Europe après avoir lourdement investi ces dernières années. Et annonce avoir atteint son objectif de 600 millions d’euros de revenus additionnels dans les paiements avec deux ans d’avance, soit un chiffre d’affaires de l’ordre de 3 milliards d’euros en 2023. Pour la banque, les paiements sont un métier très rentable.
BNP Paribas devrait relever ses objectifs à 2025 en début d'année dans le domaine des paiements.
BNP Paribas devrait relever ses objectifs à 2025 en début d'année dans le domaine des paiements. (Crédits : BENOIT TESSIER)

BNP Paribas veut être un acteur européen de premier plan dans le domaine des paiements et il tient à le faire savoir. Longtemps perçu comme un centre de coût et non de profit, comme une simple commodité quasi gratuite, sans grande valeur ajoutée, le paiement retrouve ses lettres de noblesse avec la révolution du commerce en ligne, et la croissance rapide de nouveaux acteurs, comme PayPal, Stripe, Adyen ou Checkout.com.

« Les paiements, c'est rentable, et même très rentable », a tenu à rappeler Thierry Laborde, directeur général délégué de BNP Paribas, en charge des activités Corporate & Retail du groupe, lors d'une journée de presse organisée à Bruxelles, avec tout un aéropage de responsables métiers ou IT.

Priorité stratégique

Mieux, alors que beaucoup de banques européennes ont déserté tout ou partie de la chaîne de valeur des paiements ces dernières années - les banques italiennes ont par exemple vendu leur scheme domestique de cartes bancaires (schéma qui fixe de modalités de fonctionnement, NDLR) à un fonds d'investissement - BNP Paribas « n'a jamais rien abandonné », insiste son dirigeant. Les paiements sont même une « priorité stratégique transversale » dans le plan GTS 2025 du groupe. Un positionnement qui n'est cependant pas forcément évident, ni surtout très « visible ». D'où cet exercice d'explication de texte.

Le groupe met ainsi en avant sa présence dans « l'acquisition » (permettre au commerçant d'accepter un paiement de toute nature), avec des volumes qui devrait progresser de 65 % sur la période 2021-2025. La banque vient même de remporter un important appel d'offres pour équiper de modules de paiement l'application Teams de Microsoft. Elle a même développé une marque commerciale unique (Axepta) et finance une filiale, créée ex nihilo, « en mode start-up », Panto, qui ambitionne, face à un Stripe, ou bien, en France, face à un MangoPay, d'être un leader européen dans l'acquisition pour compte tiers pour les « marketplaces » et les franchisés.

Quatre usines européennes

BNP Paribas est bien sûr un acteur dans « l'émission » de cartes de bancaires et n'a pas hésité à nouer un partenariat avec le groupe bancaire mutualiste BCPE, premier émetteur de cartes Visa en France. Il s'agit pour le groupe de progresser dans ce domaine de 45 % sur 2021-2025, en comptant renforcer l'usage des cartes, via notamment le cash back, mais aussi de multiplier les canaux de diffusion, via notamment sa filiale Nickel, qui propose des services base de bancaires chez les buralistes en France et vient de se lancer en Allemagne (tout en testant une diversification vers un livret d'épargne et le crédit à la consommation).

Lire aussi« Notre solution est une alternative à la carte bancaire » (Martina Weimert, directrice générale d'EPI)

Enfin, et c'est le grand sujet du moment, BNP Paribas veut être à la pointe du paiement instantané, une petite révolution poussée par la Commission européenne, et dont les volumes de transactions explosent. Ils devraient être multipliés par dix d'ici 2025. Sans doute moins connu, mais très culture « BNP », la banque est également actionnaire de plusieurs grandes infrastructures de paiement, comme STET en France ou EBA Clearing, des systèmes de compensation interbancaire, et de schemes cartes domestiques en France et en Belgique.

Le tout repose sur quatre usines dédiées (dont trois se trouvent en Belgique), « complètement européennes et complètement uniques », et dans lesquelles la banque « a beaucoup investi ces cinq dernières années », précise Thierry Laborde, notamment en termes de sécurité sur un cloud privé (en partenariat avec IBM).

Deux ans d'avance sur les objectifs

Pour Thierry Laborde, les paiements présentent trois avantages pour une banque : une connaissance intime du client, une source de revenus récurrente et un moyen de stabiliser les dépôts, qui rapportent désormais 4 % à la banque et permettent de conforter les ratios de liquidités.

C'est sans doute dans le domaine de la data que les perspectives pourraient être les plus prometteuses, alors que les commissions sur transactions sont appelées à se réduire, (voire tendre parfois vers la gratuité, comme le paiement instantané pour les particuliers). Ces services additionnels sont notamment au cœur du futur wallet européen wero, développé par l'initiative européenne EPI, soutenue par les banques françaises, allemandes, néerlandaises et belges.

Une approche industrielle, garante de la fiabilité des systèmes (ce qui n'était pas forcément le marque de fabrique de la banque il y a quelques années), une ambition européenne et une présence sur toute la chaîne de valeur, voilà les axes stratégiques de BNP Paribas.

Le groupe a indiqué avoir deux ans d'avance sur son plan initial en termes de revenus, avec une hausse des revenus de 600 millions d'euros par rapport à 2021, un objectif qui sera atteint à la fin 2023, au lieu de 2025, soit un chiffre d'affaires de l'ordre de 3 milliards d'euros cette année pour les activités de paiements. Du coup, l'objectif 2025 sera revu à la hausse lors de la présentation des prochains résultats annuels début 2024.

Euro numérique : BNP PARIBAS propose un plafond à 500 euros

Les banques ne sont pas allantes sur le projet d'euro numérique souhaité par la Banque centrale européenne. Loin s'en faut. « L'émission d'une monnaie numérique est une décision souveraine d'un banquier central. Les banquiers commerciaux ne sont donc ni pour ni contre », estime prudemment Thierry Laborde, directeur général délégué de BNP Paribas. Mais, ajoute-t-il aussitôt, « il faut que cela fonctionne, et pour que cela fonctionne, il faut deux conditions : ne pas assécher la liquidité bancaire et choisir la bonne infrastructure.

Les banques commerciales redoutent en effet que l'euro numérique « aspire » tout ou partie des dépôts d'un compte bancaire vers un compte « banque centrale ». D'où l'idée d'instaurer un plafond sur le compte « banque centrale ».  Les discussions font donc rage pour définir ce plafond. La BCE propose pour l'instant 3.000 euros.

C'est beaucoup trop, estime Thierry Laborde. « Qui a aujourd'hui 3.000 euros de liquide dans sa poche ? », interroge-t-il avant d'avancer que « la bonne enveloppe serait de l'ordre de 500 euros alors même que 99% des transactions sont inférieurs à 900 euros ». Et sur la question des infrastructures, Thierry Laborde souhaite que l'euro numérique utilise celles qui existent déjà et ont largement fait la preuve de leur fiabilité. Même sur le wallet qui devrait être utilisé par les ménages pour payer en euro numérique, le banquier estime que le projet interbancaire EPI ferait très bien l'affaire. D'autant que EPI a mené avec un succès un test sur l'euro numérique en magasin. « Le wallet wero qui sera présent dans cinq pays et demain dans d'autres pays - nous travaillons à convaincre nos amis italiens - sera bien utile pour assurer le succès de l'euro numérique car il peut très fonctionner avec une poche pour l'euro commercial et une poche avec l'euro numérique », explique le responsable bancaire.

« Le paiement sera de plus en plus une commodité quasi-gratuite. La transaction n'intéresse pas le commerçant. Ce qu'il l'intéresse c'est le service autour du paiement, les garanties, la sécurité, la rapidité, les programmes de fidélisation... Et cela à un prix que le commerçant et le consommateur sont prêts à accepter dans une limite raisonnable. Donc l'avenir des revenus sur les paiements passera par les services. Et, franchement, je ne vois pas la BCE inventer, proposer de nouveaux services. La BCE travaille sur une solution de paiement. Mais je doute fort que ce soit une solution à valeur ajoutée en termes de services ! », estime de son côté Martina Weimert, directrice générale d'EPI.

Sujets les + lus

|

Sujets les + commentés

Commentaires 5
à écrit le 08/10/2023 à 9:47
Signaler
Mais quel ennuie cet économie c'est pas croyable, n'y a t'il donc plus que des zombies ?

à écrit le 07/10/2023 à 19:39
Signaler
Oh le scoup, Bruno Le Maire semble s'être positionné dans les starting blocks pour nous préparer une crise du "subprime à la française" dans quelques années: [Face à l’augmentation des taux d’intérêt, nous élargirons l’accès aux prêts à taux zéro (PT...

à écrit le 07/10/2023 à 10:56
Signaler
Mon petit-fils de cinq ans vient de me poser cette question: "- Dis-moi papy, que va-t-il se passer sur la planète et au niveau de l'appel de marge, alors que le monde est désormais confronté à des pertes pouvant atteindre 70 000 milliards $". Que do...

à écrit le 07/10/2023 à 8:39
Signaler
Mais quel ennuie cet économie c'est pas croyable, n'y a t'il donc plus que des zombies ?

le 07/10/2023 à 16:59
Signaler
Si cela vous ennuie n'y prêtez pas attention c'est simple.

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.