Autorité des marchés financiers (AMF) : un président par intérim pour remplacer Robert Ophèle

L'actuel président de l’institution en charge de la supervision des marchés financiers doit quitter ses fonctions le 31 juillet, sans que Bercy ait encore trouvé un successeur. Robert Ophèle a su accompagner les innovations sur les marchés financiers, sans réellement incarner une institution qui doit faire face à de nombreux défis.
Durant son mandat de cinq ans à la tête de l'AMF, Marc Ophèle aura su accompagner les grandes innovations sur les marchés financiers.
Durant son mandat de cinq ans à la tête de l'AMF, Marc Ophèle aura su accompagner les grandes innovations sur les marchés financiers. (Crédits : Banque de France)

Finalement, Bercy n'aura pas trouvé l'oiseau rare dans les temps. L'Autorité des marchés financiers (AMF), autrement dit le « gendarme » de la Bourse, vient en effet d'annoncer la nomination d'un président par intérim pour remplacer Marc Ophèle dont le mandat arrive à échéance le 31 juillet. Il s'agit de Jean-Claude Hassan, conseiller d'État, membre du collège de l'AMF et ancien membre du collège des sanctions de l'AMF de 2008 à 2013.

C'est en effet d'une façon un peu cavalière pour une institution aussi prestigieuse que l'AMF que Bercy avait lancé, la semaine dernière, un appel à candidature et les candidats ont jusqu'au 26 août pour déposer leurs dossiers !

Pourtant, le départ de Marc Ophèle était bien prévu de longue date : il a pris la présidence de l'AMF le 1er août 2017 pour un mandat non renouvelable de cinq ans, conformément au code monétaire et financier. Si l'appel à candidature marque un progrès en termes de transparence (c'était déjà le cas en 2017), le lancement si tardif du processus étonne. Comme si l'AMF comptait pour pas grand-chose.

C'est une différence majeure avec ce qui peut se passer au Royaume-Uni ou aux Etats-Unis où le poste est à la fois très convoité et minutieusement pourvu par les pouvoirs publics. En France, le poste est bien moins bien rémunéré et il est difficile de trouver une personnalité exempte de tout conflit d'intérêt. Le milieu de la finance reste un petit monde.

A chaque départ, l'heure est au bilan. Celui de Marc Ophèle est mitigé. A son actif, il a su incontestablement ouvrir l'institution à l'extérieur. Longtemps engoncée dans une culture du secret, sans doute héritée de la lointaine Commission des opérations de bourse (COB), l'AMF a eu longtemps cette réputation de l'entre-soi dans la haute fonction publique. Une posture de plus en plus difficile à défendre, surtout depuis la crise financière de 2008. Aujourd'hui, l'AMF communique et elle communique mieux. Et surtout, elle a pu revendiquer davantage d'indépendance face au politique ou au monde des affaires, que ses prédécesseurs, Jean-Pierre Jouyet ou Gérard Rameix.

Moteur de l'innovation

Autre point positif, l'AMF a su accompagner, voire anticiper, toutes les grandes innovations sur les marchés financiers, des émissions de jetons numériques (ICO) à l'encadrement des crypoactifs, en passant par les SPAC. Ce qui dénote une forme de pragmatisme qui a beaucoup apporté à l'attractivité de la place de Paris.

Ce qui n'a pas empêché quelques figures brillantes de l'AMF, comme Stéphanie Cabossioras, de quitter récemment le navire pour tenter l'aventure du privé. Le président est également un homme de dossiers, particulièrement ceux portant sur les sujets européens, les plus épineux. Le superviseur a notamment pris à bras le corps la question de l'ESG, quitte à le porter au niveau européen. Enfin, la commission des sanctions a pris la mesure de son rôle en appliquant des amendes de plus en plus lourdes, même si ce sont le souvent des petits acteurs de la place qui en font les frais.

Ce qui a sans doute manqué à Marc Ophèle, c'est un certain charisme, une autorité naturelle, qui aurait pu mieux incarner l'AMF parmi les grands régulateurs à la fois respectés et redoutés, à l'image d'un Gary Gensler à la tête de la SEC à New-York. Même s'il a su constituer avec Benoît de Juvigny, secrétaire général de l'AMF, un tandem complémentaire, à l'un, les aspects techniques, à l'autre, la communication.

L'AMF manque encore de stature, notamment internationale, pour faire porter toute sa voix dans les instances européennes de régulation. Le chantier de l'Union des marchés de capitaux est encore en jachère et seuls des régulateurs audacieux pourraient faire avancer les choses. Mais un mandat de cinq ans est peut-être trop court pour réussir à réellement s'imposer.

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