Bourse : les marchés actions arrivent sur un terrain miné en 2024

Après une année 2023 record, les marchés actions connaissent un début d'année plus difficile. Simple respiration du marché ou retournement de tendance, ce sont les résultats du quatrième trimestre, dont la publication débute cette semaine aux Etats-Unis, qui pourraient donner le ton sur les marchés dans les prochaines semaines.
Maxime Heuze
Les déceptions lors des résultats du quatrième trimestre pourraient entrainer de fortes baisses des actions.
Les déceptions lors des résultats du quatrième trimestre pourraient entrainer de fortes baisses des actions. (Crédits : Kai Pfaffenbach)

La saison des résultats des entreprises du quatrième trimestre de l'année 2023, qui débute cette semaine aux Etats-Unis par les banques, va être scrutée par les investisseurs, encore sous le coup de l'incroyable rallye de fin d'année dernière. Pour l'heure, le consensus, relevé par London Stock Exchange Group (LSEG), table sur une hausse de 11% des bénéfices estimés des entreprises de l'indice américain S&P 500, après une hausse modérée de 3,1% en 2023.

Cet optimisme n'est pas sans danger. « Il ne faudra pas beaucoup de mauvaises nouvelles pour qu'il y ait des prises de bénéfices des investisseurs », prévient Thibault François, président de la société de gestion Fastea Capital. Lors de la publication du troisième trimestre, certaines sociétés ont fait les frais de la nervosité de la Bourse suite à des annonces décevantes. Des géants comme Tesla ont pu ainsi perdre près de 10 % en une séance quand d'autres, comme le champion européen des paiements Worldline, tout juste entré dans l'indice CAC 40, a chuté de plus de 45% en quelques heures. Aujourd'hui, c'est au tour Samsung de prévenir les marchés d'une baisse d'un tiers de son résultat opérationnel au quatrième trimestre.

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Cela renvoie à la question de la valorisation du marché, notamment américain. Selon LSEG, le S&P 500 se traite près de 20 fois les bénéfices attendus sur les douze prochains mois, contre une moyenne historique de 15,6 fois. Le S&P 500 a gagné il est vrai 24 % l'an dernier alors que l'indice des valeurs technologiques, le Nasdaq, a bondi de plus de 43%. Les indices européens, qui ont atteint de nouveaux records, font presque pâle figure, avec par exemple une hausse de 16,5 % du CAC 40.

C'est bien le mouvement de désinflation et l'anticipation d'une baisse des taux directeurs en 2024 qui a tiré les marchés vers le haut. L'espoir d'une baisse des taux redonne de l'oxygène pour les entreprises endettées (valeurs cycliques) et donne mécaniquement un coup de pouce aux valeurs de croissance. Bref, une baisse de taux est toujours positive pour les actifs risqués comme les actions.

Une concentration excessive de la performance

Grandes gagnantes de 2023, les 7 « magnifiques » (Nvidia, Meta, Tesla, Apple, Amazon, Microsoft et Alphabet) qui « ont réalisé 100% de la hausse du Nasdaq », rappelle Thibault François, affichent maintenant des multiples de valorisation compris entre 20 (Meta) et 70 (Tesla).

« Nous constatons une rotation continue des performances des valeurs défensives de croissance de 2023, telles que les grandes entreprises technologiques et les Etats-Unis, vers les actifs plus cycliques qui ont sous-performé et sont plus fortement pondérés dans le reste du monde » avance Ben Laidler, stratégiste de marché chez eToro.

Selon ce dernier, 2024 pourrait donc être l'année des valeurs financières, de l'immobilier, des valeurs industrielles et des petites capitalisations, beaucoup moins chèrement valorisées et qui ont peu ou pas progressé l'an dernier.

Toutefois, « les géants technologiques disposent d'un cash gigantesque et sont donc capables d'effectuer d'importants rachats d'actions qui pourraient maintenir leurs cours », estime le président de Fastea Capital. D'autant que ces sept valeurs ne sont pas à mettre dans le même panier. « Nvidia est très chèrement valorisée, mais c'est aussi une machine à cash qui bénéficie de l'engouement autour de l'intelligence artificielle », rappelle de son côté Frederik Ducrozet, directeur de la recherche économique chez Pictet AM. Apple en revanche suscite plus de craintes, notamment pour son exposition jugée excessive à la Chine.

Le CAC 40 prometteur pour 2024

Du côté du CAC 40, les actions les plus chèrement valorisées, comme le luxe (Hermès, LVMH, Kering qui s'affichent toujours entre 20 et 40 fois les bénéfices, malgré la récente consolidation) ou encore l'armement (Dassault, Airbus et Safran entre 18 et 35 fois) sont toujours exposées aux risques de correction.

Néanmoins, l'indice parisien affiche une valorisation plus raisonnable -autour de 12 fois ses bénéfices- soit dans sa moyenne historique. Un argument de poids pour les investisseurs qui devraient « davantage se concentrer sur les valeurs les moins chères et les plus solides du secteur de la santé ou des utilities (qui regroupent les fournisseurs d'eau, d'électricité ou de gaz) », estime Frederik Ducrozet.

Tous les yeux sont rivés sur la baisse des taux

En dehors de la question de la valorisation des actions, les investisseurs seront encore et toujours influencés par la politique monétaire en 2024. Alors que les observateurs les plus optimistes pariaient sur une baisse des taux directeurs dès mars, les mauvais chiffres de l'inflation européenne en décembre et la résilience du marché américain éloignent un peu plus cette échéance. « Il est peu probable que nous assistions à une baisse avant juin », confiait Alexandre Hezez, stratégiste chez la Banque Richelieu à La Tribune le 5 janvier.

Avec ce changement de paradigme, « les investisseurs sont tentés de prendre une partie de leurs bénéfices (notamment sur les valeurs technologiques fortement valorisées, NDLR) et de réduire leur exposition au risque, face aux doutes sur le rythme de l'assouplissement monétaire », ajoute Antoine Fraysse-Soulier, responsable de l'analyse de marchés chez eToro.

Maxime Heuze

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Commentaire 1
à écrit le 11/01/2024 à 19:35
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Le marché est surévalué depuis des années avec des PER stratosphériques. Le retour sur terre pour beaucoup de secteurs d'activité risque d'être brutal.

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