« Il va falloir rebâtir un dispositif pour l'assurance emprunteur » (Maya Atig, directrice générale de la Fédération bancaire française)

BNP Paribas ouvre aujourd’hui le bal des résultats annuels des banques françaises. Sans surprise, ils seront excellents, portés par tous les métiers, y compris la banque de détail. Et la remontée des taux d’intérêt devrait offrir au secteur un nouveau tremplin de croissance. Comme une bonne nouvelle ne vient jamais seule, la Fédération bancaire française (FBF) publie des résultats plutôt flatteurs sur l’image des banques auprès des Français, deux ans après le début de la crise sanitaire. Ainsi, 87% du panel interrogé ont une bonne opinion de leur banque, un niveau qui se maintient depuis deux ans. Le rôle des banques dans l’économie est également plus ancré, notamment auprès des PME/TPE et des particuliers. Pour La Tribune, Maya Atig, directrice générale de la Fédération bancaire française (FBF), commente les principaux enseignements du baromètre.
Pour Maya Atig, directrice générale de la FBF, la prolongation des PGE n'est pas un besoin massif de l'économie.
Pour Maya Atig, directrice générale de la FBF, la prolongation des PGE n'est pas un besoin massif de l'économie. (Crédits : DR)

LA TRIBUNE- Alors que les banques françaises s'apprêtent à annoncer de très bons résultats 2021, comment, selon vous, la crise sanitaire a changé l'image des banques auprès des Français ?

MAYA ATIG- Notre enquête, réalisée auprès de 4 .000 Français pour la troisième année consécutive, montre qu'il y a eu une très forte confirmation, plus d'ailleurs qu'un bouleversement, de trois éléments. Le premier est que la proximité reste plus que jamais le vecteur de confiance. Le deuxième élément est la perception renforcée du rôle des banques dans l'économie et sa résilience pendant les crises. Enfin, l'enquête confirme que la banque idéale, pour une forte majorité des Français, repose à la fois sur une présence physique et une offre digitale, alors même que les usages digitaux augmentent très fortement.

La séquence parlementaire sur l'assurance emprunteur n'a pas été flatteuse pour l'image des banques. Quelles leçons tirez-vous de cette réforme finalement inattendue ?

Dans ce débat, il y a eu de multiples évolutions des positions. Le gouvernement avait soutenu au départ une résiliation annuelle avec des obligations renforcées, puis défendu une résiliation infra-annuelle en rejetant au Sénat la suppression du questionnaire de santé, avant finalement de l'accepter. Pour notre part, nous avons défendu une conviction depuis le début, que la démutualisation et l'éclatement de l'offre n'étaient pas de l'intérêt de la majorité des emprunteurs. Je rappelle que la concurrence joue déjà à plein et que 40 % des flux se portent désormais sur des assureurs alternatifs. Le Parlement a préféré rebattre complètement les cartes, évidemment c'est normal que le législateur tranche en dernier ressort  ; alors il va falloir rebâtir un dispositif qui permette de couvrir le risque le plus largement possible.

N'est-il pas paradoxal de souligner dans votre baromètre le rôle toujours prépondérant du conseiller et de l'agence dans les attentes des Français alors que le digital envahit notre quotidien, y compris au travail ?

Le digital s'est inscrit dans la relation bancaire depuis déjà une quinzaine d'années. Nous avons donc des outils digitaux qui sont aujourd'hui très performants. C'est même considéré comme un acquis et toutes les évolutions technologiques ne sont plus forcément perçues tant elles font partie du quotidien. Mais le conseiller agit toujours comme un recours à la fois dans les moments difficiles, comme la gestion des fraudes, et pour les projets de vie, les crédits notamment. Et, pendant la crise, cette interaction a joué un rôle primordial, notamment pour les professionnels, les TPE et les PME. Le conseiller conserve une très forte valeur.

Comment expliquez-vous que la bonne image des banques qui ressort de votre baromètre ne se retrouve pas toujours, loin s'en faut, dans les différents indicateurs de satisfaction, comme le Net Promoter Score (NPS), souvent négatifs pour les banques à réseau ?

Cela s'explique à mon sens par des méthodologies très différentes. Les indicateurs de satisfaction mesurent en effet les extrêmes, c'est-à-dire les clients qui ont une opinion excellente de leur banque et ceux qui, au contraire, ont une opinion très négative. L'opinion de la majorité n'est pas vraiment prise en compte. La logique du NPS est donc de mesurer l'excellence et permet à une enseigne de travailler sur ses points forts, ce qui fait la différence avec les autres, le plus souvent d'ailleurs sur des évènements particuliers, comme l'ouverture d'un compte ou la gestion d'une fraude ou d'un sinistre. Nous avons effectué un calcul similaire en interne sur la base de notre enquête. Il en ressort un NPS du conseiller ou de l'agence élevé, à 18 points. Sur la thématique du quotidien, ce score grimpe même à +20. Le point faible reste les sujets d'intérêt public (-1 point).

L'intérêt du baromètre réside avant tout dans les nuances pour identifier les points sur lesquels nous devons mieux communiquer. Nous voulons mieux faire comprendre que nos services sont performants et qu'ils évoluent sans cesse. Le soutien aux entreprises de toute taille est également un point sur lequel nous devons mieux expliquer alors que les banques françaises ont augmenté, l'an dernier, deux fois plus vite leurs crédits aux entreprises (hors PGE, prêts garantis par l'Etat) que la moyenne de la zone euro. Et que l'immense majorité des PME, près de 90% selon la Banque centrale européenne, obtiennent le crédit demandé. Il convient enfin d'expliquer que les ajustements des réseaux bancaires, qui s'adaptent simplement à la vie des Français, ne sont en rien une remise en cause de la proximité des services bancaires.

Êtes-vous inquiète face à la prochaine échéance de remboursement des PGE alors que les mesures de soutien prennent fin ?

Le PGE a été une démonstration de l'efficacité du système bancaire, surtout en période de crise. Et nous continuerons à cultiver cette preuve de proximité et d'agilité et rappeler que les banques peuvent être une solution. C'est pour cette raison notamment que nous avons signé un accord de place le 19 janvier dernier pour anticiper les éventuels problèmes de remboursement. Aujourd'hui, plus de la moitié des clients ont déjà remboursé en totalité ou en partie leur PGE, sans difficultés.

L'autre moitié devrait commencer à rembourser à partir de mai prochain. Et nous avons aucun signal d'alerte sur la capacité de remboursement pour la très grande majorité d'entre elles. Certaines entreprises vont avoir des difficultés, quelques milliers de dossiers au plus. Pour ces entreprises, les banques ont pris l'engagement de trouver des solutions, et éventuellement, de prolonger la durée de remboursement du PGE pour certaines TPE / PME en difficulté avérée, sous l'égide du Médiateur du Crédit. Mais cette prolongation n'est pas un besoin massif de l'économie française et le taux de défaut reste extrêmement bas.

Pourquoi les banques ont tant de mal à convaincre sur leurs engagements climatiques ?

Nous avons pour ambition d'être une solution pour le quotidien des Français mais aussi pour les grands défis qui sont devant nous. Sur le climat, il y a deux options. L'arrêt des financements des activités polluantes. C'est ce que nous avons fait pour le charbon thermique et les hydrocarbures non conventionnels, ce qui place les banques françaises en pointe sur ce sujet en Europe mais les acteurs concernés trouvent des financements ailleurs et l'efficacité de l'exclusion est difficile à mesurer, car notre économie mondiale consomme beaucoup d'énergie.

L'autre option est l'accompagnement : faut-il arrêter de distribuer un financement pour une voiture thermique ou un logement qui serait énergivore ? L'enjeu pour nous est de donner les moyens à nos clients d'effectuer leur transition énergétique. C'est ce que nous faisons avec le financement des énergies renouvelables mais aussi en construisant de nouveaux dispositifs pour les particuliers Nous planchons par exemple depuis deux ans pour simplifier les parcours d'accès aux aides à la rénovation. Des annonces seront faites dans le courant du mois.

Regrettez-vous parfois que le secteur bancaire ne soit toujours pas considéré comme un secteur stratégique. Vous sentez-vous soutenus par les pouvoirs publics en France ?

Les mentalités évoluent et la crise sanitaire a bien montré que le système bancaire était une partie de la solution et non pas un problème. Mais il y a encore des efforts à faire pour tirer les conséquences très concrètes de ce que veut dire être un secteur stratégique. L'an dernier, lors d'une audition très intéressante, les sénateurs ont voulu comprendre la différence entre les banques à réseau et des acteurs de paiement sur la banque au quotidien : d'un côté, il s'agit de 354.000 emplois et de services très larges et de l'autre, de quelques centaines d'emplois et d'outils ciblés. Les pouvoirs publics ont conscience des enjeux mais passer aux actes, surtout au niveau européen, est un travail de longue haleine.

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Commentaire 1
à écrit le 08/02/2022 à 18:20
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he oui, faudra arreter les strategies bancaires basees sur le fait que le consommateur ne fait pas de calcul actuariel, van tir, et autres....vendre un taux immobilier a 0.0000005% avec 15% de frais de dossier, 3% d'assurance emprunteur obligatoire, ...

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