Beaucoup de bruit pour rien ? La réunion du Haut conseil de stabilité financière (HCSF), ce mardi, n'a finalement pas fait bouger les lignes sur les conditions d'octroi du crédit immobilier. En décembre dernier, ce même HCSF, une instance créée après la crise financière de 2008 et placée sous l'autorité de Bercy pour veiller aux éventuels dérapages du secteur bancaire, avait annoncé, sous la pression des professionnels du crédit (courtiers et banques mutualistes), un assouplissement des règles qu'il avait imposé en décembre 2019 en pleine euphorie immobilière.
Le taux d'endettement maximum des ménages (calculé sur la base du TAEG, donc assurance emprunteur comprise) avait été ainsi porté à 35 % (au lieu de 33%) et la durée maximum d'un prêt à 27 ans (contre 25 ans), dans le cas d'un logement neuf. Une marge de manœuvre est cependant accordée aux banques, pour favoriser leurs clients primo-accédants, fixée à 20 % de la production totale qui peut donc s'affranchir de ces règles.
Bilan attendu au cours de l'été
En contrepartie de ce (léger) relâchement, le HCSF a indiqué son intention de graver dans le marbre ces nouvelles règles, selon des modalités qui restent à définir, avec des sanctions à la clé pour les banques contrevenantes.
Au final, la réunion de juin s'est contentée de remettre à plus tard la mise en place de ce second volet, le plus important pour le secteur bancaire, dans l'attente d'un bilan de ces recommandations qui devrait être publié « au cours de l'été ». C'est donc à partir de ce bilan que seront définies les modalités du passage de cette recommandation en norme macroprudentielle « juridiquement contraignante », et la nature des sanctions qui lui seront associées.
Pour l'heure, le HCSF se déclare « satisfait » de la mise en place de sa nouvelle recommandation, dont l'objectif est d'éviter à des ménages fragiles de se surendetter. La durée des prêts est notamment longue, même si le gros de la production se concentre toujours sur les durées comprises entre 20 et 25 ans.
La recommandation de janvier dernier n'a pas, en tout cas, refroidi le marché immobilier, alors que la production de crédit à l'habitat a atteint un niveau historique en avril et que le nombre de transactions est également sur des niveaux historiques en mars. Mais, de sources professionnelles, le contrôle sur pièces sera effectué auprès des banques qu'à partir du 1er juillet prochain.
Copier coller
C'est donc plutôt un ouf de soulagement qui prévaut du côté des professionnels. Certains courtiers redoutaient en effet un retour aux recommandations de 2019 compte tenu de la forte croissance de l'activité. Il s'agira en fait d'un simple « copier coller » de la recommandation de janvier. Et les banques ont réussi à gagner quelques mois avant de se voir imposer d'éventuelles sanctions.
La nature de ces sanctions est d'ailleurs une question délicate pour les pouvoirs publics. Comment justifier, en effet, des sanctions alors que Bercy ne cesse d'inciter les banques à relancer le financement de l'économie, dont le logement neuf est une composante importante ?
Et, est-il raisonnable d'imposer des sanctions sous la forme de nouvelles contraintes de fonds propres alors même que les banques devront absorber en 2022 le relèvement du taux du cousin de fonds propres contracyclique (maintenue à 0% aujourd'hui) et, surtout, en 2023, les nouvelles règles prudentielles de Bâle 3, particulièrement handicapantes pour le crédit immobilier ?
Face à ces questions délicates, le HCSF a donc décidé qu'il était urgent d'attendre. Et d'éviter, à tout prix, un éventuel coup de frein sur le crédit immobilier, alors que la demande n'a jamais été aussi forte et que les taux de crédit immobilier sont à de nouveaux planchers (1,07% en moyenne, selon Crédit Logement). La relance et la consommation de l'épargne accumulée restent la priorité des pouvoirs publics.
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