La Chine est un pays dirigé par le Parti communiste chinois, pour qui l'intérêt collectif prime sur l'intérêt individuel (et donc des actionnaires). Les investisseurs occidentaux, à l'aune de l'ouverture du marché chinois et de taux de croissance hors normes, ont eu tendance à l'oublier, même s'ils ont toujours appliqué une décote politique aux valeurs chinoises. Le gouvernement chinois, procède cependant, par touches successives, à un sévère rappel à l'ordre.
Lundi dernier, les actions chinoises ont sérieusement dévissé. Après la mise au pas du secteur de la Tech, c'est le puissant secteur de l'éducation qui a entraîné un vent de panique sur les places chinoises, mais également à Wall Street. Le week-end précédent, les autorités chinoises ont en effet déclaré qu'elles entendaient revoir en profondeur le modèle économique des groupes privés spécialisés dans l'éducation, qui ont prospéré ces dernières années. Selon la réforme envisagée, les entreprises privées dans l'éducation n'auront plus le droit de faire des bénéfices, de lever des capitaux ou de s'introduire en Bourse.
1.500 milliards de dollars partis en fumée
Du coup, des poids lourds du secteur, mais également de la cote, ont rapidement chuté sur les marchés, sans qu'aucune contrepartie ne vienne se porter acquéreur de ces valeurs devenues décotées. Ainsi, New Oriental Education & Technology a perdu près de la moitié de sa valeur et Koolearn plus d'un tiers. Au total, selon les données compilées par l'agence Bloomberg, les places financières chinoises ont perdu depuis jeudi quelque 1.500 milliards de dollars de capitalisation.
Face à l'ampleur de la baisse ; les autorités chinoises, via la presse officielle, ont tenté mercredi de rassurer les marchés. « Cette baisse est un ajustement structurel et il est peu probable que cette chute se poursuive », indique ainsi le très officiel quotidien Securities Daily, cité par l'AFP. « Le repli des Bourses est une mauvaise interprétation de la politique de Pékin », affirme un autre quotidien, Securities Times.
Prime de risque sur la Chine
Reste que cette nouvelle sortie des autorités chinoises sur le secteur de l'éducation commence à jeter un sérieux doute sur la sécurité des investissements dans les entreprises chinoises. Les investisseurs se demandent aujourd'hui quelle sera la prochaine cible de Pékin. Car aucun secteur ne semble désormais échapper à la (soudaine) volonté de réglementer manifestée par les pouvoirs publics. D'autant que l'attaque sur le secteur de l'éducation, qui pèse une centaine de milliards de dollars en Bourse, a été aussi soudaine qu'imprévue.
Cette reprise en main a débuté en novembre dernier, avec le report forcé de l'introduction en Bourse d'Ant Financial, la puissante filiale financière d'Alibaba, au motif que les activités financières de ce géant de Tech n'étaient pas régulées. Parallèlement, c'est le géant de l'immobilier Evergrande, très endetté, qui se trouvait dans le collimateur des autorités, qui conteste l'effet de levier du groupe. Enfin, Didi, le Uber chinois, s'est vu interdire l'utilisation de son application en Chine...quelques jours après son introduction en Bourse à Wall Street ! La encore, les autorités chinoises ne manquent pas d'arguments : il s'agit cette fois-ci de veiller à ce que Didi respecte le droit du travail !
Mais les investisseurs commencent à y voir surtout une volonté politique d'encadrer les groupes chinois dont la croissance soutenue et le succès à l'international pouvaient donner des idées d'indépendance à l'égard du pouvoir. La rivalité avec les Etats-Unis est également un élément de contexte important dans une compétition au leadership financier.
Mais à ce jeu, Pékin pourrait également perdre des plumes. L'Etat chinois tente en effet de généraliser un système de retraite et de favoriser l'essor des fonds mutuels, qui sont les principaux investisseurs de valeurs chinoises. Et, ces jours derniers, l'épargnant ou le retraité chinois a perdu beaucoup d'argent.
(Avec agences)
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