Paiement instantané : le projet paneuropéen EPI dans les starting-blocks pour un lancement en 2023

Après de longs mois de négociations et de travail, le « nouveau » projet EPI, recentré sur le paiement instantané et les attentes du commerce, travaille désormais sur son lancement dans plusieurs pays européens. Un premier cas d’usage de paiement P2P sera proposé d’ici la fin de l’année, aussitôt suivi d’une solution P2 Pro. EPI souhaite devenir le fer de lance du paiement instantané en Europe, un mode de paiement que les autorités européennes souhaitent d’ailleurs fortement promouvoir.
Le paiement instantané représente 15 % des virements en zone euro et 3% de l'ensemble des paiements.

C'est un soutien qui n'est pas passé inaperçu dans le monde de la monétique : dans un communiqué publié sur son site, la société EPI, en charge du projet de paiement paneuropéen, remercie la Commission européenne de tous ses efforts pour promouvoir le paiement instantané en Europe. Pour rappel, en octobre dernier, la Commission a publié une proposition législative visant à généraliser le paiement instantané dans toutes les banques à un prix jugé abordable pour le client, c'est-à-dire pas plus élevé que celui du virement classique, généralement gratuit depuis une application mobile ou un site web.

De fait, le paiement instantané est la nouvelle marotte des paiements, qui se déploie partout dans le monde. Il y aurait déjà une soixantaine de solutions hors d'Europe, comme Zelle aux Etats-Unis ou Pix Payment au Brésil. En Europe, plusieurs projets nationaux sont lancés mais ce nouveau mode de paiement ne décolle pas assez vite aux yeux des autorités. Il ne représente, selon les chiffres de la Commission, que 15 % des virements en Europe et 3% de tous les paiements. Le poids de la carte bancaire, mais aussi sa tarification pour l'initiateur du virement, expliquent ce retard à l'allumage. D'où l'initiative de la Commission européenne, toujours en discussion.

Fer de lance du paiement instantané

C'est plutôt une bonne nouvelle pour EPI, qui a complètement revisité son projet de départ (présenté en juillet 2020), en abandonnant son objectif (trop ?) ambitieux de créer un scheme carte de paiement paneuropéen face à la concurrence croissante des schemes américains Visa ou Mastercard, pour se recentrer sur la création d'un wallet (portefeuille numérique) de paiement instantané. En clair, EPI entend bien devenir le fer de lance du paiement instantané en Europe alors que les projets se multiplient dans le monde.

Lire aussiL'Europe impose aux banques le paiement instantané à petit prix

Pour autant, EPI souhaite que le règlement prenne en considération le besoin de créer des conditions économiques viables pour le paiement instantané, à l'instar de ce qui se fait pour la carte bancaire, avec la commission interchange, généralement payée par le commerçant. « Une solution de paiement durable a également besoin d'un modèle économique équitable, c'est pourquoi EPI invite la Commission à préserver ce principe au nom de toutes les parties », souligne ainsi le communiqué.

« Alors que les schemes cartes ont tout fait pour tuer le volet carte du projet EPI, l'Europe souhaite aujourd'hui promouvoir le paiement instantané comme enjeu de souveraineté. Elle met donc des conditions économiques très favorables, notamment pour contrer les cartes, mais ce faisant, la Commission risque de casser les projets comme EPI faute de modèle économiques viables », estime un expert de la monétique.

Premier cas d'usage avant la fin de l'année

Au passage, EPI soulève dans son communiqué d'autres sujets sensibles, qui ne relèvent pas d'ailleurs de la compétence de la Commission, mais de celle du régulateur, comme le volet de lutte contre la fraude et le blanchiment. « C'est un des principaux challenges du paiement instantané », confirme un professionnel des paiements. Aujourd'hui, avec les réglementations de contrôle, de trop nombreuses alertes infondées - les faux positifs- bloquent la transaction du paiement instantané - entre 8 et 15 % - ce qui est trop élevé pour assurer le succès du service auprès du public et des commerçants.

En attendant, EPI, bien silencieux depuis plus d'un an, devrait faire dans les semaines à venir plusieurs annonces sur l'avancée du projet et surtout le lancement opérationnel des premiers cas d'usage, notamment le P2P (paiement instantané peer-to-peer, entre deux comptes) avant la fin de l'année. La solution P2 Pro (paiement d'un professionnel) sera ensuite lancée en début d'année prochaine, ce qui permettra de payer sa baby sitter ou son plombier en instantané.

Techniquement prêt

Le projet reste complexe car il associe actuellement 12 banques (bientôt rejointes par les banques coopératives allemandes) et deux prestataires de paiement (Worldline et Nexi), qui ne sont pas tous au même niveau de maturité sur le paiement instantané.

Mais surtout le projet se veut le plus complet possible. Pas question en effet de se contenter de ce que la plupart des banques proposent déjà, c'est-à-dire un virement instantané de compte à compte. EPI souhaite ainsi faire non seulement du virement P2P, mais également du P2 Pro, du paiement instantané en ligne ou en magasin, et ce à grande échelle et en transfrontalier.

Sur la base des procédures techniques européennes SCT Inst (SEPA Instant Credit Transfer), qui permettent d'assurer les virements entre les banques, EPI a développé ses propres procédures (rulebook) pour traiter tous les aspects liés au commerce et les règles et obligations des différentes parties, notamment pour gérer les pré-autorisations, le paiement différé, la fraude ou le cash-back.

Commerce compatible

Pour assurer son succès dès le lancement, EPI a pris soin de coller aux besoins du marché, autrement dit, à répondre aux intérêts du commerçant, et surtout à faire « plus » de ce que propose actuellement la carte bancaire. D'où l'idée de proposer une solution « commerce ready » qui peut être facilement implémentée dans plusieurs pays simultanément.

« EPI a bien conscience que la carte va subsister encore longtemps mais il souhaite cependant proposer aux commerçants une vraie alternative en Europe basée sur le paiement instantané et qui sera implémentée de la même façon dans plusieurs pays », résume un expert très au fait du projet. Bref, pas question pour EPI de se lancer avant une solution très aboutie et associée à de nombreux services à valeur ajoutée qui intéressent le commerce.

Si la solution technique centrale EPI avance bien, encore faut-il la connecter auprès des banques partenaires du projet, notamment dans les applications mobiles. « Même si EPI livre toutes les briques, cela représente beaucoup de travail pour les banques », reconnaît un spécialiste monétique, d'autant qu'EPI veut donc faire des cas d'usage plus sophistiqués que la simple fonctionnalité d'émettre ou de demander un paiement.

EPI travaille cependant à la reprise de solutions nationales de paiement P2P, comme Paylib en France ou Payconiq qui fournit Bancontact en Belgique, pour aller plus vite. Différents scénarios sont toujours à l'étude mais sur le point d'aboutir.

L'objectif d'EPI est bien d'avoir un maximum de pays à l'affiche lors du lancement non seulement pour avoir une base de départ la plus importante possible mais aussi pour convaincre les banques européennes qui ne sont pas (ou plus) dans le projet de finalement le rejoindre.

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Commentaires 6
à écrit le 03/04/2023 à 18:19
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Bonjour, Personnellement, je suis pour favoriser le paiement instantané au seins de l'union européenne... Mais pas question de supprimer le numéraire (argent liquide, billet et autre)... Les banques sont bien sympathique, mais nous voulons être ma...

à écrit le 03/04/2023 à 13:49
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Rien de tel que l'argent liquide. Même pour ma carte restaurant j'ai désactivé le sans contact suite à une fraude L'Union Européenne veut anéantir l'argent liquide pour plus de contrôle c'est tout

à écrit le 03/04/2023 à 10:20
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Fortement promotionné par l' UE qui rêve déjà de contrôle et d' asservissement des populations via la monnaie numérique, promotionné comme sa guerre en Ukraine après son covide dans ses médias subventionnés ?..

à écrit le 03/04/2023 à 9:35
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J'en suis arrivé à être rétif à tout ce qui nous est imposé par l'empire.. je paye le max en liquide..

le 03/04/2023 à 13:50
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Pareil, cela permet de se rendre compte de ce que l'on dépense et évite les fraudes à la carte bancaire

à écrit le 03/04/2023 à 8:36
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Cela fonctionne en Thailande ici, vous avez le compte de la banque Thai et vous payez avec votre smartphone n'importe quoi, vous virez de l'argent à un ami, vous en recevez, je n'utilise plus du tout mes cartes visa ou master uniquement pour rapatri...

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