Le mariage CNP La Banque Postale sur les rails pour janvier 2020

La Caisse des Dépôts va devenir le premier actionnaire de la Poste qui va prendre le contrôle de la CNP pour la rapprocher de sa filiale et créer un puissant groupe de bancassurance public. L'opération donnera naissance à un grand pôle financier public au bilan de 1.000 milliards d'euros, qui devra être opérationnel dès janvier 2020 selon le souhait exprimé par Bercy. De nombreux détails restent à régler.
Delphine Cuny
Le directeur général de la Caisse des Dépôts, Eric Lombard, le ministre de l'Economie et des Finances Bruno Le Maire et le Pdg de La Poste Philippe Wahl.
Le directeur général de la Caisse des Dépôts, Eric Lombard, le ministre de l'Economie et des Finances Bruno Le Maire et le Pdg de La Poste Philippe Wahl. (Crédits : Bercy)

« Mettre la finance au service de l'intérêt général » : voilà l'ambitieux cap fixé par le ministre de l'Économie et des Finances, Bruno Le Maire, qui a présenté, ce mardi 2 juillet, le futur « grand pôle financier public » qui naîtra du bigbang capitalistique et industriel autour de la Poste, dont la Caisse des Dépôts va devenir le premier actionnaire, à la place de l'État, et dont la filiale La Banque Postale va prendre le contrôle de CNP Assurances. Le projet « Mandarine », qui doit hybrider l'établissement postal au logo jaune et la CDC au carré rouge, dont le ministre avait donné le coup d'envoi officiel le 30 août 2018, a connu son lot de pépins : départ du patron de la CNP, Frédéric Lavenir, contre sa perte d'autonomie, désaccords sur la valorisation, résistance des syndicats redoutant une privatisation, enlisement de la loi Pacte finalement promulguée en mai... « Les obstacles financiers, juridiques, culturels, politiques considérables ont tous été levés » s'est félicité Bruno Le Maire. « Dans les cartons depuis des années », plus d'une douzaine d'années, le projet d'intégrer la CNP à la Poste avait échoué jusqu'à ce que ce scénario prévoyant un vaste chamboule-tout de la sphère publique n'émerge il y a dix-huit mois.

« Nous créons un des outils financiers publics les plus puissants avec un bilan de plus de 1.000 milliards d'euros (240 pour La Banque Postale, 80 pour Bpifrance, 440 pour la CDC, 410 pour la CNP), ce qui est comparable à ce que l'on trouve au Japon ou en Chine » a déclaré le ministre lors d'une présentation ce mardi à Bercy. « Toutes les parties prenantes se sont mises d'accord, après d'infinies discussions, reconnaissons-le. »

Cet « outil financier », qui doit donner « aux territoires un accès simple et lisible à des financements publics » devra être opérationnel au premier trimestre l'an prochain et même « en janvier 2020 » a souhaité le ministre. « Tenez le calendrier, car l'attente est forte ! » a-t-il prévenu, faisant allusion à la crise des « Gilets jaunes. » En associant La Banque Postale, premier financeur des collectivités, à la Banque des territoires de la Caisse des Dépôts, le gouvernement espère « aider le développement du très haut débit et la revitalisation des territoires et ainsi lutter contre le désert français. »

Changement de dimension pour La Banque Postale

Tout n'est pas réglé pour autant. L'Autorité des marchés financiers (AMF) a donné son accord à la demande de dispense d'OPA sur CNP, mais il reste un certain nombre d'autorisations à obtenir, des autorités de concurrence française et européenne, de l'Autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR, adossée à la Banque de France) et de la BCE.

Au niveau de la CNP, le transfert de la participation de la CDC (actuellement 40,87% du capital) passera par la Poste avant d'arriver chez sa filiale bancaire et sa valeur dépendra de la capitalisation boursière de l'assureur au moment de l'opération (13,9 milliards d'euros au cours de lundi soir). Un nouveau pacte d'actionnaires devra être signé entre La Banque Postale et BPCE qui va rester au capital de CNP : la première aurait environ 62% du capital et le groupe mutualiste environ 16%.

« Le projet Mandarine va permettre à notre entreprise, qui entame son sixième siècle d'existence, de se transformer, de diversifier son modèle stratégique, et à La Banque Postale de compléter le sien en adoptant le modèle classique en France de la bancassurance » a fait valoir Philippe Wahl, le Pdg de la Poste.

Née en 2006, La Banque Postale va totalement changer de dimension en intégrant le numéro un français de l'assurance-vie. Son bilan va tripler de taille, ce qui va la placer parmi les 12 premiers groupes bancaires européens. Le rapprochement doit aussi servir à « améliorer les services financiers aux Français, aux PME et TPE, en complément de ce que fait la Bpi » a souligné Bruno Le Maire, mais aussi « aux Français les plus modestes ».

« Ce n'est pas une opération financière, c'est une opération industrielle » a insisté Eric Lombard, le directeur général de la Caisse des Dépôts, qui a souligné le caractère « extraordinairement complexe » du projet.

Il a promis une « gouvernance moderne, innovante, plus horizontale que verticale » ce mardi, mais aucun schéma précis n'a été arrêté.

« Comme dans un mariage, on est chacun de son côté ! » remarquait un haut cadre du camp des « postiers », montrant les équipes de CNP et la Caisse des Dépôts dans la rangée d'à côté, à Bercy. Optimiste, son voisin lui a répondu : « on va apprendre à se mélanger. »

Le ministre de l'Économie et des Finances n'a pas caché que ce vaste big bang devait « garantir l'avenir de la Poste », qui doit trouver des relais de croissance : il a souligné les « chiffres sans appel d'une baisse de 7% par an du volume de courrier, soit plus de 500 millions d'euros de chiffre d'affaires en moins chaque année. » Bruno Le Maire a cependant martelé que « la Poste reste et restera à 100% publique ». La Caisse des Dépôts aura 66% et l'État 34% à l'issue de l'opération.

Delphine Cuny

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Commentaires 3
à écrit le 03/07/2019 à 12:01
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« Tenez le calendrier, car l'attente est forte ! » a-t-il prévenu, faisant allusion à la crise des « Gilets jaunes. » Il ne me semble pas avoir vu cette demande chez les GJ qui sont mis apparemment à toute les sauces.

à écrit le 03/07/2019 à 7:50
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Très bonne idée. Comme ça, on transforme une des dernière banque financièrement saine, en une mégabanque ultra financiarisé la mettant en première ligne en cas de crise. Très, très bonne idée...

à écrit le 02/07/2019 à 18:13
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Adieu la CNP

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