Nicolas Hubert, DG de Milleis Banque : "Nous regardons clairement des projets d'acquisition"

La banque Milleis entame la fin de sa restructuration et espère atteindre la rentabilité en 2021 en gonflant significativement ses encours à 11 milliards d'euros au minimum. Elle étudie pour cela des partenariats et une stratégie de croissance externe, et notamment le dossier HSBC France. Interview de son directeur général, Nicolas Hubert.
Nicolas Hubert, directeur général de Milleis Banque.
Nicolas Hubert, directeur général de Milleis Banque. (Crédits : DR)

Ex-banque de détail de Barclays en France, Milleis Banque compte aujourd'hui 60.000 clients patrimoniaux dans l'Hexagone. Après une importante restructuration, elle entame désormais une phase de redéploiement, via notamment un partenariat avec l'assureur Groupama. Cette phase d'expansion pourrait se coupler d'une stratégie de croissance externe.

Selon plusieurs médias, son actionnaire, le fonds britannique AnaCap, a manifesté un intérêt pour la vente des activités de banque de détail de HSBC France, dont la clientèle premium et urbaine n'est pas si éloignée de celle de Milleis Banque. Toutefois, le franco-allemand Oddo BHF et le fonds américain Cerberus via My Money Bank, se montreraient aussi intéressés, ont dernièrement révélé Les Echos. Nicolas Hubert, directeur général de Milleis, revient sur ces chantiers et détaille l'impact de la crise sanitaire sur l'activité de la banque et sa transformation digitale.

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LA TRIBUNE - Barclays France a été cédée à AnaCap en août 2017 pour devenir Milleis Banque. Aujourd'hui, où en est votre restructuration et quel est votre positionnement ?

NICOLAS HUBERT - La banque est passée par une importante phase de restructuration qui s'est achevée avec une rupture conventionnelle concernant 340 salariés sur les 1.000 que comptait l'établissement. Aujourd'hui, nous sommes environ 700, dont 250 banquiers privés. Parmi eux, 70 ont été recrutés l'an dernier. Nous comptons 28 agences à Paris et dans les grandes villes françaises, notamment sur la Côte d'Azur. Nous avons ainsi fermé une quarantaine de points de vente sur les 70 que comptait notre réseau et environ la moitié de nos directeurs d'agence ont récemment été nommés à ces postes. Depuis 2017, nos encours sous gestion sont restés stables à environ 9 milliards d'euros. Milleis est une banque qui s'adresse exclusivement aux clients patrimoniaux à partir de 100.000 euros d'encours gérés chez nous. Nous avions, dans le périmètre du groupe, une société de gestion que nous avons cédée [en 2018, Ndlr] à Crédit Mutuel CIC AM et sommes désormais passés dans une architecture totalement ouverte. Nous proposons une soixantaine de fonds avec deux partenaires privilégiés : Crédit Mutuel CIC AM et Rothschild & Co. Nous proposons également des produits de banque au quotidien comme la carte bancaire, des produits d'assurance, et nous faisons du crédit immobilier. La banque privée reflète souvent l'image d'un monde poussiéreux. Nous voulons la rendre plus accessible en misant sur l'innovation.

Quelles sont vos ambitions de développement ?

Nous visons l'équilibre à la fin de l'année 2021. Pour l'atteindre, il nous faut gonfler nos encours, ce qui nous permettra d'accroître nos revenus sans générer beaucoup de coûts supplémentaires grâce aux mutualisations permises par notre future plateforme. Nous visons à cet horizon, 11 à 12 milliards d'euros d'encours. Une banque atteint la rentabilité lorsqu'elle passe le cap des 10 milliards d'euros d'encours, indique une récente étude de McKinsey. Aujourd'hui, nous évoluons encore sur le système d'information de Barclays, mais la migration sur une nouvelle plateforme informatique, prévue d'ici le début de l'année prochaine, nous permettra d'embarquer beaucoup plus de clients. Cette migration est un projet en cours depuis deux ans et qui nous coûte près de 50 millions d'euros.

Le fonds britannique AnaCap aurait manifesté son intérêt pour le rachat de la banque de détail de HSBC en France... Quels atouts présente HSBC pour une banque comme Milleis ?

Nous regardons clairement des projets d'acquisition. Ce qui est intéressant sur le dossier HSBC en France, c'est que l'établissement va passer exactement par les mêmes étapes par lesquelles nous sommes nous-mêmes passés. À savoir : la réorganisation de son réseau d'agences, la migration informatique et la nécessité de casser certains silos alors que de nombreuses fonctions sont centralisées à Londres.

En fin d'année, Milleis a annoncé être en discussion avec Orange Bank pour récupérer son portefeuille de clients patrimoniaux. Combien de clients sont concernés ? Où en est ce projet ? D'autres rapprochements ou partenariats sont-ils prévus ?

Nous avons transféré pendant le confinement une partie des clients patrimoniaux d'Orange Bank, mais nous ne communiquons pas de chiffre. Nous travaillons actuellement à un partenariat avec Groupama qui pourra proposer à ses assurés clients patrimoniaux nos produits de banque privée.

Quels ont été les impacts de la crise du coronavirus sur Milleis ?

Nous n'avons pas observé de fortes sorties d'encours, ni de mouvements d'arbitrage sur les contrats d'assurance vie, des unités de comptes vers les fonds en euros. Nos clients ont fait part d'un grand sang-froid. Il n'y a pas eu d'affolement. Ils ont, en revanche, souhaité être tenus informés de l'évolution des marchés pour savoir quand ils pouvaient commencer à réinvestir. Nous avons eu une très forte augmentation des ouvertures de comptes-titres pendant la crise. Et nous avons enregistré une hausse d'activité de 40% sur les titres vifs [qui permettent d'investir directement dans des actions françaises et européennes, Ndlr].

Concernant les crédits immobiliers, nous avons enregistré un arrêt brutal. Cette activité a été quasiment à l'arrêt pendant trois semaines, un mois. Toutefois, 80% de nos revenus proviennent des commissions de gestion. Donc, nous restons très peu exposés au marché des crédits immobiliers qui s'est fortement contracté.

La crise va-t-elle accélérer votre transformation digitale ?

Un directeur d'agence m'a confié pendant le confinement qu'il avait le sentiment que nous étions devenus une banque digitale car la quasi totalité de notre activité s'est faite à distance. 100% des banquiers étaient en télétravail et nous avons appelé 25.000 clients pour prendre de leurs nouvelles. Nous avons ensuite adapté et allégé nos processus de ventes. Aujourd'hui, 25% des ventes banque privée sont faites à distance. Un cabinet de conseil estime que ce pourcentage pourrait atteindre 80% en 2024. Il y a clairement une forte tendance à la digitalisation des ventes. Une fois notre migration informatique terminée (qui nous permettra d'adopter une architecture plus ouverte), nous souhaiterions travailler davantage avec des fintech, notamment sur l'aspect de banque au quotidien. Aujourd'hui, nous ne travaillons qu'avec Bankin', dont la technologie permet à nos clients d'agréger leurs différents comptes bancaires.

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