Une Blockchain de confiance contre la fraude : la CDC, la Poste, EDF et Engie créent Archipels

EDF, Engie, La Poste et la Caisse des Dépôts se sont alliés pour lancer Archipels, une « plateforme de services de confiance », s’appuyant sur la technologie Blockchain. Le premier service lancé concerne la vérification de documents certifiés comme les justificatifs de domicile.
Delphine Cuny
Le premier service opérationnel est une plateforme sécurisée de vérification de documents certifiés, pour l'instant des factures EDF ou Engie.
Le premier service opérationnel est une plateforme sécurisée de vérification de documents certifiés, pour l'instant des factures EDF ou Engie. (Crédits : Archipels.io)

La Blockchain sera-t-elle la « trust machine », la machine à créer de la confiance comme l'avait surnommée le magazine « The Economist » dès 2015 ? Cette technologie de transmission et de stockage d'information, née il y a dix ans avec le bitcoin, sécurisée grâce à la cryptographie, s'apparente à un grand registre numérique infalsifiable, ce qui en fait une candidate naturelle à la lutte contre la fraude et les escroqueries en tout genre. Une application très concrète sera bientôt possible grâce à Archipels, un projet de « plateforme de services de confiance » lancé par la Caisse des Dépôts avec Engie, EDF et la Poste, quatre grands acteurs français se définissant comme « tiers de confiance » - terme désignant une autorité publique, une entreprise ou un professionnel réglementé en mesure de certifier des transactions (banques, avocats, notaires, comptables, etc).

Les quatre partenaires, qui ont tous développé d'autres projets sur la Blockchain, ont présenté un premier pilote en mai, lors du salon VivaTech, et souhaitent créer une entreprise de projet autonome d'ici à la fin de l'année. Le premier service, qui sera opérationnel au second semestre, est une plateforme sécurisée de vérification de documents certifiés, pour le moment des factures EDF ou Engie servant de justificatifs de domicile, « très utilisées dans la fraude financière, bancaire ou sociale » soulignent les promoteurs du projet.  

« Ce premier service de certification documentaire s'adresse d'abord aux banques. Il permettra de faciliter l'obligation de connaissance clients [KYC, know your customer dans le jargon, ndlr]. Nous imaginons d'autres applications dans le commerce en ligne, la santé, les démarches administratives. Notre ambition est de créer une plateforme dépassant le cadre français, à vocation européenne », confie Nadia Filali, directrice des programmes Blockchain à la Caisse des Dépôts.

Aucun document stocké dans le registre

Le consortium aurait déjà eu des marques d'intérêt pour une extension européenne et souhaite réunir d'autres acteurs au profil similaire de tiers de confiance sur cette Blockchain accessible sur permission, utilisant le protocole Ethereum. Il envisage d'ouvrir à terme la plateforme à d'autres pièces comme les diplômes ou les attestations de salaires pour les bailleurs ou agences immobilières. Archipels s'inscrira dans le respect du règlement européen sur la protection des données (RGPD).

« Archipels est une infrastructure et non une base de données : aucun document ne sera stocké dans le registre, ni aucune donnée personnelle. Seule l'empreinte numérique du document, son « hash » sous forme cryptographique, est versée par le dépositaire » insiste Olivier Senot, directeur du développement des nouveaux services Dématérialisation et Blockchain Leader chez Docaposte, filiale du groupe La Poste.

« Lorsqu'une entreprise, une banque, voudra vérifier l'authenticité d'un document, l'algorithme de la plateforme va comparer l'empreinte de ce dernier et voir si elle correspond à celle du document authentique, selon le protocole cryptographique du « zero-knowledge proof » [« preuve à divulgation nulle de connaissance », qui permet de prouver sans dévoiler, ndlr]. Nous voulons faire d'Archipels la Blockchain de confiance, de référence. Mais ce ne sera pas le Veritas de la Blockchain ! La plateforme ne délivrera pas de sceau d'authenticité mais va garantir la provenance du document » précise-t-il.

Portabilité du dossier KYC du client

La responsabilité restera du côté de l'entité ayant « versé » l'empreinte numérique du document original (le fournisseur de facture par exemple). Le modèle économique serait fondé sur une facturation à la requête, des formules d'abonnement pouvant être envisagées.

« L'intérêt pour Engie est de valoriser ce patrimoine que constituent ses factures ainsi que son image de tiers de confiance. Il sera plus facile d'utiliser ce type de document de manière immatérielle, sans les faire circuler » indique François Erignoux, architecte processus et systèmes à la DSI d'Engie. « On peut imaginer autoriser un client à détenir un portefeuille d'informations, dont son justificatif de domicile, pour faciliter ses démarches » confie-t-il.

A l'avenir, la plateforme pourrait être étendue à d'autres services de gestion des informations liées à l'identification des entreprises et des particuliers (certification de données, valeur probante) afin de « rendre aux personnes privées et morales la main sur leurs données » explique le site Archipels.io.

« Si la réglementation le permet, l'infrastructure de confiance que sera Archipels pourrait aider à évoluer vers la portabilité du dossier de connaissance client (KYC), lorsqu'on veut ouvrir un compte dans un autre établissement, dans l'esprit du programme "dites-le moi une fois" » précise Nadia Filali de la Caisse des Dépôts.

Il ne s'agit pas pour autant d'aller jusqu'à fournir une identité numérique, même si l'on s'approche du sujet. La Caisse, acteur « neutre », met en avant les questions de souveraineté à l'heure où de grands acteurs comme Microsoft ont des projets de ce type sur la Blockchain (projet ION).

Delphine Cuny

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Commentaires 5
à écrit le 28/08/2019 à 17:51
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Quid de la spéculation ? Cette n-plus-unième technologie de transmission et de stockage d'information permet-elle d'enrayer le boursicotage sur la valeur elle-même ? rien ne l'indique et les seuls gagnants sont les casinos formés par cette associati...

à écrit le 27/08/2019 à 10:26
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Ces machins numériques initiés par des entreprises publiques n'ont aucune crédibilité et pérennité. Plutôt que de vouloir singer les Gafa, ces entreprises devraient déjà assurer leur service au meilleur coût pour le consommateur (fournir de l'électri...

le 27/08/2019 à 12:15
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Helas oui, vous avez raison. A la poste, aucune possibilite d'interpeller quelqu'un ou d'obtenir une reponse. Affligeant de mediocrite. La France a encore du chemin a faire en ce domaine.

à écrit le 27/08/2019 à 10:18
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Le meilleur moyen d'éviter la fraude c'est de ne pas la motiver et non, de la réprimer! Mais quand cela permet a certain de s'enrichir artificiellement, il n'y a pas de limite a l'imagination!

à écrit le 27/08/2019 à 10:13
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Ridicule puisque des Madoff il n'y en a pas à chaque coin de rue hein, c'est même rare car domaine oligarchique réservé. Nettoyons d'abord la finance, ce qui ne peut se produire en oligarchie, avant de nous promettre la transparence svp, merci.

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