Après une crise brutale, le grand retour d'Airbus : "c'est la reprise", dit son président Guillaume Faury

Après avoir assis la concurrence avec une première commande de grande ampleur au salon de Dubaï, Guillaume Faury livre ses impressions sur la reprise en cours. Le patron d'Airbus voit à nouveau des perspectives se dessiner sur le moyen-courrier, justifiant sa volonté de remonter rapidement en cadence. Pour le long-courrier, le constructeur européen va naviguer à vue pour encore quelques années.
Guillaume Faury, patron d'Airbus, signe un retour gagnant à Dubaï.
Guillaume Faury, patron d'Airbus, signe un retour gagnant à Dubaï. (Crédits : Piroschka Van De Wouw)

« Nous sommes beaucoup plus optimistes car nous sommes dans une période de remontée, de retour de la croissance. Les perspectives commencent à s'éclaircir », s'enthousiasme Guillaume Faury. Le président exécutif d'Airbus a en effet de quoi se réjouir : avec la signature d'une commande de 255 A321 NEO avec Indigo Partners, le constructeur européen a frappé un grand coup le 14 novembre en ouverture du salon de Dubaï.

Pour Guillaume Faury, une telle vente illustre la volonté du transport aérien de se projeter à nouveau après deux ans d'une crise sans précédent : « Nous voyons à travers la commande d'hier que les compagnies aériennes aussi commencent à regarder l'horizon et à se préparer à une situation post-crise d'une façon de plus en plus claire et homogène. Nous sommes encore dans la crise, mais nous sommes en train d'en émerger : beaucoup d'acteurs préparent l'avenir et nous aussi. C'est la reprise. »

La situation s'avère même un peu meilleure que prévue pour Airbus qui, en début d'année, se préparait certes à reprendre les discussions avec les compagnies mais n'envisageait pas de conclure de commande d'une telle importance avant 2022. « Nous avons des exceptions qui confirment la règle, avec quelques acteurs qui se positionnent plus vite que les autres », se réjouit Guillaume Faury qui y voit la confirmation que la valeur du carnet de commande et de l'accès aux créneaux de production reste très importante.

« Globalement, les chiffres traduisent une reprise de l'économie mondiale et du trafic aérien. Nous sommes en train de sortir progressivement de la crise. Mais lorsque nous disons cela, c'est que nous quittons le point bas et que nous remontons progressivement », Guillaume Faury, patron d'Airbus

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De fortes disparités dans la reprise

Le patron d'Airbus n'oublie pourtant pas que la crise a été brutale, avec 15 mois extrêmement difficile. Il concède volontiers de fortes disparités dans cette reprise. C'est le cas du trafic, où Guillaume Faury salue la très forte reprise du trafic aux Etats-Unis, ainsi qu'en Europe et dans le Moyen-Orient, mais il reste concerné par la situation en Asie qui « est plus difficile et prend plus de temps ».

Le dirigeant estime que le niveau de trafic de 2019 sera retrouvé entre 2023 et 2025, probablement au début de cette fourchette pour le trafic domestique et à la fin pour l'international, encore très contraint par les restrictions de voyage.

Au-delà de la reprise du trafic, Airbus doit aussi composer avec des situations atypiques comme en Chine. Appelée à devenir le principal marché mondial d'ici 2040 selon les prévisions de l'avionneur européen, le pays constitue pour l'instant un gros secteur d'incertitudes, en dépit d'une reprise rapides des vols domestiques.

Si Airbus continue de livrer des appareils localement - à hauteur de 20 % de sa production en 2020 - les commandes sont au point mort et le carnet de commandes s'amenuise. « C'est une situation d'anomalie, avec une période aussi longue sans commande pour Boeing ou Airbus pour un marché aussi gros et qui continue à opérer assez largement. Le renouvellement du carnet de commandes traine en longueur. Cela montre la gravité de la crise et des incertitudes, y compris pour les compagnies chinoises », déplore Guillaume Faury.

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Pleins gaz sur la famille A320, ralenti pour les long-courriers

La forte différence entre les trafics moyen et long-courrier vont en tout cas peser sur la stratégie industrielle d'Airbus pendant encore plusieurs années : « Nous venons de commencer à remonter en cadence depuis quelques mois sur les avions moyen-courriers, mais sur les long-courriers, nous sommes encore à deux appareils par mois sur l'A330, même si nous avons annoncé que nous allions repasser à trois, et à cinq sur l'A350. »

De fait, Airbus devra encore se montrer patient avant de pouvoir envisager de repartir à pleine cadence sur le long-courrier. Le dirigeant concède ainsi n'avoir absolument aucune visibilité quant au retour à un rythme de dix A350 par mois, si ce n'est que cela prendra plusieurs années : « Après cinq ou six ans de très faible niveau de livraisons, avec des stockages de longue durée et des mises à la retraite, il y aura un déficit d'avions neufs et performants au moment où la question environnementale est très importante. Il est assez probable qu'il y ait une remontée en cadence très forte dans la seconde moitié de la décennie, comme c'est le cas actuellement pour les moyen-courriers. Est-ce que ce sera au début ou à la fin de cette période ? Je ne sais pas. »

« Sur les long-courriers, nous sommes contents de ne pas avoir réduit la voilure au-delà de cinq A350 par mois et deux A330. Cela nous permet de travailler sur un retour à la profitabilité avec ce niveau de cadence là. Nous annoncerons au moment de nos résultats, début 2022, à quelle vitesse nous en serons capables. »

Guillaume Faury affirme en tout cas ne pas avoir perdu de vue cet objectif de dix A350 par mois. L'arrivée en 2025 de l'A350F, version cargo de l'appareil, pourrait d'ailleurs y contribuer. Malgré l'échec de l'A330-200F il y a quelques années, le patron d'Airbus déclare ne pas avoir de doutes sur le carnet de commandes à venir du futur avion, au contraire. Il affirme ainsi que des négociations sont en cours et que les annonces viendront : « si ce n'est pas sur le salon de Dubaï, ce sera plus tard ».

D'ici là, Airbus va donc dépendre de sa famille A320 NEO encore plus largement qu'auparavant. D'où l'importance de ne pas se tromper dans le rythme de la remontée en cadence, qui s'annonce très rapide. Descendu de 60 à 40 appareils par mois pendant la crise, Airbus vise ainsi de remonter à une cadence de 45 avions mensuels au quatrième trimestre 2021. Le constructeur veut ensuite retrouver le niveau de 2019, puis le dépasser pour atteindre 65 appareils par mois d'ici mi-2023. Et des études sont d'ores et déjà en cours pour tendre vers 70 à 75 avions par mois.

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Commentaires 2
à écrit le 15/11/2021 à 12:49
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Cette crise leur aura permis de réduire la taille de leurs avions à des mesures plus raisonnables c'est déjà ça vu que d'eux-mêmes ils ne l'auraient jamais fait préférant faire voler les avions à moitié vides.

le 07/01/2022 à 9:42
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bjr "citoyen blasé" l'aéronautique reste un atout industriel en europe qui est en train de s'effriter au profit de l'asie. la crise n'a absolument rien changée en rapport avec la taille des avions vendus .... peut-être avez-vous un véhicule ... lorsq...

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