Aubert & Duval : la direction d'Eramet a désormais une offre de reprise sur sa table

Airbus, Safran et le fonds Ace Aéro Partenaires, le fonds d'urgence créé en faveur de l'aéronautique, ont déposé une offre non engageante pour la reprise d'Aubert & Duval. Que va faire Eramet ?
Michel Cabirol
Avec la crise aéronautique, les ventes d'Aubert & Duval ont fortement plongé de 18 % par rapport à 2019 et de 34 % sur deux ans.
Avec la crise aéronautique, les ventes d'Aubert & Duval ont fortement plongé de 18 % par rapport à 2019 et de 34 % sur deux ans. (Crédits : Aubert & Duval)

L'aéronautique vole au secours d'Aubert & Duval. Une offre non engageante pour l'acquisition d'Aubert & Duval est récemment arrivée sur le bureau de la PDG d'Eramet Christel Bories, selon nos informations. Elle émane d'un consortium formé par Airbus, Safran et le fonds d'investissement aéronautique Ace Aéro Partenaires, géré par ACE Management (groupe Tikehau Capital), qui réfléchissaient déjà cet automne à une offre de reprise. Chaque membre du consortium financerait un tiers du rachat de la filiale d'Eramet.

Cette offre, qui ne serait pas follement attractive, tiendrait notamment compte de la situation économique d'Aubert & Duval, actuellement en grande difficulté en raison de la chute du marché de l'aéronautique (environ 70 % de son chiffre d'affaires). Ce qui semble indiquer que les repreneurs ont conscience qu'il leur faudra investir plusieurs centaines de millions d'euros pour relancer le deuxième producteur mondial de pièces forgées par matriçage de forte puissance.

L'État veille au grain

La banque publique Bpifrance devrait également venir en soutien du consortium dans un second temps et entrer directement dans le capital de la filiale d'Eramet. Le groupe minier va donc devoir se prononcer publiquement sur la vente de sa filiale spécialisée dans les aciers à haute performance, des superalliages et du titane, actuellement en grande difficulté. "La division Alliages Haute-Performance est profondément impactée par l'effondrement du transport aérien et ses répercussions sur l'ensemble du secteur aéronautique. Des mesures drastiques d'ajustement des coûts ont été prises", avait expliqué fin octobre Christel Bories citée dans un communiqué portant sur le chiffre d'affaires d'Eramet au troisième trimestre.

"Dans le cadre de sa revue stratégique, le groupe cherche les meilleures solutions pour l'activité d'Aubert & Duval, entreprise stratégique pour la filière, toutes les options étant envisagées", avait-elle également rappelé.

Même s'il a tenu à sonder le marché à l'international, notamment en Corée du Sud, pour susciter des expressions d'intérêt pour Aubert & Duval, Eramet ne dispose pas de marge de manœuvres : soit accepter une offre 100% française, soit conserver cet actif hyper stratégique pour la filière aéronautique et de défense française. L'état veille au grain. Et d'ailleurs la ministre des Armées a été très claire sur ce dossier. "Il faut une solution française et les autorités françaises y travaillent en lien avec les entreprises", a affirmé Florence Parly le 3 décembre dans l'émission "Le Grand Journal de l'Éco" présentée par Hedwige Chevrillon (BFM TV). Le 30 octobre, le directeur général de Safran, Philippe Petitcolin, a déclaré à Reuters qu'Aubert & Duval était un fournisseur critique pour son groupe et que Safran regardait son avenir "avec intérêt".

Aubert & Duval en grande difficulté

La filiale d'Eramet a lancé le 2 décembre lors d'un comité social et économique (CSE) la suppression de 462 postes sur neuf sites, via un plan de départs volontaires, et, en même temps, la création de 83 postes. Ce plan de départ illustre les difficultés d'Aubert & Duval, qui employait 4.141 salariés fin 2019 sur 14 sites, dont 12 basés en France. "Après des mois d'incertitude et d'inquiétude, la mise en vente d'Aubert & Duval a été officialisée" par la direction d'Eramet, "assortie d'un plan de départs volontaires qui concernera 462 postes", a rapporté FO (2e syndicat) dans un communiqué publié le 4 décembre. Avec son projet, la direction veut "réduire le coût du travail" de "70 millions d'euros", selon la CGT. Selon FO, les premiers départs "pourraient intervenir dès le premier semestre 2021".

Selon la direction d'Eramet, interrogée par l'AFP, ce plan doit permettre à l'entreprise de s'adapter à un contexte de marché "fortement dégradé" dans le secteur aéronautique. Aubert & Duval, qui fait partie de la division Alliages d'Eramet, est fortement touché par la crise générée par la Covid-19 dans le secteur aéronautique. Les ventes d'Aubert & Duval ont donc fortement baissé en 2020 : 18 % par rapport à 2019 et 34 % sur deux ans. La filiale d'Eramet a réalisé 642 millions d'euros de chiffre d'affaires en 2019 (contre 796 millions en 2018). Plus particulièrement, ses ventes dans le secteur aéronautique ont plongé de 31 % au troisième trimestre et de 21 % sur les neuf premiers mois de l'année (- 37 % sur deux ans). D'où le prix modeste proposé par Airbus, Safran et ACE Aéro Partenaires.

Michel Cabirol

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