Décidément "un mauvais vent souffle sur la défense", comme l'a récemment souligné le PDG d'Airbus, Guillaume Faury. Dans une note datée d'octobre dernier sur la finance durable, la Banque de France lui donne raison, en estimant que "les stratégies d'investissements responsables peuvent revêtir plusieurs formes", dont "des stratégies d'exclusion". Ainsi, "certaines entreprises sont exclues en raison de la nature de leur activité (par exemple : tabac, alcool, armement, jeux d'argent)", observe la banque de France, qui place sans état d'âme l'armement au même rang que le tabac, l'alcool et les jeux d'argent. Une classification qui en son temps avait fortement irrité la ministre des Armées, Florence Parly.
"J'ai constaté, non sans une grande surprise, qu'un projet qui sera soumis à l'Union européenne place les industries de défense sur le même plan que les entreprises des secteurs pornographique ou des jeux d'argent, avait-elle indiqué en juin dernier à l'Assemblée nationale. Nous ne pouvons pas laisser faire cela sans réagir. La taxonomie influe sur le traitement réservé à un secteur d'activité selon sa classification".
Convaincu que la défense a un rôle positif et sociétal à jouer, le patron d'Airbus attend pour sa part des pouvoirs publics d'avoir "une influence sur les critères de sélection des bons investissements. Un investissement, qui va dans la défense, permet d'assurer la sécurité, la prospérité, l'équilibre et la stabilité" d'un pays en général, et de la France en particulier. Plus particulièrement, Guillaume Faury attend "un message positif et une direction claire des autorités en général sur tout ce qui est ESG (Environnement, Social, Gouvernance) et taxonomie. Des sujets qui ont un impact sur les modes de financement", avait-il rappelé. Ce qui n'est pas le cas de la Banque de France.
Un projet mortel pour les entreprises de défense
Bruxelles travaille sur la mise en place de nouveaux critères de label écologique de l'UE pour les produits financiers. Un nouveau label dont seraient pour le moment exclues les industries de défense européennes. Avec pour conséquence, leur mise à l'index par les banques et les organismes financiers européens. Le ministère des Armées prend très au sérieux ce dossier mortifère. Il est donc sur le pont pour faire inclure les groupes d'armement dans la liste des industries durables, ou à défaut faire capoter ce dossier par des arguments juridiques.
Le président du comité défense du Conseil des Industries de Défense Françaises (CIDEF), Eric Béranger, par ailleurs PDG du missilier européen MBDA, a pris ses responsabilités en juin 2021 lors du Paris Air Forum organisé par La Tribune en avertissant que "ce qui va sortir du projet de taxonomie de la Commission européenne va être extrêmement important : si les activités de défense sont qualifiées de non durables et, donc, d'une certaine façon non propice à des investissements financiers, ce sera une prescription très, très importante à destination de tous les investisseurs".
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